Avec le recul, que faut-il retenir du 41e salon de l'auto de Montréal ? Doit-on se réjouir du fait que, malgré la crise que traverse l'industrie automobile, quelque 190 000 personnes de la (très) grande région métropolitaine continuent de se passionner pour les voitures ? Ou doit-on rappeler que le salon a enregistré une baisse de fréquentation? Alors, verre à moitié plein ou à moitié vide ?

Depuis le Mondial de l'automobile (un salon biennal) qui s'est déroulé au mois d'octobre dernier à Paris, tous les salons accusent une baisse de fréquentation. C'était prévisible, disent les constructeurs, en raison de la crise financière: le consommateur s'inquiète de la pression sur son pouvoir d'achat et a le moral en berne. Est-ce le seul motif?

 

Pas assez de nouveautés, vous dites?

Même si certains observateurs se plaisent à qualifier l'exposition montréalaise de «gros salon régional», reste que tous les sièges de «notre» grand-messe étaient occupés.

Pendant ce temps, les salons de la planète (petits et grands) enregistrent cette année une vague de défections sans précédent. Ainsi, les organisateurs de Barcelone, la semaine dernière, ont dû revoir leur stratégie après que l'ANFAC, l'Association espagnole des constructeurs d'automobiles et de camions, eut annoncé qu'elle n'y participerait pas en raison de la crise «très grave» traversée par ce secteur.

La présentation du Palais des congrès, elle, se déroulait à «guichets fermés». Tous les constructeurs étaient représentés. Sans exception. Plus remarquable encore: même si le salon de Montréal ne bénéficie d'aucune image en dehors de nos frontières, il a tout de même été le théâtre de quelques avant-premières - Kia Soul hybrid concept, Ford Fiesta ou encore Mitsubishi Lancier Sportback - qui ne se trouvaient même pas à Detroit, un salon pourtant certifié «international» par l'OICA (Organisation internationale des constructeurs d'automobiles).

Ceux qui voient le verre à moitié vide pensent plutôt que le public se désintéresse de plus en plus de la formule «trop commerciale» des salons, Montréal compris. Ils n'ont pas tort non plus.

Au-delà de ces objectifs commerciaux très légitimes (vendre des voitures), quelques francs-tireurs plaident pour donner à ces salons une vocation complémentaire de forum de la mobilité.

«Il ne suffit pas de faire de la mobilité ou de l'écologie un des slogans du salon, souligne l'un d'eux. Il faut que cela corresponde à un vrai thème illustré sur les stands, et pas dans un coin perdu du Palais des congrès», soutient tout bas un responsable des relations publiques d'un constructeur.

Si l'automobile reste un moteur de la vie quotidienne et justifie en soi un salon aux allures de fête, encore faut-il bien la choisir et mieux l'utiliser dans le respect de nouvelles valeurs sociales.

Pour qui aime l'automobile, un salon demeurera toujours une fête des sens, un émerveillement permanent, une longue flânerie et parfois même un lieu d'échanges, de discussions avec des gens qu'on ne reverra probablement jamais, mais qui sont de bonne compagnie. Forcément puisqu'ils sont venus chercher la même chose que soi: un peu de rêve et d'évasion. Une clientèle acquise, fidèle.

Mais les autres? Pour eux, le salon de l'automobile n'est qu'une vitrine supplémentaire où les constructeurs soignent leur image pour bénéficier ensuite des retombées commerciales auprès de leurs concessionnaires. Il faudra sans doute un peu plus de «rationnel» et un peu moins de «commercial» pour inciter ces «nouveaux» visiteurs à braver le froid et les tempêtes pour venir au salon. Ils ne demandent que cela. Parce que l'automobile est un objet physique. Un objet que les gens, même les moins intéressés, ont besoin de toucher. Mais pour qu'on ait envie de le visiter plutôt que les salles d'exposition des concessionnaires, un salon doit aussi être convivial, interactif, amusant, informatif et, surtout, articulé autour des consommateurs.

Hélas! à Montréal, toutes ces conditions n'étaient pas réunies. Le parcours tortueux et à sens unique de l'exposition ne facilitait en rien la comparaison des forces en présence. Difficile alors pour le visiteur de faire un choix éclairé, d'établir des comparaisons entre les modèles à moins de traîner avec lui un calepin de notes.

Il est vrai que l'endroit où a lieu le salon de Montréal n'est guère approprié (que se passe-t-il avec le Stade?), reste que les constructeurs ne font rien pour faciliter la vie aux visiteurs. Soucieux de leur identité, ils emploient pour vanter les atouts de leurs nouveau-nés des appellations différentes propres à égarer un néophyte.

Prenez par exemple le cas de la transmission intégrale (quatre roues motrices). Chez Audi, elle se nomme Quattro; chez Mercedes 4-Matic; Infiniti c'est X, etc. Idem pour les dispositifs de sécurité.

Comment s'y retrouver quand l'antipatinage s'appelle ASR chez Mercedes, ASC"T chez BMW, TCS chez Volvo? Même jungle pour le contrôle électronique de trajectoire: ESP pour Mercedes, il devient StabiliTrak chez GM, DSC chez BMW, PSM chez Porsche et DSTC dans une Volvo. Et je ne vous parle pas des boîtes semi-automatiques dites DSG, Tiptronic, Steptronic ou quoi encore. À ce jeu, il n'y a que l'ABS (Anti-Lock Braking System) qui ait réussi à faire l'unanimité chez les constructeurs.

Par chance, l'industrie a une année devant elle pour débrouiller tout cela.