Le passeport américain semble devenu une arme de choix pour faciliter les déplacements des ennemis des États-Unis, comme le montre l'attentat raté de New York attribué à un Pakistanais qui venait d'obtenir la nationalité américaine.

Faisal Shahzad, inculpé pour avoir tenté de faire sauter une voiture piégée samedi soir à Times Square, a déclaré aux enquêteurs qu'il venait de passer cinq mois dans son pays d'origine où il aurait reçu un entraînement à la fabrication de bombes.

Son passeport américain lui a permis de rentrer en mars dernier aux États-Unis, apparemment sans inquiéter les autorités qui lui avaient octroyé la nationalité du pays en 2009. Faisal Shahzad était arrivé aux États-Unis dix ans plus tôt avec un visa étudiant.

Ni Washington ni Islamabad n'ont pour l'heure confirmé que l'attentat du 1er mai a été commandité par les talibans pakistanais, qui l'ont revendiqué dès le lendemain.

Mais il ne fait pas de doute que recourir à des citoyens américains est un atout précieux pour les mouvements islamistes qui souhaitent commettre des attentats sur le sol de la première puissance mondiale, où l'octroi de visas est devenu beaucoup plus restreint depuis le 11-Septembre.

«Les jihadistes qui veulent frapper sur le sol américain sont confrontés à beaucoup d'obstacles, le premier étant la difficulté de trouver des agents capables d'entrer et de sortir des États-Unis», relève le centre de réflexion Stratfor, spécialisé dans les questions de renseignement.

En novembre, la fusillade qui a tué 13 personnes à la base militaire de Fort Hood, au Texas, a été attribuée au commandant Nidal Hasan, un psychiatre militaire d'origine palestinienne né aux États-Unis. Les enquêteurs le soupçonnent d'avoir été en contact avec Anwar al-Aulaqi, un imam américain caché au Yémen et considéré par Washington comme un soutien actif au terrorisme.

L'administration américaine a donné son feu vert à l'élimination de l'imam, une autorisation exceptionnelle dans le cas d'un de ses ressortissants, a indiqué le mois dernier à Washington un responsable antiterroriste.

«Cela ne devrait surprendre personne, surtout pas Anwar al-Aulaqi, d'être une cible américaine. Oui, il est citoyen américain, mais les Américains qui collaborent avec l'ennemi ne jouissent pas de protection spéciale», a déclaré ce responsable.

La nationalité américaine garantit certains droits en cas de poursuites judiciaires, au grand dam du sénateur indépendant Joe Lieberman, qui a déposé jeudi un projet de loi destiné à déchoir de leur nationalité les Américains qui rejoindraient les rangs des terroristes.

Ces derniers «ne devraient plus pouvoir jouir des droits et des privilèges des citoyens américains», estime-t-il.

Le projet de loi fait bondir les défenseurs des droits de l'homme. «Cette proposition est anticonstitutionnelle et inapplicable», observe Laura Murphy, de l'association American Civil Liberties Union. «Déchoir quelqu'un de sa nationalité est un acte extrêmement grave, ce qui serait d'autant plus  flagrant si cela se faisait uniquement sur la base de soupçons».

Le débat prend un tour encore plus politique au moment où le pays, qui s'est bâti sur l'accueil constant de nouveaux habitants, connaît des débats acharnés sur l'immigration, certains assimilant immigrés et terroristes en puissance.

«Notre système migratoire est mis à profit par des terroristes étrangers pour mettre le pied sur le sol américain», dénonce ainsi le représentant républicain Lamar Smith.