Sur la ligne de front, Pénélope McQuade et Stephane Bellavance auront la tâche de faire écho à un drame qui, en plus d'avoir secoué le monde du cinéma, a eu un impact direct sur le gala qu'ils animent.

À 10 jours de la tenue du gala, Pénélope McQuade et Stephane Bellavance s'exerçaient à coordonner leurs pas. Dans une salle de répétition située au sous-sol de la grande tour de Radio-Canada, les animateurs réglaient alors les détails de la présentation d'un numéro consacré à François Dompierre, lauréat du trophée Hommage cette année. Sur le dessin d'un grand clavier, jonché de papiers «Post-it» sur lesquels sont inscrits une série de numéros, le tandem doit faire entendre les premières notes de pièces musicales célèbres, à la faveur de quelques pas de danse.

Un texte défile au télésouffleur. On n'hésite pas à modifier sur-le-champ la formulation de certaines phrases pour une meilleure mise en bouche.

Visiblement, tout se déroule comme prévu. Bien entendu, les «événements» survenus il y a un mois sont venus bousculer le plan de match d'un gala dont la préparation était déjà bien mise en chantier.

«Il a fallu retoucher le numéro d'ouverture, a indiqué la productrice déléguée Stefany Brulier lors d'une réunion de production à laquelle La Presse a pu assister. Il fallait trouver le ton et la manière pour ouvrir un gala dans des circonstances aussi particulières. Il fallait aussi trouver la façon de faire la transition entre ce moment plus grave et la célébration des artisans de l'année. La ligne est mince, mais il faut passer à l'humour et à la fête à un moment donné.»

Une situation unique

L'équipe de production du Gala du cinéma québécois 2016 a dû faire face à une situation unique dans l'histoire. À un mois de sa tenue, la Soirée a été dépossédée de son nom, du nom de ses trophées, et coincée dans un drame douloureux dont souffrent encore des victimes présumées. Ce drame a aussi atteint dans leur chair les admirateurs d'un cinéaste jusque-là tant aimé.

La décision d'aborder le drame de front dès le début du Gala a été prise rapidement. D'une certaine manière, cette approche directe rappelle un peu celle qu'a empruntée Chris Rock aux Oscars, bien que la nature du drame soit très différente. Rappelons que l'humoriste américain a fait de la polémique #OscarsSoWhite, sur l'absence de diversité dans les sélections, le principal sujet de son propos. Au Gala, l'humour ne sera évidemment pas de circonstance quand se lèvera le rideau, mais on ne fera pas comme si rien ne s'était passé non plus.

«C'est sûr qu'on ne peut pas faire la même chose que Chris Rock, car les circonstances ne sont pas les mêmes et n'ont strictement rien à voir l'une avec l'autre. Le drame de la pédophilie est trop grave», estime Stephane Bellavance, coanimateur du Gala du cinéma québécois 2016.

«On ne peut qu'en parler avant le numéro d'ouverture, avec une pensée pour les victimes. Heureusement, nous n'avons pas été dans le discours du "jouons de prudence" très longtemps. Il est certain qu'au moment où l'histoire est sortie, tout le monde aurait préféré un miracle et qu'elle soit démentie. Or, les choses se sont précipitées. À mes yeux, le témoignage de Bernard Dansereau a vraiment été un tournant. Si une incertitude planait encore aujourd'hui, je ne sais vraiment pas où l'on en serait avec ce gala.»

Une célébration avant tout

Cela dit, il n'est pas question que le drame vienne «plomber» l'ambiance de toute la soirée. L'accent sera surtout mis sur la célébration des films de l'année et sur les artisans d'aujourd'hui et de demain. Tous les numéros conçus avant les révélations du mois dernier sur Claude Jutra sont d'ailleurs produits tels quels. À cet égard, le fait que l'équipe de l'an dernier ait été reconduite dans ses fonctions constitue un net avantage.

Réalisé par Jocelyn Barnabé, le Gala du cinéma québécois 2016 est mis en scène par Nicolas Boucher, aussi scripteur.

Sur le plan télévisuel, les changements les plus remarquables relèveront surtout du domaine graphique. L'infographie a dû être refaite de fond en comble, de même que l'enrobage visuel, désormais plus axé sur la légèreté, sur la lumière.

Le Gala du cinéma québécois 2016 sera diffusé en direct du Monument-National sur les ondes de Radio-Canada, dimanche à 19 h 30. Une émission d'après-gala est aussi prévue à ARTV.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Stephane Bellavance et Pénélope McQuade participent à une rencontre de l’équipe du Gala du cinéma québécois 2016.