Le trompettiste français Erik Truffaz est à l'honneur pour la 30e édition du Festival de Jazz de Montréal, où il a présenté en première mondiale l'intégral de son plus récent coffret, une invitation à trois voyages «atmosphériques et planants» en Inde, au Mexique et en France.

«Bénarès», «Mexico», «Paris», pendant trois soirs, le trompettiste et ses musiciens ont transporté le public montréalais vers trois destinations différentes, oeuvres d'un triptyque, «Rendez-Vous», paru chez la légendaire maison Blue Note. À sa septième présence au festival, Erik Truffaz se produisait dans la prestigieuse série Invitation, qui, chaque année, accueille en résidence des musiciens accomplis.

Truffaz fait l'éloge de ce festival de jazz devenu au fil des ans le plus gros de la planète: «Tous les concerts gratuits, c'est du délire total. Stevie Wonder en plein air, c'est assez rare. L'ambiance est tranquille, à la québécoise.» dit-il dans un entretien à l'AFP.

Lors du premier concert, mercredi, il a joué les pièces du premier disque Bénarès, une fusion entre la musique classique indienne et son style de trompette velouté et aérien. Il était accompagné du percussionniste Apura Mukherjee et de la chanteuse Indrana Mukherjee.

«Ces morceaux sont des dons à des dieux indiens», ajoute-t-il. «Je ne suis pas hindou, mais je cherche une ambiance qui réunit le public et les musiciens. Le concert est un acte spirituel».

Né en 1960, Erik Truffaz a fait sa marque dans le monde du jazz grâce à son habileté à marier ce style à la musique électronique. L'album Mexico est une «discussion» avec le DJ mexicain Murcof. Penché sur ses pédales à effets, le trompettiste blond agençait ses notes cuivrées aux sons futuristes sortant de l'ordinateur. Sans batterie ni contrebasse, il éprouve un malin plaisir à briser les clichés du jazz.

«Je n'aime pas le jazz où les musiciens épatent à tour de rôle, dit-il. Les solos trop longs m'ennuient autant que les personnes qui parlent trop longuement.»

Le troisième voyage offert vendredi par l'instrumentiste au public montréalais était un retour au bercail, à Paris. Pour l'occasion, il était accompagné du chanteur Sly Johnson, ancien membre de la formation hip-hop française Saïan Supa Crew, une véritable boîte à rythmes humaine, et par le batteur Philippe Garcia. «On s'est permis de discuter avec nos instruments», explique Sly Johnson. «C'est un échange culturel et d'influences.»

L'album Rendez-vous propose de découvrir les univers musicaux de trois continents. Erik Truffaz consacre la moitié de son temps à voyager pour faire entendre sa musique. «Je passe trop de temps sur la route. Ce qui manque, c'est de s'arrêter et d'avoir le temps de voir les villes.»

Pour Rendez-vous, il s'est toutefois posé deux mois en Inde pour composer et enregistrer l'album Bénarès. «J'ai pris le temps de m'imprégner du pays. Découvrir d'autres personnes et d'autres cultures est très important. Je pense que tout le monde gagne à s'apercevoir que toute la planète n'a pas le même niveau de vie», dit-il.

Artiste nomade, Erik Truffaz conserve néanmoins son identité musicale française. «Je suis beaucoup plus influencé par ce que fait Bobby McFerrin ou Miles Davis que par Charles Trenet. Mais mes compositions sont très mélodiques, une particularité du jazz français», souligne-t-il.

Jusqu'au 12 juillet, le Festival de Jazz de Montréal offre plus de 600 concerts.