Vendredi soir, l'Igloofest accueille la jeune DJ Maya Jane Coles, sensation britannique qui sera fort possiblement le clou de la soirée pour moult dépisteurs de nouvelle musique électronique destinée au plancher de danse.

«Producer of the Year 2011» désignée par le périodique DJ Mag, « best breakthrough DJ 2011» choisie par Mixmag, neuvième «DJ de l'année 2011» selon un sondage réalisé par le périodique Resident Advisor, «découverte de l'année 2011» aux DJ Awards d'Ibiza, l'artiste de 23 ans a fait la une de  magazines spécialisés et passe par la grande porte de tous les territoires où on l'accueille. Inutile d'ajouter qu'elle est acclamée par ses pairs de différents milieux - les femmes DJ Anja Schneider ou Ellen Allien, les stars Damon Albarn et Tricky pour ne nommer que ceux-là.

Voilà qui justifie amplement ce questionnaire auquel Maya Jane Coles répond en toute courtoisie.

Q: Vous êtes très jeune et avez déjà une immense réputation sur les planchers de danse. Êtes-vous heureuse de cette progression rapide?

MJC: Oui, absolument.  Qui ne le serait pas? Je me sens si chanceuse de faire ce que j'aime et d'être reconnue pour faire ce que j'aime.

Q: Avez-vous peur du hype, de la surenchère médiatique?

MJC: Tu peux craindre le buzz à la seule condition de ne pas avoir la matière pour assurer ou encore en ne sachant pas ce qu'en sera la suite.

Q: Que pensez-vous de votre propre longévité?

MJC: Pour moi, la musique est une manière de vivre. Depuis que j'ai laissé l'école, j'ai passé chaque seconde de mon temps de travail à faire de ma musique l'objet d'une vraie carrière. Alors? Je n'ai vraiment pas l'intention d'être une artiste éphémère. J'ai beaucoup de projets, beaucoup d'idées dans mes cartons et je n'exploite pas qu'un seul filon. J'ai espoir de laisser ma marque dans l'industrie de la musique. Je ne veux pas être «cette fille qui fait de la house music». J'ai beaucoup plus à offrir ! Lorsque mon prochain album sera rendu public, on pourra voir un autre aspect de mon travail. J'espère en ce sens toucher des auditoires bien au-delà de la musique électronique destinée au plancher de danse.

Q: Croyez-vous que votre condition de femme déteint sur vos compositions?

MJC: Je n'exprime que la musique qui émerge naturellement de moi. Il m'importe peu qu'on la qualifie de mâle, femelle ou entre les deux! Cela dit, il m'apparaît clair que beaucoup de ma musique comporte une touche vraiment féminine.

Q: Croyez-vous pertinent d'être admirée parce que vous êtes parmi une minorité de femmes DJ internationalement renommées?

MJC: Je ne veux pas que mon sexe devienne une catégorie. Oui, c'est un fait indéniable, il y a moins de femmes réalisatrices et DJ que d'hommes, mais on constate une proportion beaucoup plus grande d'auteures-compositrices-interprètes... et je ne vois pas les hommes qui font de même dans une catégorie spécifique. Je crois néanmoins que le nombre de femmes dans la musique électronique ne cessera de croître. Au cours de la dernière année, on n'en a jamais entendues autant.

Q: Vous mixez, réalisez et composez depuis un âge précoce. Quelles furent vos premières influences?

MJC: J'ai commencé à réaliser alors que j'avais 15 ans. J'étais alors plongée dans le hip hop et le R&B des années 90, ce fut ma prime influence. Le hip hop, le dub et le trip hop furent les premiers territoires explorés. Je n'étais pas attirée par la house, tout simplement parce que n'écoutais pas la bonne! Je détestais alors la house cheesy qui tournait à la radio, je croyais que ce genre se limitait à cette musique imbuvable. Lorsque j'ai vécu mes premières vraies soirées vers l'âge de 17 ans, j'ai découvert l'underground de la house/techno, j'ai vraiment accroché. C'est à cette époque précise que j'ai commencé à acheter des vinyles afin de devenir DJ. J'ai appris à mixer, j'ai obtenu  mon premier engagement trois ou quatre mois plus tard. Ce fut terrifiant mais définitivement la meilleure  façon d'apprendre!

