Donald Trump faisait face vendredi à une nouvelle polémique explosive sur sa capacité à gouverner, un haut responsable de l'administration ayant évoqué en 2017 la possibilité de le mettre à l'écart du pouvoir, selon des informations du New York Times que ce dernier dément fermement.

Au coeur de ces nouvelles révélations: Rod Rosenstein, numéro deux du ministère de la Justice qui supervise l'enquête du procureur spécial Robert Mueller sur les soupçons de collusion entre l'équipe de campagne de Donald Trump en 2016 et le Kremlin.

Le New York Times s'appuie sur plusieurs sources, notamment des notes prises par des agents du FBI. Or l'un des auteurs de ces compte-rendus, Andrew McCabe, ex-directeur par intérim du FBI, n'a pas démenti leur contenu vendredi. «Il ignore comment un journaliste peut avoir obtenu ces notes», a simplement écrit son avocat, Michael R. Bromwich.

Selon le Washington Post, M. McCabe explique dans ses notes qu'en mai 2017, un Rod Rosenstein très inquiet après le limogeage-choc du chef du FBI, James Comey, par le président américain, a suggéré devant témoins qu'il faudrait enregistrer Donald Trump à son insu pour rendre compte du «chaos» régnant à la Maison-Blanche.

Il aurait alors discuté d'une mise à l'écart de M. Trump, en activant une procédure encore jamais utilisée aux États-Unis, prévue par le 25e amendement de la Constitution en cas d'inaptitude du président à gouverner.

L'article du New York Times prend un écho particulier après plusieurs publications récentes qui décrivent une Maison-Blanche dysfonctionnelle, où de hauts responsables vont jusqu'à contourner les ordres présidentiels: le livre du journaliste d'investigation Bob Woodward et la tribune d'un haut responsable anonyme de l'administration Trump.

Ce dernier texte, publié par le même New York Times, affirmait également que certains membres du cabinet avaient brièvement envisagé d'écarter Donald Trump de la présidence peu après son arrivée à la Maison-Blanche, en janvier 2017.

Plaisanterie ?

Rod Rosenstein a catégoriquement nié vendredi estimer que Donald Trump n'était pas en mesure d'exercer ses fonctions.

«Je veux être clair sur ce point: sur la base de mes échanges personnels avec le président, il n'existe aucun fondement pour invoquer le 25e amendement de la Constitution», a-t-il écrit.

«L'article du New York Times est inexact et incorrect», a-t-il ajouté, dénonçant des «sources anonymes qui sont évidemment partiales contre le ministère».

«Je n'ai jamais envisagé ou autorisé un enregistrement du président», a-t-il martelé dans un nouveau communiqué publié dans la soirée.

«Aucune des propositions de M. Rosenstein n'a apparemment abouti», souligne le New York Times. Mais «il a dit à M. McCabe qu'il pourrait parvenir à convaincre» le ministre de la Justice, Jeff Sessions ainsi que John Kelly, alors ministre de la Sécurité intérieure, de se joindre à ses efforts.

Le ministère de la Justice a laissé entendre qu'une plaisanterie de M. Rosenstein avait en fait été mal comprise, en publiant le témoignage, sous couvert d'anonymat, d'un ex-haut responsable qui se trouvait «dans la salle» lorsqu'il a évoqué le sujet.

«Son commentaire était sarcastique et n'a jamais été débattu avec une quelconque intention d'enregistrer une conversation avec le président», dit-il.

L'avocat d'Andrew McCabe, Michael R. Bromwich, explique lui que son client a bien mis sur papier la teneur de ses rencontres avec de hauts responsables du gouvernement Trump. Il les a toutes livrées au procureur Mueller il y a «plus d'un an». Une autre copie de ces notes était encore conservée au FBI en janvier 2018.

«Saper» la présidence

Ces révélations vont en tout cas dans le sens du scénario, martelé sans relâche par Donald Trump, de forces à l'oeuvre contre lui au sein même de son administration.

Son fils, Donald Junior, a d'ailleurs rapidement ironisé sur Twitter: «Personne n'est choqué que ces gars fassent tout ce qui est en leur pouvoir pour saper» la présidence Trump.

De quoi inquiéter les démocrates et autres défenseurs de l'enquête du procureur Mueller que Donald Trump n'a de cesse d'attaquer en dénonçant une «chasse aux sorcières».

Puisque le ministre de la Justice, Jeff Sessions, s'est récusé dans l'affaire russe, Rod Rosenstein est le seul rempart censé protéger la bonne marche des investigations.

Le chef de l'opposition démocrate au Sénat, Chuck Schumer, a d'ailleurs rapidement averti vendredi: «cet article ne doit pas être pris comme prétexte pour servir l'objectif vil de limoger» Rod Rosenstein «afin de nommer un responsable qui autorisera le président à s'immiscer dans l'enquête du procureur spécial».