Il y a dix ans, le disque vinyle se vendait quelques dollars ou finissait à la poubelle. Il revient aujourd'hui en force, à la grande surprise des magasins indépendants américains qui ont lancé le festival du disque, qui fête sa 10e édition samedi.

Avec Metallica en tête d'affiche de la première édition, l'organisation avait vendu 10 000 vinyles du spectacle qui s'était tenu ce jour-là. Une révélation pour Michael Kurtz, cofondateur du Record Store Day: «Cela m'a fait comprendre que nous étions sur quelque chose. Nous avons saisi quelque chose que personne n'aurait pu imaginer».

Le festival, qui s'est constitué en réaction à l'énorme part de marché conquise notamment par le numérique cette dernière décennie, se déroule dans plusieurs milliers de magasins samedi pour la dixième année consécutive, preuve de l'engouement populaire pour la part du vinyle dans l'industrie de la musique.

L'événement a grimpé depuis la première édition du Record Store Day à des niveaux non observés depuis les années 1980.

Le cabinet Deloitte estime que le chiffre d'affaires du vinyle atteindra 1 milliard de dollars cette année, alors que les ventes de CD et les téléchargements numériques baissent.

Au Royaume-Uni, où la renaissance du vinyle a été particulièrement importante, les disques ont généré en 2016 plus de revenus que les gains publicitaires des plateformes de streaming musical.

S'approprier le disque

«Pour le fan de musique plus âgé, les gens de mon âge, c'était une chose romantique que de pouvoir revenir en arrière, acheter tous vos disques préférés à nouveau et acheter des versions spéciales de ces albums», estime Michael Kurtz, affublé d'un t-shirt de l'icône punk Iggy Pop.

L'homme de 59 ans estime que le retour du vinyle, notamment défendu par Elton John, un soutien du festival, a permis à une nouvelle génération de découvrir ce support. «Une manière de répondre au numérique», précise-t-il.

L'arrivée de ce festival a été une bonne nouvelle pour Erika Records, entreprise installée dans le comté d'Orange en Californie et qui n'a jamais cessé de produire des vinyles, fabriqués à base de cire. Sa production a été multipliée par huit durant la dernière décennie, avec désormais 20 000 disques fabriqués chaque jour.

«La résurgence du vinyle a été très bonne pour nous», confie Ma Nerriza Dela Cerna, responsable chez Erika Records, seule usine américaine à produire des vinyles personnalisés pour les artistes.

Le boom durera-t-il?

«Beaucoup de gens disent que l'industrie du vinyle finira par ralentir», précise Mme Cerna. «Personnellement, je ne pense pas (...), nous présentons le vinyle à un nouveau public tous les jours.»

Record Store Day et Erika Records puisent tous deux leurs racines dans un travail avec des labels indépendants. Au fil des ans, toutefois, de grandes maisons ont rejoint le Record Store Day, pour le plus grand plaisir de Michael Kurtz, qui voit dans ce rapprochement le succès du vinyle.

L'homme derrière le festival du disque s'inquiète néanmoins que les grands labels vendent directement aux clients, contournant les petits indépendants.

Le vinyle connaît un succès important dans le rock, le jazz et le classique, mais a eu beaucoup moins d'impact - dans la dernière décennie - dans des genres comme le rap, où les artistes se tournent vers le streaming.

Même si le vinyle représente une part toujours plus importante du marché musical, le taux de croissance aux États-Unis a ralenti à 4% en 2016.

«La musique a toujours eu un noyau de 10 à 15% de la population qui achète la vision complète de l'artiste, que ce soit sur CD ou vinyle», précise Michael Kurtz, qui discerne la stabilisation du marché. «Et en ce moment on est plutôt proches de cela.»