En janvier, le collectionneur et galeriste montréalais Yves Laroche a mis la main sur une oeuvre originale du graffiteur et artiste britannique Banksy, lors d'un encan organisé à Londres. La toile Precision Bombing sera exposée dès jeudi à sa galerie, dans le cadre de la foire Art contemporain pour tous (ACPT).

Le 28 janvier, une trentaine de gravures, deux sculptures et une oeuvre originale de Banksy ont été mises aux enchères lors d'un encan organisé par la maison Bonhams, à Londres. Le tout appartenait au premier galeriste et agent de Banksy, Steve Lazarides, promoteur infatigable de l'art de rue. La plupart des oeuvres ont été vendues à un prix supérieur à leur estimation initiale, pour un total de 700 000 $.

Le seul tableau de la soirée, Precision Bombing, a atteint le plus haut montant, soit 40 000 livres sterling (environ 73 000 $CAN), et a été acheté par le galeriste Yves Laroche, amateur passionné de street art.

«J'ai commencé à m'intéresser à Banksy très tôt, autour de l'an 2000, a confié Yves Laroche à La Presse, parce que je regarde toujours ce que les Anglais font. Ils sont toujours avant-gardistes. Je voyais Banksy se pointer... J'ai commencé à regarder les graffitis à la fin des années 80. À Montréal, à New York, à Philadelphie. En 2003, j'ai fait le virage dans ma galerie et j'ai acheté des oeuvres, notamment une gravure de Banksy et plusieurs de Shepard Fairey.»

Créée en 2000, Precision Bombing est la deuxième oeuvre d'art de Banksy qu'Yves Laroche achète. «Quand j'ai été averti sur internet que Bonhams vendait un tableau de Banksy à Londres et que cela venait de la collection de Lazarides, je n'ai pas hésité, dit-il. Je n'avais plus la gravure de Banksy, car je l'avais vendue. Et je voulais montrer au public que je crois au street art

La lutte a été âpre pour acquérir l'oeuvre réalisée au pochoir sur une toile brute. Yves Laroche était au téléphone depuis Miami et n'a pas lâché le morceau!

«On était nombreux à la vouloir, mais j'ai une tête dure, dit-il. Mon nom n'est pas Laroche pour rien! J'avais le calculateur devant moi et mon entêtement a valu la peine. Je me disais que je vendrais un Riopelle s'il le fallait! Avec les frais, les taxes et les droits de suite, Precision Bombing m'a coûté autour de 110 000 $. Mais on m'a déjà offert le double depuis janvier!»

Oeuvre à message

Le collectionneur aime Precision Bombing (initialement créée au pochoir sur un mur de Londres) à cause de son contenu: un groupe d'hommes d'affaires vêtus de noir prêts à s'engouffrer dans une auto et qui semblent sous le viseur d'un tueur anonyme.

«J'ai trouvé qu'il y avait un jeu de mots intéressant avec Bombing, la bombe et la cannette de peinture et, pour Precision, je crois que les plus précis sont ceux dont les oeuvres vont se retrouver sur les cimaises, dit-il. Banksy est un intellectuel, un activiste. Il y a toujours un message dans son travail.»

Rare galeriste à s'intéresser à l'art de rue au Canada, Yves Laroche déplore qu'il y ait moins de collectionneurs d'oeuvres de street art à Montréal qu'à Londres, Paris ou New York. Alors qu'il est dans la jeune soixantaine, il veut désormais convaincre les grands collectionneurs canadiens d'acheter des oeuvres de street art.

Yves Laroche dit travailler avec des marchands européens et être en mesure d'acheter d'autres Banksy si la demande se fait sentir.

«Si je vends prochainement le Banksy, ce sera pour m'en acheter un plus grand, dit-il. En ce moment, j'en suis rendu à vendre mon immobilier pour acheter des oeuvres d'art...»

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À la galerie Yves Laroche (6355, boulevard Saint-Laurent) dès le 23 avril, à 17 h.