La Cour d'appel a finalement décidé de refuser un voyage en République dominicaine à une femme reconnue coupable de production de cannabis, renversant ainsi un jugement de première instance.

On se rappelle que Nancy Provencher, 32 ans de Victoriaville, avait obtenu l'autorisation de quitter le pays pendant

deux semaines à compter du 15 janvier pour accompagner ses parents dans le sud en dépit de la peine d'emprisonnement de 12 mois à être purgée dans la collectivité pour possession de stupéfiants dans le but de trafic et production de cannabis (1407 plants avaient été saisis dans son domicile). Parmi les conditions à respecter, elle devait être assignée à son domicile 24 heures sur 24 durant les quatre premiers mois du sursis.

Lors du prononcé de la sentence en octobre dernier, elle avait demandé au juge Guy Lambert la possibilité de faire lever son assignation à domicile pendant une semaine afin de pouvoir se rendre en République dominicaine, ce qui lui avait été refusé.

En novembre, Mme Provencher était cependantrevenue à la charge auprès du même juge. Elle réclamait alors le droit de partir pendant deux semaines pour accompagner sa mère gravement malade. Une somme de 2000 $ avait même été versée en acompte pour réserver les billets d'avion, la croisière et l'hôtel en formule tout inclus.

Le juge Lambert lui avait reproché de le mettre devant le fait accompli mais il avait malgré tout autorisé la modification des conditions pour des motifs humanitaires, compte tenu de l'état de santé de sa mère. Il avait également pris bonne note du diplôme d'infirmière auxiliaire détenu par Mme Provencher. Il lui avait donc permis de quitter le pays du 15 au 31 janvier 2012.

Or, Me Louis-Charles Bal, procureur aux poursuites criminelles et pénales, avait porté le jugement en appel sous prétexte que cela minerait la confiance du public dans le système judiciaire et qu'une telle permission ne répondait pas aux critères de dénonciation et de dissuasion. Une punition devait être appliquée selon lui, déjà que la peine dans la collectivité était clémente.

Dans sa décision, la Cour d'appel conclut que toutes les circonstances invoquées par Mme Provencher devant le juge de première instance en novembre dernier auraient pu l'être en octobre puisqu'elles existaient déjà à cette date. En l'absence de fait nouveau, le juge aurait dû rejeter la demande.

Par ailleurs, la Cour d'appel rappelle qu'une sentence d'emprisonnement dans la collectivité a un objectif punitif.

«La gravité objective et subjective des infractions, l'importante quantité de drogue saisie chez Mme Provencher, la durée de la contravention (elle reconnaît avoir fait trois récoltes avant d'être arrêtée) et le vol d'électricité requièrent une peine qui comporte un effet dissuasif et dénonciateur. C'est justement ce caractère punitif qui distingue l'emprisonnement avec sursis de la probation», peut-on lire dans la décision.

À ce sujet, le plus haut tribunal de la province constate que les conditions imposées à Mme Provencher étaient déjà peu contraignantes.

«L'assignation à domicile ne s'applique qu'au tiers de la peine de 12 mois et elle souffre d'exceptions entre 7 h et 20 h tous les mardis ainsi que six jours entiers pendant les Fêtes. Pour les six mois suivants, le couvre-feu ne s'étend que de 23 h à 7 h le lendemain matin. Pendant cette période, la situation de madame se rapproche de celle d'une personne menant une vie normale et sans contrainte puisque les heures de couvre-feu sont celles pendant lesquelles la plupart des gens sont à la maison. Enfin, aucune condition ne s'applique pendant les deux derniers mois de la peine», écrivent les juges de la Cour d'appel.

Quant au fait que le juge de première instance ait prolongé de 17 jours la période d'assignation à résidence de Mme Provencher, cela est considéré insuffisant pour rétablir l'équilibre entre les objectifs punitifs et correctifs de la peine.

Enfin, la Cour d'appel estime que le juge n'aurait pas dû tenir compte du fait que la mère de Mme Provencher avait déjà payé le voyage. «La situation de la mère l'a incité à la clémence mais cette considération n'aurait pas dû l'emporter sur les principes de détermination de la peine», peuton lire dans la décision.