Fersen le fabulateur est de retour. Son petit dernier, coiffé d'un titre ludique, Trois petits tours, a même été enregistré au Québec et réalisé par nul autre que Fred Fortin. «C'est vraiment un truc de cour d'école», commente le chansonnier français.

On a souvent parlé du penchant de Thomas Fersen pour les fables animalières. Il a souvent usé du subterfuge de la personnification pour exprimer la condition humaine, c'est vrai. On croise encore des mouches, sur Trois petits tours, mais le chansonnier y délaisse néanmoins les petites bêtes pour faire parler les objets.

Comme quoi? Comme une valise baptisée Germaine et qui, laissée seule un instant dans un aéroport, éveille la suspicion des services de sécurité. Comme ce concombre volant d'où le passager descend avec les oreilles qui bourdonnent et le pas hésitant. Comme ce gratte-dos offert par ses parents et qui, écrit-il dans le livret, a forgé son caractère.

«Mes parents, comme tous les parents, étaient soucieux de mon avenir, assure-t-il, à l'autre bout du fil. Mais c'est curieux, ils m'offraient plutôt des objets qui incitaient à la paresse.» Fersen, il est vrai, cultive une image de paresseux. On pense bien sûr à sa chanson Deux pieds, mais aussi, de manière plus générale, à sa voix éraillée qu'il laisse volontiers traînasser sur les mesures.

Ce n'est toutefois pas par pure paresse que le chansonnier français a délégué l'orchestration et la réalisation de son dernier disque au Québécois Fred Fortin. «C'est quelqu'un dont je me sens très proche artistiquement et humainement. J'ai ressenti ça dès ses premiers albums et c'est quelque chose qui ne m'arrive pas souvent», dit Fersen.

Fred Fortin a recruté tout un bataillon de collaborateurs (Dan Thouin, François Lafontaine, Maxime Saint-Pierre, Olivier Langevin) et sorti l'artillerie la plus variée pour mettre en son l'univers fantastique de Fersen. La longue liste des instruments utilisés inclut en effet une espèce de batterie jouet et un «sac de bottes de ski»!

Ludique

Il en résulte un disque étonnamment varié. Du country folk au rock planant à la Pink Floyd, en passant par de la musique de fanfare déglinguée à la Tom Waits. Mais c'est surtout une mise en musique imaginative et ludique au point de friser le délire. «Quand on est entre garçons, ça part dans tous les sens», convient Fersen.

«Ce qui est différent cette fois-ci, c'est que j'ai été spectateur de ce que Fred faisait et j'ai entendu du Fred Fortin sur mes chansons. Pour moi, c'est un cadeau extraordinaire. Quand il m'a joué les arrangements chez lui, dans son sous-sol, je crois qu'il a été surpris car, chaque fois, je lui disais que c'était parfait. Je n'ai jamais remis en cause une seule de ses interventions, c'est vous dire à quel point j'aime ce qu'il fait!»