En 2008, Melissa Etheridge a chanté à la convention du Parti démocrate à Denver. Mardi soir, pendant que ses compatriotes seront rivés à leurs écrans de télé pour savoir qui d'Obama ou de Romney sera leur prochain président, elle chantera pour ses fans montréalais au Théâtre Maisonneuve. Pourquoi donc cette femme plutôt occupée se considère-t-elle comme est «la moins active des activistes»?

Parce qu'elle va être à Montréal le 6 novembre, Melissa Etheridge a voté par anticipation. Elle ne s'attend pas à une grosse surprise ce soir-là et prévoit qu'Obama sera réélu. «Mais tu sais, ajoute-t-elle, la politique américaine est une grosse business un peu folle...»

Contrairement à un Bruce Springsteen qui avait prévu se tenir en retrait pendant cette campagne électorale mais qui s'est ravisé récemment pour prêter main-forte aux démocrates dans des États-clés, Melissa Etheridge ne s'est pas impliquée cette année.

«Non, j'ai vraiment décidé de passer mon tour cette fois, explique-t-elle au téléphone. En politique américaine, le plus grand changement qui puisse survenir c'est quand chaque citoyen vote avec ses dollars. La seule façon de changer les choses, c'est en modifiant nos habitudes de consommation. Les multinationales, les grosses entreprises pharmaceutiques et alimentaires, nous entraînent au-dessus du précipice et peu importe que ça soit les républicains ou les démocrates, c'est le même programme qui est mis de l'avant. Bien sûr, il y a entre les deux partis beaucoup de différences sur le plan social qui me touchent personnellement...»

Ainsi, la chanteuse a prêté sa voix récemment à une pub radiophonique pour l'amendement 64 qui vise à légaliser la mari à des fins médicales au Colorado. «Je crois qu'on peut combattre l'alcoolisme et contribuer ainsi au progrès social en légalisant le cannabis, mais je ne manifeste pas dans la rue, dit-elle. Parmi les autres sujets qui me touchent, il y a le cancer du sein, en fait le cancer en général, et la question gaie.»

Retour dans le passé

Melissa Etheridge a vaincu le cancer au milieu des années 2000 et elle a fait son coming-out il y a belle lurette. Elle a eu quatre enfants dans deux relations qui se sont terminées de façon tumultueuse et auxquelles elle fait écho dans son récent album 4th Street Feeling. Elle file aujourd'hui le parfait amour avec Linda Wallem, cocréatrice de la télésérie Nurse Jackie avec laquelle elle planche sur la création d'un spectacle musical à Broadway.

Son nouvel album, dit-elle, est non seulement un condensé de tout ce qu'elle a fait à ce jour, mais il est imprégné d'un esprit qui renvoie à ses premiers disques. Et il a été fait précisément pour être joué devant un public. C'est l'oeuvre de la fonceuse qui a cassé la baraque au St-Denis quand elle a aisément éclipsé la vedette de la soirée, Bruce Hornsby, en 1988. Dans ce disque, elle joue toutes les guitares, encouragée en cela par son guitariste actuel, Pete Thorn, qui n'a pas de problème d'ego, dit-elle: «Ça donne une nouvelle énergie à mon show.»

4th Street Feeling fait référence à Leavenworth, au Kansas, sa ville d'origine. Dans cet album, le passé semble agir comme un baume sur les blessures récentes. «Tout à fait, acquiesce-t-elle. Avec le recul, ma ville natale n'est pas si mal que je le croyais, je la trouve même chouette. Je me souviens de tous les rêves qui m'habitaient et si j'ai réussi ç'a a sûrement un lien avec là d'où je viens. 4th Street Feeling me rappelle des souvenirs qui me sont chers.»

Même si elle chante dans la chanson qui donne son titre à l'album «I get the feeling that everything I'm doing now I'm doing wrong», Melissa Etheridge ne s'apitoie surtout pas sur son sort: «J'ai 51 ans, j'ai des enfants et des hypothèques à payer, j'ai des soucis comme n'importe quel autre adulte. Mais j'aime ma vie, elle est fantastique, mais en jetant un oeil derrière, je me souviens d'une époque où j'étais tellement libre. C'est comme un aller-retour entre maintenant et le passé.»

Il y a même dans Be Real, une chanson un peu funky, un clin d'oeil amusant à la chanson Fame de David Bowie. «David Bowie a été un genre de pionnier, explique-t-elle. Il était perçu comme ce gars un peu fou du rock and roll anglais et il a nous a surpris avec la chanson la plus funky qui soit. Fame a traversé toutes les frontières, du rock and roll au soul et au funk. J'ai donc essayé moi aussi de faire le pont vers la musique soul que j'aime énormément et c'est pour ça que je salue Bowie au passage.»

Melissa Etheridge, au Théâtre Maisonneuve, le 6 novembre.