Q: Pourriez-vous décrire brièvement votre progression en tant que compositrice?

MJC:  Au cours des deux ou trois dernières années, j'ai commencé à me voir moi-même compositrice en plus d'être réalisatrice. Alors qu'auparavant, je me limitais au rôle de DJ et réalisatrice. Avoir travaillé à différents projets impliquant une foule de styles et sons  m'a ouvert les horizons  en tant que réalisatrice. Oui ça m'a aidée à sculpter mon propre son. Bien sûr, ma musique continuera d'évoluer au fur et à mesure que j'avancerai dans la vie.  

Q: Les étiquettes vous importent peu si on lit entre les lignes, n'est-ce pas?

MJC: Les étiquettes ne servent qu'à la mise en marché. Quiconque a une vraie passion pour la musique sait que cette notion n'est pas importante. Bien sûr, des gens se font avoir par les genres et étiquettes. Personnellement, je préfère me concentrer sur la création de ma musique. Les gens peuvent bien l'étiqueter comme ils le veulent, je ne veux tout simplement pas m'étiqueter moi-même. C'est pourquoi je déteste au plus haut point décrire ma propre musique! C'est trop difficile...

Q: Quels artistes aimez-vous le mieux remixer?

MJC: J'adore remixer les voix chantées (et pas nécessairement les pistes de voix faites pour les clubs) et leur donner une direction complètement différente. Tant de destinations sont possibles pour la voix chantée, contrairement aux pistes instrumentales faites pour les clubs. J'ai des goûts très particuliers en ce sens; mes voix préférées sont celles de Yukimi Nagano et Horace Andy.

Q: Avez-vous déjà travaillé avec des instrumentistes?

MJC: Oui, je l'ai fait par le passé. Dans mes propres productions, vous savez, je joue de la guitare, de la basse et des claviers. J'apprends également le saxophone, le violoncelle, la batterie mais je n'ai pas consacré assez d'énergie pour très bien jouer de ces instruments. Alors vous comprendrez que j'aime beaucoup travailler avec des instrumentistes, même les plus obscurs.

Q: Envisagez-vous rester basée à Londres? Qu'y appréciez-vous le plus?

MJC: Oui, je compte bien y demeurer, à court terme du moins. Mes amis proches et ma famille y sont tous résidants, c'est toujours un grand plaisir de les retrouver et passer de bons moments avec eux. Côtoyer mes proches est ce que j'aime le plus à Londres. De plus, on n'y manque jamais de bonne musique et d'occasions de faire la fête. Il y a toujours quelque chose qui se passe quelque part à Londres. Parce que j'y ai grandi, je tenais cela pour acquis... jusqu'à ce que je me rende compte que très peu de villes peuvent compter sur un tel choix de propositions artistiques. Aujourd'hui, j'apprécie vraiment ma ville.

Q: Quels sont vos projets à venir?

MJC: Continuer de créer des musiques destinées aux clubs sur de petits labels. Lancer en 2012 un album sur une étiquette plus importante. Continuer de réaliser des pistes pour des chanteurs ou groupes. J'oubliais la sortie prochaine d'une compilation K7 DJ Kicks.

Q: Vous êtes-vous déjà produite à Montréal?

MJC: Ce sera ma première visite à Montréal. Je suis passée à Toronto l'an dernier.

Q: Avez-vous déjà fait DJ sur une scène extérieure  en hiver?

MJC: Non... J'espère avoir apporté assez de vêtements chauds!

Dans le cadre de l'Igloofest, Maya Jane Coles se produit ce vendredi, 20h30, scène Sapporo, aux Quais du Vieux-Port.