Escroquerie ou espionnage? la clé de l'affaire Renault se trouve certainement dans les réponses de la Suisse et du Liechtenstein, attendues peut-être cette semaine, sur d'éventuels comptes bancaires détenus par les trois cadres licenciés.

En exprimant vendredi ses doutes sur ses propres accusations d'espionnage, Renault a donné corps à la thèse de la manipulation qui, si elle était avérée, fragiliserait les dirigeants de la marque au losange.

«Quand l'enquête sera terminée, nous en tirerons toutes les conséquences jusqu'au plus haut niveau de l'entreprise, y compris jusqu'à moi», a dit le numéro deux du constructeur automobile, Patrick Pélata.

La conclusion de cette enquête est désormais largement suspendue à la réponse de la Suisse, attendue comme imminente, et du Liechtenstein, à la demande d'entraide judiciaire du parquet de Paris sur d'éventuels comptes détenus par les cadres licenciés.

Ces retours sont espérés dans la semaine et pourraient confirmer les doutes sur les accusations de la direction de Renault qui soupçonnait trois de ses cadres d'avoir monnayé des informations confidentielles.

Le groupe s'est appuyé sur une enquête interne mentionnant l'existence de trois comptes, l'un ouvert en mars 2009 en Suisse alimenté avec de l'argent provenant d'un cabinet d'audit chypriote, un deuxième ouvert au Liechtenstein en février 2010 qui alimentait un troisième compte, en Suisse, selon M. Pélata.

Mais une source proche du dossier révélait jeudi à l'AFP que les enquêteurs de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, contre-espionnage) n'avaient retrouvé «aucune trace de comptes en Suisse» au nom des cadres et «aucune trace d'espionnage». Le patron de la DCRI Bernard Squarcini a toutefois précisé à l'AFP que «l'enquête pour espionnage (...) se poursuivait».

L'un des cadres, Bertrand Rochette, assure avoir reçu la réponse «officielle» de deux banques suisses affirmant qu'il ne détenait aucun compte ni coffre-fort.

Au Liechtenstein, selon une source dans la principauté, l'enquête n'a rien donné.

Les avocats des trois hommes licenciés par Renault demandent d'ores et déjà à leur ex-employeur d'admettre son erreur, avant des réparations qu'ils exigent à la hauteur de dommages faits à leur réputation.

Ainsi, pour l'un des avocats de Michel Balthazard, qui était membre du comité de direction et travaillait depuis 33 ans chez le constructeur, «Renault doit reconnaître qu'il est innocent et présenter des excuses officielles», selon Me Xavier Thouvenin.

«Le parquet doit reconnaître, lui, que la plainte n'avait pas d'objet et instruire la plainte que nous avons déposée pour dénonciation calomnieuse», a dit l'avocat à l'AFP.

Pas question pour son client de réintégrer le groupe, selon lui, en raison de la gravité des accusations portées par Renault. Patrick Pélata a assuré que si les cadres étaient blanchis, il proposerait de les réintégrer.

Pour l'avocat de M. Balthazard, il s'agira ensuite de savoir qui se cache derrière la lettre de dénonciation, de comprendre comment le constructeur a mené son enquête interne et en est venu à décider de déposer une plainte.

Selon la presse, l'un des membres du service de sécurité de Renault refuse de dévoiler à la DCRI l'identité de l'enquêteur externe qui a recueilli les informations sur les comptes bancaires et dont il était le seul contact.