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Tant dans les Cantons-de-l'Est que dans le Haut-Richelieu, les concessionnaires surveillent la situation de près, mais ne peuvent pas faire grand-chose pour protéger leur marché. La balle est dans le camp des constructeurs et la majorité souhaite un réajustement du prix des véhicules au Canada.

À Cowansville, le concessionnaire Chevrolet a perdu deux clients au profit des Américains au cours des derniers mois, peut-être plus. Ses anciens clients ont fait l'achat de véhicules vendus moins cher aux États-Unis. Le concessionnaire a également appris que trois autres consommateurs de sa région ont fait de même; deux ont acheté des produits GM, et un autre une BMW.

Ses deux «ex-clients» ont raconté au concessionnaire des Cantons-de-l'Est que l'exercice leur avait sauvé plusieurs milliers de dollars malgré les taxes, le coût de l'inspection des véhicules au Canada et la paperasse à remplir.

Une situation inversée

De la fin des années 80 jusqu'au début des années 2000, la situation était inversée. C'étaient alors les Américains qui traversaient la frontière pour faire l'achat d'un véhicule. Face à la pression exercée par les concessionnaires américains à l'époque, General Motors Canada avait interdit à ses concessionnaires de vendre des véhicules à des non-Canadiens.

Le concessionnaire de Cowansville a informé le constructeur que l'écart de prix actuel est démesuré et ne tient nullement compte de la valeur de notre devise. Le constructeur lui a répondu qu'il «étudiait la situation».

Frédéric Bourgeois, propriétaire de Granby Volkswagen, affirme ne pas avoir perdu de clients aux mains des Américains jusqu'à maintenant, mais il craint que, si les constructeurs ne réajustent pas les prix au Canada, le phénomène prendra de l'ampleur. M. Bourgeois souhaite que la réorganisation entreprise par Volkswagen US et Volkswagen Canada se traduise concrètement, en janvier, par une plus grande autonomie. Le concessionnaire estime que l'ensemble de l'industrie va attendre tant qu'un manufacturier ne prendra pas les devants.

M. Bourgeois compte bien sensibiliser la Corporation des concessionnaires de sa région lors du colloque qui se tiendra en octobre. Il y a une dizaine d'années, il vendait de 20 à 30 véhicules par année à des Américains. Il s'attend maintenant à ce que la situation soit inversée.

Toujours à Granby, François Plamondon, propriétaire de concessions Mercedes-Benz, Subaru et Suzuki, entend beaucoup parler de l'achat outre-frontière, mais ses ventes n'ont pas encore été affectées.

Face à ce nouveau phénomène, plusieurs concessionnaires ont demandé à leur constructeur de ne pas honorer la garantie d'un véhicule acheté aux États-Unis. Certains ont décidé d'annuler les garanties, d'autres de les modifier, tandis que d'autres ont tout simplement décidé de les reconnaître.

Mario Gemme, propriétaire de Gemme Auto (Mazda) à Granby, n'a pas perdu de clients et se sent protégé par Mazda Canada, qui ne reconnaît pas la garantie d'un véhicule acheté aux États-Unis.

À Sherbrooke, Daniel Beaucage, propriétaire de plusieurs concessions, dont Beaucage Chevrolet Cadillac, entend beaucoup parler de l'achat outre-frontière par ses clients, mais il assure qu'il n'en a perdu aucun. «Il y a bien d'autres éléments à considérer que le prix d'un véhicule lors d'un achat, dit-il. Aux États-Unis, l'acheteur canadien doit nécessairement payer son véhicule comptant. Il n'est pas question de financement ni de location, et les rabais accordés par le manufacturier ne sont pas annoncés de la même façon.»

Même son de cloche chez Val Estrie Ford. André Dionne n'a pas encore perdu de clients, même s'il entend beaucoup parler d'achats outre-frontière. «Ford va tenter de nous protéger comme il l'a fait pour les concessionnaires américains lorsque la situation était inversée», croit-il.

Robert Bilodeau, d'Élite Chrysler Jeep Dodge, se sent protégé par son constructeur. Chrysler a en effet décidé d'annuler la garantie sur ses véhicules achetés aux États-Unis par des Canadiens, alors que si un Américain achète un de ses produits, il bénéficie d'une garantie à vie sur le groupe motopropulseur s'il en est le premier propriétaire.

À Saint-Jean-sur-Richelieu, Michel Rondeau, de Rondeau Pontiac Buick Cadillac GMC, précise que le délai de carence de six mois sur la garantie imposé par GM aux acheteurs canadiens outre-frontière protège son marché et décourage les acheteurs.

Pierre Deragon, de Deragon Ford Lincoln à Cowansville, n'a pas de chiffre précis sur les ventes perdues depuis la hausse du huard, mais il croit que certains clients ont franchi la frontière. «Il est facile de constater sur l'Internet qu'une même voiture coûte 10 à 20% de moins chez nos voisins du Sud. J'ai bien hâte que les manufacturiers mettent leurs culottes et décident que ce qui se trouve d'un côté de la frontière doit y rester. Mais ils vont attendre que le marché se stabilise et ne bougeront pas avant quelques années», estime M. Deragon.

Danielle Rousseau, de Sherbrooke Toyota Lexus, rappelle pour sa part que ce sont les véhicules de luxe que le consommateur est le plus tenté d'importer.