C'est l'une des voix jamaïcaines les plus importantes et appréciées du public qui vient de disparaître. Les aficionados de reggae sont en deuil du légendaire chanteur Alton Ellis, le «parrain du rocksteady», décédé hier matin dans un hôpital de Londres après avoir lutté pendant un an contre le cancer, ainsi que l'a confirmé la maison de disques Trojan sur son site web.

Le rocksteady a pris le pas sur le ska à la fin de 1966, alors que la Jamaïque vivait une certaine désillusion, conséquence de l'accession à l'indépendance du pays (1962) et de ses promesses non tenues. Le frétillant ska a ralenti son tempo et digéré les influences du soul et du r&b américain pour donner le mélodieux, caressant et souvent rebelle (les chansons de gangsters «rude boys») rocksteady, sorte de péage sur la route vers le reggae.

 

De cette époque, Alton Ellis est sans contredit le plus grand interprète, plus encore que les Ken Boothe et Hopetown Lewis concurrents. Résolument anti-rude boy, Ellis a mis sa voix poignante, fragile et agile au service du producteur Duke Reid, propriétaire des studios Treasure Isle, qui ravissait alors au roi du ska, Coxsone Dudd (Studio One), la couronne de la musique populaire en Jamaïque.

Les succès de Monsieur Soul de la Jamaïque - le titre de son meilleur album - sont aussi immortels que sa voix: Cry Tough, Breaking Up, Ain't That Loving You, Rocksteady, Dance Crasher, All My Tears Come Rolling, Can't Stand It, et tellement d'autres, certains enregistrés avec sa soeur Hortense ou la chanteuse Phyllis Dillon.