Oui, un autre film «inspiré d’événements authentiques» plus ou moins signifiants et relevant des faits divers, des plus insolites et fascinants, des plus pathétiques aussi. L’histoire de ce Bernie, un homme en tous points ambivalent, a fait la manchette des journaux jaunes américains au milieu des années 90.



Bernhardt «Bernie» Tiede, donc, honnête citoyen hors de tout soupçon, au service de l’Église et d’un salon funéraire, gentleman reconnu dans sa petite communauté pour son dévouement et sa loyauté, bref un être sociable et immédiatement aimable, sera pourtant accusé d’un meurtre, dont il est coupable, et condamné à perpétuité. Son calvaire est relaté ici sous le signe de la comédie, essentiellement. Mais, comme on dit, ce n’est parce qu’on rit que c’est drôle. Le fond de cette affaire est d’une infinie tristesse.

Dans un village texan qu’on nous dit reconnu et apprécié pour ses aspects paisibles, pittoresques et pour la chaleur de ses habitants, Bernie (Jack Black) exerce le métier délicat d’embaumeur et s’improvise aussi thérapeute au salon auprès des personnes en deuil. Par bonté d’âme – et sans doute par intérêt financier –, il s’intéressera de près au cas d’une vieille veuve taciturne et acariâtre, une femme très riche (Shirley MacLaine), dont il deviendra en quelque sorte l’homme de main.

Cette grabataire fortunée, horriblement malcommode, n’est pas aimée des villageois, lesquels éprouvent toutefois une immense affection pour Bernie, devenu au fil des ans une sorte de mascotte, l’ami de tout le monde qu’on soupçonne d’être homosexuel sans que cela ne pose problème. Les ennuis viendront à la disparition de la vieille veuve, en vérité assassinée à coups de fusil par Bernie dans un accès de colère aveugle. Le coupable, après avoir caché le cadavre dans un grand congélateur, accumulera les mensonges pendant des mois avant que le corps ne soit découvert.

Présenté en forme de «dramatisation» entrecoupée d’extraits documentaires avec des personnages fictifs et de véritables témoins de la tragédie, Bernie captive de bout en bout, par son approche documentaire, par ce portrait cocasse, critique mais jamais condescendant de ce qu’on appelle «l’Amérique profonde» pétrie de religion, de préjugés, avide de gloire et de richesse. Captivant, jusqu’à l’inévitable et longuette «scène de procès» qui aurait pu être écourtée.

Mais Jack Black est ici la vedette, et c’est un plaisir de voir cet acteur comique dans un rôle tragique, complexe, qu’il interprète avec une aisance toute naturelle. Sa performance sera, c’est certain, remarquée, ainsi que ce Bernie signé Richard Linklater, auteur entre autres de Dazed and Confused et The School of Rock.

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Bernie. Comédie de Richard Linklater. Avec Jack Black, Shirley MacLaine, Matthew McConaughey. 1h44.