Était-ce un complot pour saboter l'accession au titre de premier constructeur automobile mondial que Toyota venait d'arracher à General Motors? La firme nippone était-elle vraiment responsable de cette soudaine baisse de qualité de ses produits ayant suscité de nombreuses campagnes de rappel? On ne le saura probablement jamais, mais toujours est-il que le constructeur de Nagoya a connu entre 2008 et 2010 la pire atteinte à sa réputation et la pire crise de son histoire. «Nous avons tourné la page sur cet incident et nous nous sommes penchés sur nos succès passés afin de préparer l'avenir selon les critères de qualité qui ont toujours été le fondement de notre marque» a précisé Yoichi Tomihara, président de Toyota Canada lors de la présentation à la presse de la nouvelle Camry.

Compte tenu des circonstances, on peut comprendre que celle-ci représente la voiture la plus importante jamais introduite par Toyota. Il suffit de préciser qu'elle a été le modèle le plus vendu en Amérique pendant 13 des 14 dernières années pour bien situer son rôle crucial dans l'organigramme de la marque. Au Canada seulement, la Camry a trouvé preneur auprès de plus d'un demi-million de personnes et sa version hybride s'est vendue davantage que sa propre Prius.

Dans ce contexte, il ne faut pas se surprendre d'entendre les représentants de Toyota affirmer que la dernière Camry se devait d'être la référence dans sa catégorie et de surpasser toutes ses rivales. À cette fin, le constructeur japonais clame fièrement que la voiture dépassera les attentes de la clientèle en étant la meilleure de sa catégorie («best in class»).

Si la Camry confirme dans certains cas cet étalage de supériorité, elle rate le coche au plan de l'esthétique. À l'instar de la dernière Civic, elle a évolué avec une telle discrétion que seuls les propriétaires de l'ancienne version pourront faire la différence avec la nouvelle. Pendant plus de 700 km à son volant, aucun passant n'est venu nous demander de quelle automobile il s'agissait. Toyota, à coup sûr, joue la carte de la continuité: rien de révolutionnaire, mais du solide.

Des deux moteurs proposés, le 4 cylindres est partiellement nouveau et a vu sa cylindrée passer de 2,4 à 2,5 litres tandis que la puissance a gradué de 169 à 179 chevaux avec un couple en progrès de 10%. Le V6 de 3,5 litres est intouché et il garde ses 268 chevaux et son couple impressionnant. Ceux-ci se conjuguent avec une transmission automatique à six rapports, la seule offerte dans les cinq versions au catalogue depuis la LE à 23 700$ jusqu'à la XLE V6 haut de gamme cédée pour 33 700$. Un peu plus tard dans la saison, Toyota présentera la version hybride de ce modèle dont la mise au point finale a été retardée par le tsunami qu'a connu le Japon. On sait par contre que l'hybride a vu sa puissance grimper à 200 chevaux et sa consommation dégringoler à 4,9 litres aux 100 km, ce qui est un chiffre plutôt réjouissant quand le prix de l'essence frôle les 1,50$. Il est aussi désormais possible de rouler 2,5 km à basse vitesse (40 km/h) en mode électrique.

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

La Toyota Camry 2012 n'est pas du genre à faire tourner les têtes.

Le 4 cylindres suffisant

Une longue randonnée à travers les vignobles de l'Ontario du côté de Cobourg nous a convaincus de l'efficacité du moteur de série et, du même coup, du peu de nécessité des chevaux supplémentaires du V6. Ce dernier, selon moi, est tout juste bon à faire crisser les pneus au démarrage et à hausser la consommation que Toyota a mis beaucoup d'effort à contenir à des niveaux très raisonnables. Dans l'optique où la Camry n'est pas du genre à fréquenter les pistes d'accélérations ou autres sites d'exploitation des performances, un 0-100 km/h en 7,5 secondes est parfaitement satisfaisant. Le 4 cylindres met une petite seconde supplémentaire à réaliser cet exercice, tout en sachant se contenter d'une moyenne de 6,5 litres aux 100 (85% autoroute, 15% banlieue), une cote remarquable pour une voiture de ce gabarit. Comment Toyota s'est-il débrouillé pour en arriver à une si faible consommation? D'abord en nous aidant à rouler «économiquement» via un témoin lumineux vert au tableau de bord et ensuite en combattant l'ennemi numéro 1, le poids. Les nouvelles Camry sont de 140 à 200 kg plus légères que leurs devancières.

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

De l'avant ou de l'arrière, c'est du pareil au même avec la Toyota Camry 2012: pas de surprise.

En piste malgré elles

Sur le circuit de Shannonville, par où nous sommes passés, les gens de chez Toyota avaient tenu à libérer quelques voitures, une version 4 cylindres et une V6, pour qu'elles exhibent leur savoir-faire contre la concurrence représentée par une Ford Fusion et une Hyundai Sonata. Si les organisateurs avaient fait leur devoir, ils auraient évité d'inviter la Sonata au même party. Elle m'a paru la mieux équilibrée, avec un minimum de sous-virage et un comportement routier bien supérieur à celui d'une autre visiteuse, la Ford Fusion. On sent tout de suite que l'américaine est d'une autre génération avec des amortisseurs en fin de course et un épuisement des suspensions dans les deux virages en épingle. La Camry, pour sa part, a certes devancé la Fusion mais n'a pu s'élever au niveau de la Sonata, surtout dans sa version à moteur V6. Avec le 4 cylindres, elle faisait à peu près jeu égal avec la Sud-Coréene. Tout compte fait, un tel exercice était un peu stupide quand on sait que ces trois modèles sont destinés à un usage routier.

De retour sur son terrain de prédilection, la Camry retrouve ses qualités maîtresses, soit un confort appréciable magnifié par une insonorisation très poussée. Le châssis est aussi devenu plus ferme grâce à 56 soudures additionnelles, une mesure qui améliore la tenue de route. L'aérodynamique n'est pas en reste et Toyota affirme que le bruit de pénétration dans l'air a été abaissé de deux à quatre décibels.

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

Sur le circuit de Shannonville, où elle n'avait pas d'affaire, la Camry nouvelle mouture a fait souffrir ses pneus, rien d'autre.

En attendant l'Accord

L'inventaire de la présentation intérieure nous fait découvrir une bonne habitabilité pour des personnes de taille moyenne et, à l'arrière, les passagers seront ravis de pouvoir poser les pieds sous le siège avant libre de tout obstacle. Les dossiers rabattables permettent par ailleurs d'agrandir un coffre très logeable, surtout en profondeur. Le tableau de bord bénéficie d'une bonne lisibilité avec des commandes que l'on découvre sans avoir besoin de s'adonner à la longue lecture du manuel d'instructions. Par ailleurs, le présentateur de Toyota a mis 45 bonnes minutes à nous expliquer tous les dispositifs de connectivité de la nouvelle Camry. Très peu pour moi dans ce domaine.

Toyota n'a pas réinventé la roue avec ce nouveau modèle 2012, pas plus qu'il n'est sorti des sentiers battus. Dans cette nouvelle livrée, la Camry reste fidèle à la formule qui a fait son succès avec une voiture se situant une coche au-dessus de sa devancière. Il reste à voir ce que sa concurrente numéro 1, la Honda Accord, aura à offrir dans quelques mois.

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

En examinant la présentation intérieure de la Camry 2012, la perception de qualité est immédiate.