Pour entendre cette symphonie, il faut réveiller ce V8 qui, contre toute attente, ne démarre pas constamment au quart de tour. Vous voilà rouge de honte et on imagine sans peine les sarcasmes des passants. Autre petite gêne: le frein d'urgence électronique. Ce dernier, entièrement automatique, émet un grincement inquiétant à chaque fois qu'il relâche son emprise sur les roues arrière.

Pour entendre cette symphonie, il faut réveiller ce V8 qui, contre toute attente, ne démarre pas constamment au quart de tour. Vous voilà rouge de honte et on imagine sans peine les sarcasmes des passants. Autre petite gêne: le frein d'urgence électronique. Ce dernier, entièrement automatique, émet un grincement inquiétant à chaque fois qu'il relâche son emprise sur les roues arrière.

Pour transmettre puissance et couple aux roues arrière motrices (désolé, pas de rouage intégral ici), Maserati propose depuis quelques mois une boîte semi-automatique à six rapports. Conçue par ZF, cette transmission apparaît mieux adaptée encore aux goûts de la clientèle nord-américaine que la peu progressive boîte séquentielle «DuoSelect» initialement proposée et toujours au catalogue.

Plus simple d'utilisation, la ZF autorise le mode Sport, lequel bouscule les rapports pour améliorer les accélérations et les reprises, pourtant déjà électrisantes. À ce chapitre, la Quattroporte ne craint personne, pas même une S8 ou encore une XJR; la première profite pourtant d'une cylindrée plus forte et la seconde de la magie de la suralimentation. Plus rapide, l'italienne est aussi des trois celle qui s'immobilise sur la distance la plus courte.

Sport et luxe, l'alliance peut surprendre. Mais elle figure au catalogue de presque toutes les marques de prestige. La Quattroporte symbolise cependant ce qu'il y a mieux, de plus pur puisque, contrairement à ses concurrentes, elle ne verse pas dans le tuning et se moque autant que faire se peut de l'électronique. Le cadeau parfait pour l'épicurien qui sommeille en vous. Mais faites vite: Noël est dans 29 jours.

Normal, la Quattroporte comble l'absence d'un tel modèle dans la gamme Ferrari, à qui, ne l'oublions pas, Maserati doit aujourd'hui sa survie. Voilà pour la petite histoire. Pour la grande, je vous prie de vous référer à l'excellent papier d'Alain Raymond en page 15.

Sa robe racée et équilibrée porte la signature de Pininfarina, vieux complice de Ferrari mais également auteur de la A6-1500, première Maserati de tourisme apparue en 1947. Les courbes sont sensuelles; les rappels des modèles de la même lignée sont nombreux mais disséminés avec un bon goût latin, c'est-à-dire juste entre l'inesthétique désordre et la froide rationalité.

Hélas, on ne peut se montrer aussi dithyrambique à propos de l'habitacle. Qu'il soit baroque, pourquoi pas; d'autant que c'est un peu la signature de Maserati. C'est la qualité d'exécution qui pose problème. Sans être aussi légère que celle de ses ancêtres, la finition de cette Maserati demeure perfectible face aux réalisations allemandes. On regrette aussi que les boiseries qui tapissent l'habitacle ressemblent à du beau plastique; de plus, le dessin de la console manque à la fois de finesse et d'élégance. Par chance, il y a moyen de contourner une partie du problème en vous offrant la personnalisation proposée en option.

Ce qui ne se corrige pas, c'est l'ergonomie. Une science que le constructeur italien ne maîtrise pas encore totalement, comme en font foi ce changeur de disques compacts dissimulé sous la colonne de direction, ou encore ces palettes au volant (au demeurant très belles) fixes et difficilement accessibles. Même le maniement de l'ordinateur de bord est demeuré, pour moi, un mystère, malgré les explications pourtant très claires (du moins, elles semblaient l'être) du représentant de la marque.

Le plus étonnant est qu'en dépit de tous ces travers, seuls les Italiens (et quelques Anglais) savent exécuter encore des intérieurs aussi chaleureux. Dans son aspect et ses aménagements, l'habitacle de cette Maserati est conçu pour un épicurien que dépriment les intérieurs généralement austères des autos allemandes. En fait, la chaude sensation de volupté qui vous envahit quand vous vous installez à bord provient notamment de la splendeur des cuirs odorants, des touches de nickel et bien sûr de cette magnifique pendule brochée au sommet de la console.

Au fil des kilomètres, cette sensation de bien-être ne vous quitte pas. Les fauteuils sont confortables, surtout à l'arrière qui, moyennant quelques options (oui, même à ce niveau de prix), vous réserve un accueil digne d'un chef d'État. Malgré la présence de cinq appuie-tête, seulement quatre personnes profiteront de cet espace intérieur. Mais pas leurs bagages: étriqué, le coffre se compare à celui d'une sous-compacte; il refuse en outre toute forme de modularité.

Sang chaud!

Moins fluette qu'elle ne paraît sur les photos, la Quattroporte est pourtant étonnamment agile. Sans se lasser, elle dévore les kilomètres et sa solide tenue de cap, en ligne droite comme en courbe, vous met rapidement en confiance. Elle se conduit donc facilement du bout des doigts, et le plaisir est d'autant plus grand que l'on peut compter sur un châssis suffisamment rigide et rigoureux pour alterner à loisir simple promenade touristique ou parcours sportif.

En fait, on s'étonne chaque fois de pouvoir balancer une berline qui fait plus de cinq mètres de long et pèse près de deux tonnes avec autant d'aisance dans les courbes. Un équilibre naturel qui ne doit absolument rien à la panoplie d'aides à la conduite. Au contraire, celles-ci sont étonnamment discrètes et ne se manifestent à vrai dire que si la chaussée est humide, ce qui tend à rendre la conduite plus délicate.

La direction est incisive et communicative, et les suspensions idéalement calibrées, même si elles répercutent sèchement sur les saignées, mais ni plus ni moins que sur une S8 ou encore une XJR.

Le moteur

Le plat de résistance maintenant: le moteur. Posé derrière l'axe des roues, pour assurer une répartition des masses optimale, cette mécanique s'inspire étroitement de celle de la Ferrari 360 Modena, excusez du peu. Mais le brio rageur du 4,2 litres de la 360 Modena fait place à un tempérament quelque peu assagi dans la Quattroporte.

Mais le principal a été préservé: son timbre de voix inimitable. On reconnaît, malgré les modifications apportées par les motoristes de Maserati, les exaltants et inimitables accents du V8 Ferrari. Un chant plein, feutré ou déchirant selon la position de l'accélérateur. Ça vous prend aux tripes, et rien que pour le plaisir de nos oreilles, on a envie de pousser l'orchestre à jouer plus haut et encore plus fort.