Michel Desjoyeaux (Foncia) confirme encore une fois son emprise sur la première place avec plus de 500 milles d'avance sur Roland Jourdain (Veolia) alors que le marin y est allé d'une révélation surprenante où il avoue être passé très près de l'abandon le jour de Noël.

Michel Desjoyeaux l'avoue maintenant : sous 45 noeuds de vent et des creux de vagues de dix mètres, le jour de Noël entre 11h00 et 16h00, le marin a connu un très gros souci qui a failli mettre carrément fin à son tour du monde. Bien qu'il reste discret sur la nature du problème, preuve que le souci est encore là, le skipper avoue avoir eu très peur que l'épreuve se termine ce jour-là.

« Je suis passé très près de la catastrophe. Juste avant la porte Pacifique. Je naviguais à 6 noeuds au lieu de 15 ou 16. Personne n'a remarqué, mais moi oui. J'ai eu de la chance et je vous ferai une démonstration à l'arrivée. Tout est en état de marche à bord et rien à première vue ne peut actuellement m'empêcher de terminer la route. »

C'est du Desjoyeaux tout craché.

En 2000, Roland Jourdain avait connu des ennuis de rail de grand-voile qui l'empêchaient de bien naviguer sous les petits airs. La nouvelle avait fait le tour assez rapidement des équipes en course et Desjoyeaux avait intentionnellement cherché les zones avec moins de vent afin de démoraliser Jourdain tout en prenant beaucoup de milles sur lui. Ce que tous ignoraient c'est que quelques jours après cet épisode, alors que Jourdain avait finalement réparé, Desjoyeaux vivait exactement le même problème, mais personne ne l'a su. Il avait finalement réparé, lui aussi dans le petit temps, alors qu'à l'époque Ellen Mc Arthur avalait les milles à la vitesse Grand V sur l'ami Mich. Ce n'est qu'à l'arrivée qu'il avait ouvert son jeu et ouvertement parlé du problème.

Si l'aspect technique et météo joue grandement sur les résultats d'une telle course, l'aspect psychologique est aussi important et à ce jeu, personne ne vient à la cheville de Desjoyeaux. Discret et jamais à court de solutions pour déjouer les embûches qu'il trouve en régate, le skipper prend toujours plaisir à démoraliser la compétition et enfoncer le clou à chaque fois qu'il en est capable.

Cette année donc, le jour même de Noël, alors qu'il détenait une avance minime de moins de 40 milles sur Jourdain, personne n'a su que Desjoyeaux était en difficulté. Quelle aurait été la réaction de Jourdain si celui-ci avait eu vent de la problématique à l'intérieur de Foncia? Il aurait sûrement mis tout le charbon afin de tenter une échappée alors que l'ami Mich était handicapé, mais puisque personne ne l'a su...

Mi-janvier, Roland Jourdain entre en collision avec un cétacé. Résultat : puits de quille et base de mât endommagés assez sérieusement pour forcer Jourdain à faire presque 48 heures ininterrompues de réparation à base de fibre de carbone afin de renforcer le tout. Durant ce temps, obligation de réduire la vitesse. Le problème? L'histoire est sur toutes les radios et les chaînes d'informations avec en bonus le vidéo de Jourdain qui montre sa réparation. De son côté, Michel Desjoyeaux bien au courant a mis toute la puissance et si vous regardez bien l'historique des écarts entre les deux copains, c'est exactement à ce moment dans le temps que Desjoyeaux a laissé Jourdain loin dans son sillage. D'un coup, l'écart entre les deux est passé de moins de 50 milles à plus de 300.

Conclusion : l'ami Bilou (Jourdain) n'apprend pas la leçon. Quand ça ne va pas bien à bord, on se tait mon Roland. Deux éditions, mêmes concurrents, problèmes semblables, mais toujours le même qui en tire avantage avec comme seule différence le silence comme arme de navigation massive.

Si la personnalité de Jourdain fait penser à un joyeux luron de la voile, toujours prêt à lancer la prochaine blague, Desjoyeaux est son contraire. C'est ce qui parfois ternit l'image de l'ami Mich qui malgré tout le talent et les victoires accumulées au fil des ans, peine à attirer la sympathie du public. Je vous le disais voilà quelques jours, Desjoyeaux est une machine de course bête et méchante. Un seul but habite cet homme : gagner.

Les détracteurs de Desjoyeaux se sont bien amusés en début de course alors que le skipper s'est retrouvé dernier à la suite d'un retour à la ligne de départ causé par des avaries de ballasts et des problèmes de nature électrique. Reparti 40 heures plus tard, Desjoyeaux qui aura été l'objet des plus grands sarcasmes quant à ses chances de revenir sur le peloton est en selle pour de bon et il s'en trouve plusieurs pour s'étouffer le café à la main lorsqu'ils regardent le classement de ce matin.

À l'heure actuelle, Desjoyeaux maintient une avance pour ainsi dire insurmontable de 535 milles sur Jourdain, soit près de 50 heures de navigation. Il prévoit son arrivée aux Sables d'Olonne entre le 31 janvier et le 2 février, tout dépendant des conditions météo et de mer.

Les positions à 16:00hrs TU + retard sur le 1er (milles nautiques)

Suivez la position des skippers

1- Michel Desjoyeaux-FRA (Foncia),

2- Roland Jourdain-FRA (Veolia Environnement), 535

3- Armel Le Cléac'h-FRA (Brit Air), 1042 (11 heures seront à retrancher de son parcours)

4- Marc Guillemot-FRA (Safran), 1983 (82 heures seront à retrancher de son parcours)

5- Samantha Davies-GB (Roxy), 2076 (32 heures seront à retrancher de son parcours)

6- Brian Thompson-GB (Team Pindar), 2612

7- Dee Caffari-GB (Aviva), 2686

8- Arnaud Boissières-FR (Akena Verandas), 2873

9- Steve White-GB (Toe in Water), 3733

10- Rich Wilson-USA (Great American), 5209

11- Norbert Sedlacek-AUT (Nauticsport), 6946

12- Raphaël Dinelli-FRA (Océan Vital), 7035

13- Vincent Riou-FRA (PRB), Abandon, Démâtage, (Classé 3e par le Jury International)

14- Jean Le Cam-FRA (VM Matériaux), idem, chavirage au sud du Cap Horn

15- Jonny Malbon-GB (Artemis), idem, Problème de grand-voile

16- Jean-Pierre Dick-FRA (Paprec-Virbac), idem, safran bâbord arraché

17- Sébastien Josse -FRA (BT), idem, Safran cassé

18- Derek Hatfield-CAN (Spirit of Canada), Idem, Barres de flèche cassées

19- Yann Eliès-FRA (Generali), Idem, Fracture à la jambe

20-Jean-Baptiste Dejeantly-FRA (Maisonneuve), idem, multiples problèmes d'usure

21- Mike Golding-GB (Ecover), idem, Dématâge

22- Bernard Stamm-SUI (Cheminée Poujoulat), idem, Échouage

23- Dominique Wavre-SUI (Temenos), idem Ennuis de quille

24- Loïc Peyron-FRA (Gitana Eighty), idem, Démâtage

25- Una Basurko-ESP (Pakea Bizkaia), idem, Bris au puits de safran tribord

26- Jérémie Beyou-FRA (Delta Dore), idem, Barres de flèches cassées

27- Alex Thompson-GB (Hugo Boss), idem, Dommages structurels

28- Kito de Pavent-FRA (Groupe Bel), idem, Démâtage

29- Marc Thiercelin-FRA (DCNS), idem, Démâtage

30- Yannick Bestaven-FRA (Aquarelle.com), idem, Démâtage