« Sans musique du tout, je ne survivrais pas », écrit Michel Tremblay dans Offrandes musicales, court recueil de souvenirs dans l’esprit des livres Douze coups de théâtre et Les vues animées. Ici, bien entendu, ce sont ses fréquentations musicales, l’opéra d’abord, puis Barbara, Céline, Bach et bien d’autres, qui sont le prétexte à ouvrir le tiroir de sa mémoire.

Les premiers récits sont campés en pleine pandémie, moment d’isolement où l’écrivain est coupé de ce qui le nourrit : la fréquentation du théâtre, des salles de concert et de cinéma, surtout. Il ne s’éternise toutefois pas là-dessus et replonge vite dans son passé et remonte, sans chronologie particulière, jusqu’aux années 1950.

On redécouvre un Michel Tremblay fin mélomane. Il pose un regard éclairé mais impitoyable sur les opéras qu’il a vus à Montréal et à New York, raconte ses ravissements devant des interprétations à faire pleurer et ses fous rires quand les productions frisent le ridicule. Qui aime bien châtie bien, comme on dit.

S’il parle des musiques qu’il aime en connaisseur, c’est à travers les émotions qu’elles font naître ou libèrent en lui qu’il se montre vulnérable. L’un des passages les plus touchants de ce petit livre révèle comment, à la mort de son « frère préféré », Bernard, c’est le Trio en la mineur pour piano, violon et violoncelle, de Tchaïkovski, qui lui a permis de vivre son immense peine.

L’autre coup au cœur qu’on prend à la lecture de ses Offrandes musicales, c’est vers la fin, où il raconte ses problèmes d’audition et l’immense deuil que cela lui impose. Sur scène comme sur DVD, c’est d’abord par l’image, par les valeurs des productions opératiques elles-mêmes, qu’il cherche désormais son plaisir.

« Tant et aussi longtemps que je pourrai regarder la musique, je le ferai. Avec une joie différente, une joie en quelque sorte détournée, mais une joie quand même. » C’est le bonheur qu’on lui souhaite.

Offrandes musicales

Offrandes musicales

Leméac/Actes Sud

128 pages

6/10