Le ministre de l'Environnement, David Heurtel, a mis en cause la véracité d'un rapport du gouvernement fédéral qui montre que le Québec piétine dans ses efforts pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre (GES), hier. Un document qui confirme que l'extraction de pétrole et de gaz est la principale source de pollution au carbone du Canada.

Québec a publié le mois dernier un rapport montrant que les émissions de GES de la province étaient restées à peu près inchangées entre 2012 et 2013. Le rapport fédéral rendu aux Nations unies hier révèle que la tendance s'est poursuivie en 2014. Le document évalue que les émissions québécoises étaient de 81,8 mégatonnes en 2012, de 82,9 mégatonnes en 2013 et de 82,7 mégatonnes encore en 2014. Depuis 2010, les émissions québécoises ont augmenté, selon l'inventaire fédéral, ce qui contredit les données du rapport québécois.

«Ça dégonfle la balloune des libéraux»

Ce n'est pas un hasard si les émissions de GES du Québec restent au même niveau, dit le porte-parole de Greenpeace, Patrick Bonin. Selon lui, les données fédérales prouvent que le Québec ne mène pas un effort sérieux pour lutter contre les changements climatiques. «Ça dégonfle énormément la balloune des libéraux qui, depuis la mise en place de la Bourse du carbone, prétendent être des leaders dans la lutte aux changements climatiques, dénonce M. Bonin. On voit qu'il y a des ratés.»

Heurtel critique

Le ministre québécois de l'Environnement, David Heurtel, a remis en cause les données du rapport fédéral, hier. Il soutient que l'inventaire québécois, publié fin mars, est élaboré à partir de données directement recueillies auprès d'entreprises et d'institutions ainsi qu'à partir de statistiques de divers organismes publics. «Notre méthode est beaucoup plus précise que la méthode fédérale parce qu'on a le marché du carbone, a-t-il expliqué. Alors, on va encore plus loin dans le calcul des émissions, leur contrôle et leur réduction.»

Encore loin des cibles

Le Canada s'est engagé sous Stephen Harper à réduire ses émissions de 17% sous le niveau de 2005, d'ici 2020. Puis, sous Justin Trudeau à la conférence de Paris, Ottawa s'est engagé à les réduire de 30% sous le niveau de 2005, d'ici 2030. Aucune de ces cibles ne semble atteignable à la lumière du bilan publié hier. En fait, les émissions canadiennes sont en hausse constante depuis 2009. «Même si le Canada n'a contribué qu'à environ 1,6% des émissions mondiales de GES en 2012, il est un des plus grands émetteurs par habitant», peut-on lire dans le rapport.

Pétrole et gaz

La hausse de la production de pétrole et de gaz a continué de plomber les réductions de GES dans d'autres secteurs, notamment la production d'électricité. Les réserves de pétrole classique, facile à extraire, se tarissent. L'industrie se tourne donc vers des méthodes plus polluantes pour exploiter de nouveaux gisements, notamment la fracturation hydraulique. La production des sables bitumineux en Alberta a augmenté de 560 % depuis 1990, ce qui constitue la principale cause de la croissance des émissions de ce secteur. Ceci expliquant cela, les émissions des provinces productrices de pétrole - Terre-Neuve-et-Labrador, Saskatchewan, Alberta - sont en hausse.

8,5 % : la part des émissions canadiennes de GES liée à l'extraction et à la transformation du pétrole dérivé des sables bitumineux.

ÉMISSIONS DE GES DU QUÉBEC 

(EN MÉGATONNES ÉQUIVALENT CO2)

1990 - 89,1

2010 - 82,4

2011 - 84,4

2012 - 81,8

2013 - 82,9

2014 - 82,7

Source : Rapport d'inventaire national 1990-2014 :  sources et puits de gaz à effet de serre au Canada

Photo Jacques Boissinot, Archives La Presse Canadienne

David Heurtel, ministre de l’Environnement, a remis en cause les données du rapport fédéral, affirmant que l’inventaire québécois est élaboré à partir de données plus précises.

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE