C'est la seule décision que j'ai prise pour ce printemps: changer de voiture. Pour le reste, j'hésite. Une berline à cinq portes, un 4x4 urbain, un petit cabriolet, une familiale? Terrible dilemme: mes désirs se contredisent. À l'aide! En fait, j'ose à peine l'avouer: je ne sais pas quelle voiture acheter.

Mon métier consiste pourtant à essayer toutes les nouveautés du marché. A priori, je suis bien placé pour savoir laquelle est la meilleure et laquelle me conviendra le mieux. Mais les modèles offerts se multiplient, la qualité s'améliore, l'équipement s'enrichit, le design n'a jamais été aussi séducteur. L'abondance du choix, c'est le supplice des hésitants. Et je ne suis pas le seul à hésiter, à lire le courrier que vous nous faites parvenir toutes les semaines dans le cahier L'Auto.

Essayons de procéder avec méthode. D'abord, de quoi ai-je besoin? D'un véhicule confortable, silencieux, fiable, sobre et roulant en toute sécurité. Cela dit, je ne suis guère avancé: c'est la définition de la majorité des modèles actuels. Allons plus loin dans l'introspection: de quoi ai-je envie? D'une auto suffisamment spacieuse pour transporter mon vélo ou d'un utilitaire à quatre roues motrices pour me permettre de m'adonner au ski? Une fourgonnette ou une familiale fera-t-elle l'affaire?

Je souhaite aussi un véhicule pas trop encombrant pour me garer en ville, mais suffisamment vaste pour amener parents et amis en vacances. Un moteur de moins de 4 litres pour ne pas avoir à débourser la surtaxe prélevée par la Société de l'assurance automobile du Québec sur les grosses cylindrées. Automatique, sans doute, pour ne plus faire des sauts de crapaud dans les embouteillages où, tout comme vous, je me retrouve trop souvent. Quatre roues motrices? Pourquoi pas, pour plus de sécurité. Ah oui, j'oubliais: je veux aussi une position de conduite surélevée, le système de divertissement DVD (mon fils adore), des baquets chauffants, toutes les aides à la conduite et une chaîne audio avec changeur de disques intégré pour ne pas avoir à entendre ma blonde chanter. Avec toutes ces précisions, mon oiseau rare ne devrait pas être trop difficile à trouver.

Pourquoi faire simple?

Maudits constructeurs! Ils se sont ingéniés à mélanger les genres et croiser les identités. À une certaine époque, la vie était simple, et l'univers automobile rangé par ordre croissant, des sous-compactes aux grandes intermédiaires, avec les sportives, les 4x4 et les familiales pour seules fantaisies. Les envies automobiles suivaient donc une ligne ascendante: qui voulait changer de voiture visait automatiquement un modèle un cran au-dessus, au gré de son évolution familiale ou sociale.

Mais depuis, les concepteurs ont brouillé les cartes. Il y a des petites très coûteuses. Du haut de gamme pour moins de 30 000$ et des positions de conduite élevées chez les compactes. On trouve aussi de fausses familiales qui n'embarquent pas une valise de plus que les berlines dont elles dérivent. Il y a même des mariages contre nature qui, ma foi, donnent de jolis fruits: des utilitaires à roues avant motrices incapables de grimper aux arbres, des métissages entre utilitaires et fourgonnettes, des coupés qui se prennent pour des berlines ou l'inverse. Et il y a aussi des cabriolets avec toit rigide. Du coup, j'ai perdu mes repères. Mes désirs s'entrechoquent, se contredisent.

Aussi, je sais ce qui va se passer: je vais attendre un coup de coeur, une envie instinctive, une pulsion, et choisir, en essayant de ne pas m'égarer, le modèle qui aura su me séduire. L'ennui, c'est que je dois changer sous peu. Parmi les véhicules convoités, il s'en trouve qui n'arriveront pas chez les concessionnaires avant plusieurs mois, comme le coupé Mercedes de Classe C ou encore le Ford C-Max. Quoi faire? Acheter immédiatement au risque d'avoir le coup de foudre demain?

J'avais une familiale intermédiaire. À moins que je ne me retrouve au volant d'un cabriolet. Et la logique, me direz-vous? Il n'y en a pas. Il n'y en a plus...