Douze ans après la mort du cinéaste, écrivain et anthropologue Pierre Falardeau, le corpus consacré à son œuvre s’agrandit de nouveau avec la sortie de l’Album Falardeau, signé par sa conjointe, Manon Leriche, et son fils Jules. La Presse s’est entretenue avec ce dernier.

Pierre Falardeau sur le plateau d’Octobre, du Party, d’Elvis Gratton. Falardeau en ski de fond avec Manon Leriche dans les monts Chic-Chocs. Falardeau avec son équipe de football au Collège de Montréal, dans une manifestation pour le peuple palestinien, visitant l’île de Gorée, carrefour de la traite des esclaves africains, au Sénégal.

Pierre Falardeau ? Homme multiple. Cinéaste, écrivain, anthropologue, militant indépendantiste de la première heure et homme de paroles livrant le fond de sa pensée, quitte à heurter. Toutes ces facettes, très publiques, sont connues. Il y en a d’autres. Falardeau, c’est aussi un conjoint, un père, un photographe, un chasseur, un sportif, un amateur de boxe.

Tout cela est abordé dans l’Album Falardeau, qu’on peut qualifier de « beau livre » et qui alimente son souvenir, s’ajoutant à d’autres œuvres lui étant consacrées telles que le documentaire de German Gutierrez et Carmen Garcia ainsi qu’Un très mauvais ami, recueil de lettres écrites à Léon Spierenburg qu’a traduites et présentées Jean-François Nadeau, du Devoir.

Pourquoi cet album de photos et d’écrits maintenant ? « Pour célébrer son œuvre et sa vie, bien sûr, et pour donner des images et des documents rarement ou jamais vus, sur l’une ou sur l’autre », écrit Manon Leriche au début de l’ouvrage.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Manon Leriche et Jules Falardeau en avril 2012, au lancement du livre Le jardinier de Molson, scénario inédit de Pierre Falardeau.

Mais aussi, et peut-être surtout, pour poursuivre d’une autre manière le combat d’un homme qui s’est démené comme un diable dans l’eau bénite, sa vie durant, pour la cause de l’émancipation, nationale et collective, du Québec.

Manon Leriche, dans un extrait du livre Album Falardeau

Joint jeudi par La Presse, Jules Falardeau indique que sa mère avait, depuis quelques années, ce désir de faire une « espèce de biographie par les images ». Et pas seulement des images de Falardeau. « On voulait des images de ses films, des coulisses et des images prises par Pierre, dit-il. À travers ça, il est certain que nous voulions que la parole de Pierre soit là. Nous sommes donc passés à travers ses écrits pour sortir des citations que l’on retrouve dans certains chapitres. »

Éventail de documents

Jules Falardeau est visiblement heureux du résultat. Il évoque des découvertes faites tout au long du projet. « Un exemple dont je suis bien fier est lorsque Pierre raconte l’anecdote sur le film Le steak. Il a été l’homme de coin de Gaétan Hart dans son dernier combat. Dès le lendemain, il va rejoindre Gaétan, qui a la face toute boursouflée. Pierre lui demande s’il peut prendre quelques photos. Elles n’avaient jamais été publiées. »

Autre moment d’intérêt pour Jules Falardeau, la publication d’une photo de la lettre de la Cinémathèque algérienne accusant réception d’une copie du film Le Magra, que Falardeau avait tourné dans ce pays.

« Nous avions regardé l’Album Miron fait il y a quelques années, et ça nous avait donné une certaine inspiration », poursuit Jules, l’un des trois enfants du couple, avec Hélène et Jérémie. « C’est un album assez bien fait. Mais Miron, c’est davantage sur le plan des écrits. Dans notre cas, nous avons la chance que Pierre ait été cinéaste, photographe, anthropologue. Nous avions donc un large éventail de documents utilisables. »

PHOTO NATHALIE MONGEAU, FOURNIE PAR VLB ÉDITEUR

L’ouvrage fait une place à Falardeau, l’homme de famille. Ici avec Manon Leriche dans les monts Chic-Chocs en 2007.

Les auteurs ont eu aussi envie de donner la parole à des tiers. Sept amis, collaborateurs et connaisseurs du cinéaste signent des textes. Ce sont Éric Bédard, Sylvie Drapeau, Bernard Émond, Alexis Martin, Claude Palardy, Céline Philippe et Robin Philpot.

Réalisée par Jean-François Leblanc, la photo de couverture montre Falardeau sur le plateau de tournage d’Octobre avec le comédien Pierre Rivard incarnant un felquiste cagoulé. Que représente-t-elle ? Jules Falardeau réfléchit quelques instants avant de répondre.

« Octobre est l’un de ses projets forts », dit-il au bout d’un moment. « Un projet que Pierre a porté une bonne partie de sa vie et qui est issu de sa rencontre avec Francis Simard. Il a passé bien des années à recevoir des refus [pour le financement]. Ce furent des années de persévérance. Mais ça lui a donné le temps d’y réfléchir. C’est l’un des grands projets artistiques de sa vie. »

Album Falardeau

Album Falardeau

VLB

304 pages