La sagesse est-elle soluble dans le rock? Vaste question à laquelle Gourmet Délice n'a qu'une ébauche de réponse. Dans l'album Vile et fantastique, il est évident que Le nombre a baissé d'un cran la masse de décibels. Mais ce n'est qu'un leurre, prétend le musicien.

«Oui, les rockeurs vieillissent, je l'admets, concède le bassiste. Pour ce qui est de la facture du disque, les textes, c'est tout naturellement qu'on s'est éloigné d'un rock qui bûche, sans textures, sans finesse. Rien de prémédité là-dedans. On ne s'est pas dit : «On évite de mettre des cymbales qui éclatent mur à mur...»

 

«Je crois que Vile et fantastique ressemble davantage à notre premier album, ajoute Gourmet. Le chanteur Ludwig Wax, qui signe les textes, pousse ses mots d'une voix encore plus lugubre, maintenant qu'il ne hurle plus pour suivre les guitares de Jean-Philippe «Dynamite» Roy, réalisateur de l'album.»

Il y a même des claviers et synthétiseurs sur ce disque! «Ça, c'est Alex McMahon, qui nous a retrouvés en studio» à Saint-Cloud, en banlieue de Paris. Enregistré d'abord en France à l'hiver 2008, le disque était initialement destiné à un label français qui avait appris à connaître les membres du groupe au fil de cette quarantaine de concerts offerts en Europe, entre 2003 et 2007.

«Le disque devait paraître là-bas l'automne dernier sur l'étiquette Boxson, explique Gourmet. Finalement, on s'attend à ce qu'il ne sorte qu'à l'automne, peut-être même l'hiver prochain. Question de circonstances : l'industrie de la musique est durement touchée, là- bas. Ce n'est pas simple de monter une tournée dans ces conditions...»

Une vocation

Gourmet sait de quoi il parle. L'industrie de la musique, il en a fait son métier ces dernières années. Le rock serait alors sa vocation; le business, une nécessité.

En 2004, peu après la sortie du remarqué Scénario Catastrophe, le groupe était à la fois confronté aux embûches d'un groupe rock qui n'accepte aucun compromis stylistique (lire : pas de radio commerciale) et au départ du chanteur Wax, parti séjourner en Afrique. Le comble du comble, Gourmet s'est brisé un bras, qui fut immobilisé pendant plusieurs semaines. Ça ne fait pas un groupe rock très vigoureux, tout ça.

«Plutôt que de m'enfermer chez moi à m'arracher les cheveux en me demandant comment j'allais faire fonctionner tout ça, le groupe, mon label, j'ai décidé de me grouiller.» Au fil de discussions avec un manager, Yanick Masse, et un confrère musicien, Jean-Christian Aubry, un constat : il fallait s'associer, monter une structure et apprendre à s'occuper de leurs affaires.

Au début, Bonsound était une affaire de famille qui s'occupait de groupes de l'underground directement liés aux trois apprentis businessmen : Le nombre, Gwenwed, les Breastfeeders. Cinq ans plus tard, l'entreprise compte sept employés, fait de la gestion de carrière, de la promotion, du booking de spectacles et chapeaute trois labels, Proxénett (Philippe B), Blow the Fuse (Le nombre) et Bonsound Records (Radio Radio, Yann Perreau...).

«Ce n'est pas un problème de jouer dans un groupe et de faire rouler Bonsound, surtout parce que y'a une équipe solide qui travaille dans l'entreprise», dit Gourmet.