On a claironné leur disparition. Ils sont toujours bien en vie. Et ils rockent...

On les avait un peu oubliés, ceux-là. Dix ans se sont écoulés depuis leur dernier passage à Montréal et rien n'indiquait qu'on les reverrait un jour.

Il faut dire qu'entre 1999 et 2008, l'Orchestre national de Barbès - ONB pour les intimes - n'a pas enregistré un seul album. En France, des rumeurs couraient sur leur dissolution. Il a fallu la sortie d'Alik, troisième disque paru l'an dernier, pour nous rappeler que le collectif trans-maghrébin de Paris était toujours bien en vie.

 

«Il fallait qu'on fasse une pause, indique Louis Saldanha, imprésario du groupe depuis les tout débuts. Cela faisait quatre ans qu'on tournait sans relâche. On avait besoin de mettre les choses à plat et de régler quelques histoires. Notamment au niveau des différends artistiques...»

Pour faire une histoire courte, certains membres souhaitaient prendre une direction jazz fusion, alors que d'autres préféraient s'orienter vers le rock et les sonorités plus rêches. Sous la houlette du bassiste Youcef Boukella, c'est finalement la faction rock qui a gagné. Et ça s'entend. Loin des albums proprets des années 90, Alik est en effet un disque plus brut, voire plus punk, qui n'est pas sans rappeler les délinquances d'un certain Rachid Taha. Avec raison, Saldanha indique que cette nouvelle approche «va beaucoup mieux avec le côté tribal» des rythmes traditionnels marocains et algériens (alawi, trab, gnaoua) qui ont toujours été au coeur de l'ONB.

Pas étonnant que le groupe ait choisi de reprendre - en français et en arabe s'il vous plaît - la chanson Sympathy for the Devil, des Rolling Stones. Cette version gnaoua plutôt marrante indique clairement l'état d'esprit de la formation, qui a choisi de ne plus rien se refuser, pourvu que la sauce prenne. Pour la petite histoire: les Stones avaient pris l'habitude de faire jouer le premier album de l'ONB, avant tous les concerts de la tournée Voodoo Lounge, à la fin des années 90. «On voulait leur renvoyer l'ascenseur», explique Saldanha, un sourire dans la voix.

Mais Alik ne s'arrête pas là. Au-delà du rock, l'album s'offre aussi de sympathiques virées du côté de la valse musette, la fiesta caribéenne et la rumba congolaise.

Mais qu'on ne s'y trompe pas. Sous ses airs de fête, l'ONB aborde aussi des sujets plus sérieux. C'est le cas de la pièce Résidence, écrite il y a plus de 30 ans par le compositeur kabyle Slimane Azem, ici réactualisée à la manière soukouss.

La chanson, qui traite de l'épineux problème de l'immigration en France, était une évidence pour la formation, dont les membres sont en majorité d'origine maghrébine. Mais selon Saldanha, cela ne fait pas pour autant de l'ONB un groupe politique.

«Social oui, politique non. Qu'on soit de gauche ou de droite n'a pas d'importance. Ce qu'on veut, nous, c'est parler de la vie. Bien sûr, on est contre le fait que l'Occident exploite outrageusement l'Afrique. Bien sûr, on est contre le fait que la moitié des richesses mondiales soit la propriété de 400 individus. Et bien sûr, le fait de mélanger les cultures est en soi une affirmation. Mais nous mettre dans la case des groupes politisés a pour effet de réduire notre message. Ce qu'on prône, nous, c'est l'ouverture, le partage et les valeurs humaines.»

Sur quoi l'imprésario nous parle de couscous, de paella et de sardines portugaises, autant de plats qui se dégustent collectivement, peu importe les opinions et les origines. «Ce qui compte, conclut-il, c'est de se retrouver tous ensemble et de faire la fête. C'est pour ça qu'on est bien contents de revenir au Québec. Pour la chaleur humaine. La dernière fois, ça fait aussi longtemps que notre deuxième disque.»

Ah oui, c'est vrai, on avait presque oublié...

Orchestre national de Barbès, le 16 juillet au Métropolis, dans le cadre du Festival Nuits d'Afrique, et le 17 juillet à la scène Métro, Festival d'Été de Québec.

 

Nos suggestions

Le Festival Nuits d'Afrique débute mardi au Théâtre National, avec le retour du groupe latino-franco-espagnol Sergent Garcia. Il se termine le 26 juillet avec la formation antillaise Kassav, qui célèbre ses 30 ans de zouk au Métropolis. Entre les deux, une trentaine de concerts intérieurs et extérieurs marqués par le rythme, le mélange et la chaleur des Tropiques. La Presse a fait ses choix.

Unmalali

Les Garifunas, descendants d'esclaves africains, forment une des communautés les plus méconnues d'Amérique centrale. On les retrouve au Guatemala et au Honduras, mais surtout au Bélize, où ils sont beaucoup plus qu'une minorité visible. Le groupe Umalali propose les chants traditionnels des femmes garifunas, en saupoudrant le tout de rock, de blues et de jazz.

> Mercredi 15 juillet au Kola Note

Watcha Clan

Originaire de Marseille, ce quintette mixte franco-maghrébin offre un surprenant mélange de chââbi algérien, de musiques électroniques, de hip hop et de rythmes est-européens. Vous pensez que c'est tout et n'importe quoi? Tout dépend de votre ouverture d'esprit.

> Dimanche 19 juillet, au Kola Note

Novalima

Oubliez la flûte de Pan et El Condor Pasa. Le Pérou, c'est aussi la musique afro-péruvienne de Novalima, une nonnette bicolore, qui propulse les rythmes traditionnels dans des zones reggae, son, afrobeat, hip hop ou salsa insoupçonnées. Du bon mix média, à la fois moderne et bien enraciné.

> Mardi 21 juillet au Lion d'or

Freshlyground

Parce que des groupes du Mozambique, du Zimbabwe et d'Afrique du Sud, on n'en voit pas souvent par ici. Encore moins quand ils sont composés de Noirs et de Blancs.

> Mercredi 22 juillet, Balattou

Kassav

Ils remplissent les salles à chacun de leurs passages. Ça ne devrait pas être différent cette année.

> Dimanche 26 juillet, Métropolis