Mal vues pendant 30 ans, les grosses autos reviennent sans complexe, plus sobres, plus discrètes aussi, avec un style en harmonie avec les autres modèles des constructeurs.

Mal vues pendant 30 ans, les grosses autos reviennent sans complexe, plus sobres, plus discrètes aussi, avec un style en harmonie avec les autres modèles des constructeurs.

Les magazines féminins font leur une sur la minceur. Difficile d'en faire autant dans les revues automobiles, les voitures n'arrêtent pas de grandir et, surtout, de grossir. Ce glissement vers le haut - vers le gros! - s'explique assez simplement : la taille moyenne de la population a nettement augmenté en 30 ans et les contraintes légales en matière de sécurité ont obligé les constructeurs à renforcer, alourdir et allonger de façon importante les véhicules. La prise d'embonpoint ne s'est pas seulement traduite par des dimensions à la hausse, mais également par un poids qui a suivi une courbe exponentielle. La Rabbit de 1974 mesurait 3,70m et ne pesait que 700kg. La cinquième génération de cette Volkswagen, qui sera offerte dans quelques mois chez nous, affiche le double sur la balance pour à peine 50cm de plus en longueur. Et aussi paradoxal que cela puisse paraître, ces nouvelles grosses sirotent l'essence avec beaucoup plus de modération que leurs ancêtres, de véritables ivrognes.

Consommation

Prenons, à 20 ans d'intervalle, la Town Car de Lincoln. En 1984, cette auguste berline s'animait d'un moteur V8 de 4,9 litres (155 chevaux). Elle consommait en moyenne 13,lL/100km. Aujourd'hui, le porte-étendard de Lincoln est propulsé par un V8 de 4,6 litres (239 chevaux) qui ne consomme en moyenne que 11,8L/100km. Incroyable, alors que la «vieille éponge» pesait pourtant 176kg de moins que sa descendante. Aussi, malgré ce poids et cette puissance additionnels, la Town Car actuelle accélère plus vite, freine mieux et assure une meilleure protection à ses occupants en cas d'impact. Et le progrès s'affiche aussi du côté des émissions nocives. En 1984, les échappements de cette grosse Lincoln rejetaient annuellement 9,5 tonnes métriques de gaz à effet de serre contre 8,7 aujourd'hui.

Autre exemple concernant les petites voitures : la Civic de 1984 mesurait 4,15 mètres de long et reposait sur un empattement de 2451mm. Pas terrible pour transporter la petite famille. La Civic actuelle est autrement plus accueillante, plus sûre, plus économique et moins polluante : 6,9L/100km en moyenne contre 8,7L/100km il y a 20 ans. Bref, quelle que soit la gamme de voitures, les progrès accomplis en deux décennies sont importants. Et si on remontait encore de 10 ans, jusqu'en 1974? L'écart serait encore plus considérable.

En liberté surveillée

Au départ, ces progrès n'auraient peut-être pas été accomplis si la crise pétrolière de 1973 n'avait pas éclaté. Celle-ci a totalement modifié la donne. L'automobile est alors passée de la permissivité absolue à la liberté surveillée. En plus d'avoir à consommer moins, elle a été contrainte de respecter des lois sur la résistance aux chocs en cas d'accident, sur les émissions polluantes, sur le niveau sonore, etc. Sans doute ne mesure-t-on pas à leur juste valeur les bénéfices qu'elle en a tirés. L'automobile d'aujourd'hui est infiniment plus sûre, plus respectueuse de l'environnement et tellement plus confortable.

Et ce qui peut paraître encore plus inattendu, c'est que toutes les voitures d'exception, politiquement incorrectes dans les années 70 et 80, redeviennent fréquentables, parce qu'elles aussi se sont pliées à la réglementation. Il suffit de regarder les anciennes Cadillac et autres Lincoln des années 60, summum du gigantisme, symboles d'excès à tous les plans : cylindrée, statut social, esthétique et, surtout, pollution et consommation. Des dinosaures qui se sont heureusement éteints, mettant ainsi fin à la voiture conçue sans contrainte.

Le haut de gamme s'adapte

Aujourd'hui, à quelques exceptions près (Rolls-Royce et Maybach, par exemple, qui conservent les attributs surannés du bon vieux temps), le très haut de gamme renaît sans l'arrogance qui le caractérisait jadis. Moins ostentatoire et décalé par rapport au reste de la production, il s'inscrit dans une gamme dont il est le leader.

Ainsi, la nouvelle STS de Cadillac adopte les mêmes codes esthétiques que les autres produits de la marque. Idem chez Lincoln, Audi, BMW, Mercedes et même Volkswagen, dont la nouvelle Passat ressemble à une grosse Jetta...

Cacher cette grosse voiture que je ne saurais voir? Plus la peine!