Depuis cinq ans, la cinéaste Manon Barbeau va à la rencontre des peuples autochtones à bord d'un motorisé baptisé Wapinoki Mobile. Une sorte de studio d'enregistrement ambulant qui permet aux jeunes des Premières Nations d'exprimer leur culture à travers le cinéma et la chanson.

Cette année, le Wapinoki Mobile fait un arrêt à Québec pour présenter au public le meilleur de la cuvée 2008, à l'occasion de la récolte du Potager des visionnaires, au Musée de la civilisation. Une douzaine de jeunes cinéastes et musiciens autochtones seront au rendez-vous, dimanche. Le thème des Fêtes du 400e, la rencontre, prend tout son sens avec la visite de ce studio pour le moins original.

 

«Les gens risquent d'être surpris, mentionne Manon Barbeau. Ce ne sont pas des petits films, ils sont d'une qualité assez exceptionnelle. Ils gagnent des prix dans plusieurs festivals autochtones et non autochtones, un peu partout dans le monde.»

 

 

Wapinoki signifie «fleur» en algonquin et en attikamek. C'était aussi le prénom d'une jeune autochtone de 20 ans, de la réserve de Wemotaci, au nord de La Tuque, décédée tragiquement dans un accident de la route en 2002.

 

Manon Barbeau, qui travaillait alors dans ce coin de pays à un long-métrage sur le sort des peuples autochtones, a voulu rendre hommage à la disparue, «un modèle de leadership et d'espoir» dans sa communauté. Le Wapinoki Mobile a pris la route l'année suivante, avec le soutien «infiniment précieux» de l'Office national du film.

 

En cinq ans, c'est plus de 800 jeunes autochtones qui ont transmis leur vision du monde et leur héritage culturel à travers films, vidéoclips et chansons. Les quelque 200 courts-métrages du Wapinoki Mobile constituent la plus grande collection de films autochtones d'expression française.

 

Manon Barbeau n'est pas peu fière des retombées ce projet novateur. À travers l'art, de jeunes toxicomanes ont échappé à leur dépendance, d'autres ont découvert la richesse de leur culture. Des liens se sont formés entre les générations, lors des projections.

 

Les jeunes cinéastes accompagnent aussi leurs oeuvres dans les festivals internationaux, une opportunité unique de s'ouvrir à une autre réalité, plus positive. «Quelques-uns sont partis à la rencontre de leurs frères, dans le sud de la Bolivie. Le président de ce pays, Evo Morales, est autochtone. Là-bas, les autochtones ne se suicident pas. Les jeunes portent ainsi un regard différent sur eux, leur culture, ils se sentent moins isolés. Ils reviennent au pays avec le goût de l'action.»

 

Pour la suite des choses, Manon Barbeau souhaite que le Wapikoni Mobile roule encore longtemps. «C'est un projet qui doit vivre dans le long terme. Ça prendrait au moins un autre cinq ans. Les racines sont dans le sol, mais comme l'arbre, il faudrait lui laisser le temps de pousser.»

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Lancement de la grande cuvée 2008 des films du Wapinoki Mobile, dimanche 12 octobre, 17 h, Musée de la civilisation, gratuit (contribution volontaire).