Mes rapports avec l'automobile n'ont jamais été simples. Au cours des dernières années surtout. Cette envie de restaurer une ancienne gloire de rallyes des années 80 ou ce petit spider italien finit par (me) coûter bien cher. Peut-être pas autant que cette nouvelle aventure de construire une voiture de course. Surtout lorsque vous n'en avez jamais bâti une.

Ce projet n'a rien de bien compliqué, me suis-je dit en l'amorçant. En gros, une cage de sécurité à bord, un réservoir de carburant spécifique - communément appelé fuel cell - et le tour est joué. Pas si vite. Même si le règlement interdit notamment de modifier la cylindrée du moteur, rien n'empêche de bricoler autour. La spirale - autant technique que financière - commence ici et je me suis laissé entraîner par elle.

D'origine, la mécanique de cette voiture de course en devenir délivrait 81 chevaux... Pour la libérer de la législation antipollution américaine de l'époque, tout en respectant la réglementation du championnat, plusieurs solutions ont été envisagées. L'ennui, c'est que je les ai toutes appliquées, avec pour résultat que ce 1,8 litre se trouve aujourd'hui en pièces détachées dans des bacs. Le remontage devait avoir lieu il y a quelques jours, mais la livraison de la paire d'arbres à cames, de quatre pistons bombés et de bielles forgées ne cesse d'être retardée. La saison des courses s'ouvre dans un mois et il y a encore beaucoup à faire.

Une fois le réassemblage du moteur terminé, les autres travaux ne devraient pas poser problème. Le système d'échappement - réalisé sur mesure - ne demande qu'à être boulonné et le collecteur d'admission ainsi que les carburateurs double-corps qui l'accompagnent se trouveront à ma porte ce matin. L'état de compte de ma carte de crédit y sera sans doute aussi.

Dans l'attente de toutes ces pièces, on ne chôme pas. L'habitacle a été déshabillé de toutes ses garnitures et un baquet de course occupe désormais seul le plancher d'ici la pose de l'extincteur.

La cage de sécurité est maintenant soudée et répond aux normes les plus strictes de la Fédération internationale de l'automobile (FIA). Le toit - actuellement découpé dans une toile - sera obturé. Toutes les glaces ont été démontées. Pour alléger le poids, le verre fera place au polycarbonate et les pare-chocs américains - une vingtaine de kilos chacun - finiront leurs jours chez le ferrailleur. Voilà où nous en sommes.

Cette semaine, dernier essayage afin de fixer la position de conduite volontairement désaxée pour mieux se frotter les pieds aux pédales. Suivra l'installation d'un moyeu à dégagement rapide et du nouveau volant. Une fois ces étapes terminées, on transfère la caisse de Rigaud à Saint-Rémi pour redonner à la carrosserie l'éclat du neuf. Au menu : débosselage et peinture. Le travail sera complété par la pose - encouragée par les organisateurs de la série - d'une livrée d'époque. Cette voiture a, bien entendu, couru sous les couleurs Martini, mais également sous celles de la ligne aérienne Alitalia. C'est sous ces dernières que Gilles Villeneuve a piloté une auto identique à la mienne au Tour d'Italie 1979. Le vintage rend nostalgique aussi.