Marie-Josée Lord aime s'inspirer des destinations qui la font rêver pour ses spectacles. C'est aussi le cas de Sous les lumières de Lisbonne, le concert qu'elle donnera ce soir avec l'Orchestre de chambre McGill à la salle Bourgie sous la direction de Boris Brott. Regards d'une chanteuse sur un itinéraire de coups de coeur ensoleillés.

Le Portugal et le fado

«C'était impossible, pour moi, de faire voyager les gens en musique en oubliant le fado. En faisant mes recherches, j'ai trouvé une parenté entre l'histoire du fado et l'histoire du negro spiritual. C'est un peu le blues des Portugais. Le Portugal est un pays qui a vu passer beaucoup d'immigration et de gens de partout. Les gens qui vivaient là se sentaient toujours nostalgiques de quelque chose: d'une époque, d'un lieu qu'ils avaient quitté. Le fado est l'expression de cette mélancolie. Pour une chanteuse lyrique comme moi, c'est un défi, car c'est un chant très guttural, proche du sanglot. Il fallait que je trouve un fado qui convienne à ma voix, ce qui est le cas de Duas Lagrimas de Orvalho, de Carlos do Carmo

L'Espagne et l'amour

«Quand j'ai monté mon spectacle Yo Soy Maria, je n'étais jamais allée en Espagne. L'été où nous avons enregistré l'album, je suis allée avec mon amoureux visiter la Costa del Sol. Nous avons visité Séville et les jardins de l'Alhambra. Ce voyage concordait avec une foule d'éléments du spectacle et confirmait les atmosphères que je ressentais par la musique et les textes des chansons. J'aime beaucoup le répertoire espagnol. Pour ce concert, je fais les Canciones Amatorias, un recueil de sept chansons d'Enrique Granados, dans une version arrangée pour ensemble à cordes. Ce cycle est très raffiné et poétique, il parle d'amour et de beauté. Je chante aussi les Quatre Madrigaux d'Amour de Rodrigo.»

Le Brésil et Villa-Lobos

Dans un itinéraire musical qui passe par le Brésil, il existe une pièce incontournable et connue de tous: Bachianas Brasileiras no 5, sans doute l'oeuvre la plus célèbre du compositeur brésilien Heitor Villa-Lobos. «C'est une pièce très stressante pour les chanteurs parce que c'est une vocalise, elle est chantée très à découvert, et la rythmique est instable. On y compare le coucher de soleil à une jeune fille qui se prépare pour sortir. C'est une ode à la beauté de la nature et de la femme. Pour moi, le Brésil évoque avant tout la chaleur et j'adore le soleil. Quand le printemps arrive, j'ai l'impression qu'on enlève un voile sur le monde.»

Les États-Unis et Gershwin

En janvier, Marie-Josée Lord interprétera le rôle de Serena, dans Porgy and Bess, de Gershwin, à l'Opéra de Montréal, où elle n'a pas joué dans une production depuis 2009. «J'ai choisi de faire Serena, même si on m'avait proposé le rôle de Bess, parce que je tenais à chanter My Man's Gone Now. Pour moi, Porgy and Bess a été un de mes premiers contacts avec l'opéra et My Man's Gone Now, un des premiers airs d'opéra que j'ai appris. Quand je l'ai chanté pour la première fois, c'était comme de trouver la robe parfaite: pas besoin de retouches! C'est un grand air de détresse, que Serena chante parce que son mari s'est fait tuer. Pour une femme noire vivant dans un ghetto à cette époque, c'était encore plus dramatique de perdre son mari. J'ai bien hâte de participer à l'opéra.»

Montréal, chez soi

Depuis trois ans, la chanteuse a multiplié les spectacles, donnant jusqu'à quatre concerts par semaine. Cette année, elle ralentit la cadence pour se ressourcer. «J'ai vraiment poussé la machine et j'ai maintenant besoin de faire le plein pour pouvoir apporter du nouveau. Je passe du temps à la maison. J'ai des idées qui sont en train de germer, mais je ne présenterai pas de nouveau projet avant peut-être 2015-2016. C'est difficile de performer et de créer en même temps, et en plus, de gérer sa carrière. La création et l'apprentissage de nouveau répertoire demandent du temps, et j'en suis à cette étape.»

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Mardi à 19h30 à la salle Bourgie.