Au-delà des interprétations fantasmées - et forcément guerrières - de Hollywood, l'idée même de l'arrivée d'extraterrestres sur notre terre soulève une question aussi évidente qu'éthique: comment allons-nous les accueillir? Parce qu'après tout, si cela arrive un jour, c'est nous qui allons accueillir la visite, n'est-ce pas?

Vous riez? Ne riez plus. Parce qu'il y a dans le monde de grands cerveaux qui se consacrent à émettre des idées, des plans, des modes d'emploi face à une telle hypothèse. Même l'ONU a son «Office of Outer Space Affairs», mieux connue dans notre système solaire par l'acronyme UNOOSA.

Le cinéaste Michael Madsen (à ne pas confondre avec le comédien de Reservoir Dogs, Kill Bill, etc.) ajoute sa petite brique à l'édifice de la réflexion universelle avec son film The Visit, présenté au festival Fantasia dans la section «Documentaires de la marge». Avec son équipe, Madsen est parti à la rencontre des grands experts qui partagent avec le spectateur leurs questions et préoccupations. Or, ici, le spectateur, c'est-à-dire nous, est placé dans la peau de l'extraterrestre qui vient d'arriver. Belle idée.

Et cela donne des questions telles: que voyez-vous de nous, humains, que nous ne voyons pas? Qui sera le porte-parole de l'humanité? Nous voyez-vous comme des créatures morales?

Peurs et espoirs devant l'inconnu

Nous joignons Michael Madsen à Berlin par la bonne vieille ligne téléphonique et lui demandons s'il a décidé de faire ce documentaire en réaction aux films de science-fiction classiques où Terriens et extraterrestres sont engagés dans une guerre sans merci.

«Je pense qu'il y a deux écoles de science-fiction. Il y a celle associée au film The War of the Worlds d'Orson Welles et l'autre voulant que si les extraterrestres se manifestent, ils vont nous sauver de la disparition. Ces deux écoles de pensée sont le reflet de nos peurs comme de nos espoirs face à ce qui nous est inconnu.»

Or, à en juger par les entrevues qu'a réalisées Madsen au fil de son travail, il est clair que l'humanité pourrait facilement céder à une forme de panique. Une réaction certes liée au fait d'être confronté à l'inconnu, mais aussi à notre passé.

Notre propre histoire de l'exploration des mers et continents n'est-elle pas marquée par des actes de conquérants face aux civilisations plus vulnérables?

Cette forme de comportement, conjuguée au fait que nous n'avons toujours pas trouvé de forme de vie équivalente à la nôtre dans l'univers, nous a peut-être amenés à nous croire au pinacle de toutes formes de vie.

«Et c'est peut-être un des dangers qui nous guettent, enchaîne Michael Madsen. Nous sommes engagés dans l'exploration spatiale depuis longtemps. Or, comment allons-nous réagir si nous découvrons des formes de vie plus primitives sur d'autres planètes? J'ai peur qu'on y prête peu d'attention, ce qui serait une très mauvaise réaction.»

A contrario, comment l'humain réagira-t-il s'il découvre une forme de vie plus avancée que la sienne?, ajoute le cinéaste. Cela lui ferait du coup perdre cette espèce d'illusion qu'il se situe au centre de l'univers. Il ne pourra plus alors se bercer d'illusions.

Présenté plus tôt cette année au Festival de Sundance, The Visit est un documentaire d'anticipation, avec une direction photo très léchée, des images à la fois saisissantes et froides et beaucoup (trop?) de ralentis farcis de questions posées par une voix hors champ. Il possède tous les ingrédients nécessaires pour susciter la réflexion.

«L'élément le plus signifiant de l'humanité est la conscience, dit M. Madsen, et j'avais ici envie d'explorer cette forme de conscience. Car, à mon avis, rien ne surpassera les conséquences, pour les humains, d'une possible rencontre avec une forme de vie extérieure.»

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Lundi, 27 juillet à 15 h, et mardi, 28 juillet à 19 h 30, salle J.A. de Sève de l'Université Concordia.