Les conditions de vie de milliers de Tibétains sur le plateau le plus élevé de Chine sont menacées en raison du réchauffement climatique et des atteintes à l'environnement, qui mettent en péril les ressources des trois principaux fleuves d'Asie, mettent en garde les experts.

La fonte des glaciers et du permafrost dans les montagnes entourant l'environnement fragile que constitue le plateau du Qinghai et du Tibet provoque l'érosion des prairies et des zones humides, menaçant aussi les bassins du Yangtsé, du fleuve Jaune et du Mékong. «La fonte des glaciers est un phénomène assez grave», indique à l'AFP Xin Yuanhong, un scientifique qui dirige un groupe de contrôle environnemental de la région de la source du Yangtsé.

«Dans les conditions actuelles, jusqu'à 30% des glaciers de cette région pourraient disparaître dans les dix ans», ajoute-t-il.

La région fournit près de la moitié de l'eau du fleuve Jaune, 25% du Yangtsé et 15% du Mékong.

Quelque 580 millions de personnes vivent dans les bassins de ces trois rivières -- toutes des régions productrices de céréales qui ont été touchées par de graves sécheresses et une baisse du niveau des eaux ces derniers mois.

En 2005, la Chine avait lancé un programme de 7,5 milliards de yuans (plus de 900 millions d'euros) pour freiner l'érosion dans la zone des sources, qualifié de plus grand projet de protection écologique du pays.

«Quand le permafrost fond, la terre perd sa capacité d'absorber l'eau», dit Xin.

«Plus l'eau coule, plus il y a de l'érosion, alors que dans le même temps les conditions plus sèches favorisent l'augmentation de la population de rongeurs, ce qui entraîne une plus grande détérioration du sol», poursuit-il.

Dans le cadre de ce projet, environ 20.000 bergers tibétains ont été éloignés des prairies et réinstallés dans des villages permanents, selon l'agence Chine Nouvelle.

Le pâturage a été restreint et de plus en plus de troupeaux sont élevés dans des enclos.

Pour beaucoup de bergers tibétains, il s'agit de la fin d'un mode de vie nomade traditionnel.

Dans la préfecture de Yushu, qui couvre la plupart de la superficie de cette région des sources, la moitié des 270.000 habitants dépendent de l'élevage pour gagner leur vie.

Outre la désertification, l'assèchement des lacs et zones humides est un autre problème.

«De 1976 à 2008, les marais et marécages ont diminué de plus de 32%» dans la zone des sources des trois rivières, souligne Wang Genxu de l'Institut de l'environnement du Qinghai.

Lors d'un sommet régional en avril, le premier ministre thaïlandais Abhisit Vejjajiva a estimé que le Mékong était «menacé par de sérieux problèmes venant à la fois de l'utilisation non viable de l'eau et du changement climatique», affirmant que le fleuve ne «survivrait pas» à une mauvaise gestion de ses ressources.

De son côté, lors du même sommet, la Chine a nié lundi l'impact de ses barrages sur la sécheresse historique du Mékong, se disant elle même «victime» des conditions climatiques actuelles.

En visite à Pékin, le célèbre écologiste américain Lester Brown a mis en garde la semaine dernière sur les risques de crise alimentaire en Asie, en particulier en Chine, pays le plus peuplé de la planète avec 1,3 milliard d'habitants.

«La fonte de ces glaciers de montagne dans l'Himalaya et sur le plateau tibétain représente la menace la plus importante pour la sécurité alimentaire que nous ayons jamais connue», a-t-il dit.