Il n'y a pas de temps opportun pour être accusé d'homophobie, mais Carl Paladino, candidat républicain au poste de gouverneur de New York, a sans doute choisi le pire.

Le problème ne tient pas vraiment à la proximité des élections de mi-mandat aux États-Unis, qui auront lieu dans trois semaines. Quoi qu'il dise ou quoi qu'il fasse, l'homme d'affaires de Buffalo semble être voué à la défaite face au démocrate Andrew Cuomo, actuel ministre de la Justice de New York.

Mais fallait-il qu'il s'attaque aux homosexuels au moment même où la ville de New York et sa région sont secouées par une série d'attaques ou d'incidents ayant pour victimes des gais?

Dimanche, Carl Paladino s'est rendu à Brooklyn pour expliquer à des dirigeants juifs orthodoxes qu'il incarnait mieux qu'Andrew Cuomo les «valeurs religieuses». Et, tout en exprimant son opposition au mariage homosexuel, il a reproché à son adversaire d'avoir participé l'an dernier au défilé de la fierté gaie à New York en compagnie de sa fille, ce qui «n'est pas l'exemple que nous devrions montrer à nos enfants», a-t-il précisé.

Et d'ajouter: «Je pense tout simplement que mes enfants, et vos enfants, se trouveraient en meilleure position et auraient beaucoup plus de succès s'ils étaient mariés et élevaient une famille, et je ne veux pas qu'on leur lessive le cerveau afin de leur faire croire que l'homosexualité est un choix acceptable.»

Le néophyte politique, qui doit en grande partie sa candidature à l'appui du mouvement de contestation Tea Party, a omis de prononcer une phrase qui se trouvait dans le texte de son discours remis aux journalistes: «Il n'y a aucune fierté à tirer du fait d'être un homosexuel dysfonctionnel.»

Mais il en avait assez dit pour que son adversaire démocrate diffuse un communiqué condamnant son «homophobie renversante». Selon Andrew Cuomo, les commentaires de Carl Paladino prouvent qu'il «n'est pas apte à représenter New York».

Agressions contre des gais

Le jugement du millionnaire de l'immobilier avait déjà été mis en cause après qu'un site internet eut révélé sa manie de transmettre à des amis des courriels contenant des photos ou des vidéos sexistes, racistes ou pornographiques. Et voilà qu'il choisit de dénoncer l'homosexualité deux jours après l'arrestation de neuf jeunes membres d'une bande du Bronx accusés d'avoir battu trois homosexuels en raison de leur orientation sexuelle.

Avant de commettre leurs sévices, les jeunes auraient demandé à chacune de leurs victimes, dont deux sont âgées de 17 ans: «Est-ce vrai que tu es une tapette?» Et ils auraient torturé pendant des heures, et sodomisé avec un petit bâton de baseball, leur troisième victime, âgée de 30 ans.

Selon la police, ce crime a été commis le 4 octobre, à la fin d'un week-end où des homosexuels ont également été battus dans Greenwich Village et Chelsea, deux des quartiers de Manhattan où les gais sont censés jouir de la plus grande tolérance.

Suicide au New Jersey

Les commentaires de Carl Paladino interviennent en outre dans la foulée de la mort d'un étudiant de l'Université Rutgers, au New Jersey, qui s'est jeté du haut d'un pont de New York (le George Washington Bridge) après que ses ébats homosexuels eurent été filmés par une webcam et diffusés en direct sur l'internet, drame qui a fait la une de la presse new-yorkaise.

Au lendemain de sa dénonciation de l'homosexualité, Carl Paladino s'est défendu d'être homophobe, se disant notamment opposé à la discrimination contre les gais et lesbiennes.

«Je n'ai absolument rien contre (l'homosexualité)»,  a-t-il déclaré lors d'une entrevue à l'émission Today de NBC, contredisant sa déclaration de la veille. «Mes réserves portent sur le mariage homosexuel.»

Et d'ajouter, en faisant allusion à sa société immobilière: «Je compte plusieurs homosexuels dans mon organisation.»

Le candidat républicain a cependant répété que les enfants ne devraient pas assister au défilé de la fierté gaie parce qu'on y voit des hommes courtement vêtus bouger et danser de façon suggestive.

«C'est dégoûtant»,  a déclaré le candidat républicain, qui a déjà envoyé par courriel à des amis des images de bestialité.