Présentant plus de 120 oeuvres et objets créés à l'aide d'imprimantes 3D et de méthodes de fabrication assistée par ordinateur, l'expo Out of Hand: Materializing the Postdigital du Museum of Arts and Design de New York est assurément bien de son temps. Bienvenue au XXIe siècle.

Si la plupart des musées ont aujourd'hui leur boutique de souvenirs, le Museum of Arts and Design (MAD) est sans doute le seul où l'on peut acheter une version miniature de soi-même, en trois dimensions, façon soldat de plomb.

Pour obtenir ce selfie ultime, il suffit de grimper sur une sorte de plateau tournant pendant qu'un préposé fait monter et descendre un petit scanneur autour de nous à l'aide d'une poulie. Tranquillement, une version 3D de nous apparaît sur un écran d'ordinateur. Une version qu'il ne reste qu'à matérialiser au moyen d'une imprimante 3D.

À dire vrai, le processus est étrangement laborieux. Le plateau, la poulie: tout cela paraît un brin archaïque. Le résultat est tout de même saisissant. Plus besoin d'avoir le sang bleu ou d'avoir remporté une bataille décisive pour avoir sa propre statue. Trente dollars et quelques minutes suffisent.

Surtout, en observant le processus, on parvient tranquillement à apprivoiser la technologie et la quincaillerie à l'origine de la plupart des 120 pièces présentées dans le cadre de l'exposition Out of Hand: Materializing the Postdigital.



Occupant trois étages du musée, l'expo présente des oeuvres d'environ 80 architectes, designers et artistes provenant d'une vingtaine de pays.

Des délirantes pièces de coutellerie inspirées par la végétation de Greg Lynn jusqu'à la robe imprimée en 3D du designer Michael Schmidt et de l'architecte Francis Bitonti en passant par des créations d'artistes comme Anish Kapoor, la plupart des oeuvres présentées démontrent que la création de formes fantasmagoriques n'est plus un rêve, mais bel et bien une réalité.

«Je ne dis pas qu'il serait impossible de produire ces pièces à la main, précise le commissaire de l'exposition, Ronald T. Labaco, mais vu les détails et les particularités de certaines oeuvres, ce serait presque impossible.»

À titre d'exemple, le commissaire montre l'immense colonne de Michael Hansmeyer, qui est composée de 2700 «feuilles» de 1 mm qui ont été découpées à l'aide d'un laser. «La réalisation de cette colonne a pris 70 heures, je n'ose même pas penser combien de temps cela aurait pu prendre sans l'aide des nouvelles technologies», soutient Labaco.

Et pour cause: quand on s'en approche, on découvre à quel point les détails de la Subdivided Column sont nombreux. En tout, la colonne modelée par ordinateur est composée de près de 6 millions de minuscules facettes!



Photo: fournie par le Museum of Arts and Design

K.162 de Franck Stella

Assez bizarrement, l'objet dont on a le plus entendu parler - le controversé pistolet imprimable en 3D - n'est pas présenté. Fuyant la controverse, l'exposition se concentre plutôt sur les innovations. On y croise aussi bien des chaises spectaculaires que des pulls présentant des volumes en forme de têtes animales. Le tout se veut d'abord et avant tout une sorte d'ode à la création et à l'expérimentation.

S'il y a quelques oeuvres particulièrement intéressantes - notamment la statue en forme d'autoportrait déformé de Richard DuPont -, il reste qu'aucune ne semble pour l'instant avoir le pouvoir transformatif des grandes oeuvres d'art.

Est-ce à dire que la création numérique et l'impression 3D sont toujours à la recherche de leur Giacometti ou de leur Van Gogh? Peut-être, mais à la vitesse où les nouvelles technologies progressent, il y a fort à parier que le ou la Louise Bourgeois de l'ère numérique devrait se faire connaître sous peu.

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Au Museum of Arts and Design de New York jusqu'au 6 juillet 2014.

Photo: fournie par le Museum of Arts and Design

Barry XBall d'Envy