L'Amphithéâtre du Festival de Lanaudière a eu 21 ans hier soir. C'est en effet le 17 juillet 1989, un lundi, qu'était inauguré ce lieu de musique en plein air unique chez nous. L'événement annuel s'appelait alors Festival international de Lanaudière, mais l'Amphithéâtre ne portait pas d'autre nom que celui-là. Le «international» a disparu, mais l'appellation de l'Amphithéâtre s'est enrichie cette année, 21 ans plus tard, du nom de celui à qui on doit ce miracle, le père Fernand Lindsay.

Ce concert de 21e anniversaire prit la forme d'un hommage à Jacques Hétu, qui vient lui aussi de nous quitter, et dont le Festival créa plusieurs oeuvres. Hier soir, Yoav Talmi et l'Orchestre Symphonique de Québec donnaient la première ici de l'ultime opus de Hétu, une cinquième Symphonie créée par le Toronto Symphony le 3 mars, moins d'un mois après sa mort.

L'invasion de Paris par les Allemands, l'occupation et la libération : cet épisode de la guerre de 1939-45 a inspiré les quatre mouvements de cette oeuvre à programme totalisant 45 minutes. Au dernier mouvement, un choeur mixte chante un texte de Paul Éluard sur la liberté - texte assez mal lu par une voix anonyme avant la première note de musique.

Les bois chantent l'insouciance de la Ville lumière au premier mouvement. Le bref deuxième est un violent scherzo décrivant l'irruption des ennemis. Le compositeur recourt ensuite aux timbres sourds de l'orchestre pour traduire l'incertitude qui s'installe dans le pays occupé. Au finale, c'est le cri de «Liberté!» clamé par la population libérée.

Le langage néoclassique et foncièrement tonal de Hétu produit une musique d'autant plus accessible qu'on y retrouve des formules chères à Hindemith, Chostakovitch et, pour la partie chorale, Honegger. L'exécution de l'OSQ m'a paru très soignée, notamment dans les grands unissons des cordes au troisième mouvement.

Néanmoins, l'ensemble n'est pas pleinement convaincant. Hétu a toujours su faire sonner un grand orchestre, mais on souhaiterait ici plus de force, de vérité et d'originalité dans la description. On peut aussi se demander si Yoav Talmi fut vraiment inspiré par le sujet. Sa direction était parfois relâchée dès avant l'entracte.

Quant au choeur, où les amateurs se mêlaient aux professionnels, il fut généralement plutôt anémique, comme d'ailleurs dans le reste du concert. Dommage aussi que l'auditoire - 3 000 personnes, malgré les orages - ait brisé l'atmosphère en applaudissant entre les mouvements.

Déception plus grande encore : Yannick-Muriel Noah, soprano canadienne d'origine malgache. J'en avais gardé une bonne impression lorsqu'elle remporta le deuxième prix à notre Concours de chant de 2009. Son timbre est encore beau mais elle détonne maintenant presque aussi naturellement qu'elle respire.

ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE QUÉBEC, CHOEUR DE L'OSQ et CHOEUR FERNAND-LINDSAY. Chef d'orchestre : Yoav Talmi. Soliste : Yannick-Muriel Noah, soprano. Hier soir, Amphithéâtre Fernand-Lindsay, de Joliette. Dans le cadre du 33e Festival de Lanaudière.

Programme :

Ouverture de La Forza del destino (1862) - Verdi

Air d'Aida : «Ritorna vincitor!» de Aida (1871) - Verdi

Choeur «Va, pensiero» de Nabucco (1842) - Verdi

Air de Norma : «Casta diva» de Norma (1831) - Bellini

Choeur «Vedi! Le fosche» de Il Trovatore (1853) - Verdi

Finlandia, op. 26 (1899) - Sibelius, version avec choeur

Symphonie no 5, avec choeur final, op. 81 (2010) - Hétu