Un ancien haut magistrat, protagoniste de l'affaire d'arbitrage controversé qui a récemment conduit à l'audition par la justice de la patronne du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde, a été mis en examen mercredi pour escroquerie en bande organisée.

Pierre Estoup, ancien président de la cour d'appel de Versailles, en région parisienne, 86 ans, a été mis en examen à l'issue d'une garde à vue médicalisée à l'hôpital parisien de l'Hôtel Dieu.

En garde à vue depuis lundi, il avait été l'un des trois juges d'un tribunal arbitral sollicité en 2007 par le gouvernement français pour régler un vieux contentieux entre l'homme d'affaires Bernard Tapie et une banque, le Crédit Lyonnais, à propos d'une revente de l'équipementier sportif Adidas.

L'arbitrage, controversé, s'était soldé par un règlement au bénéfice de l'homme d'affaires, qui avait empoché 403 millions d'euros d'argent public en 2008.

Les enquêteurs soupçonnent M. Estoup d'avoir eu des liens anciens avec Bernard Tapie et avec son avocat, Me Maurice Lantourne, ayant pu fausser l'arbitrage.

En mettant en examen l'ex-haut magistrat pour escroquerie en bande organisée, les enquêteurs le soupçonnent d'avoir favorisé, avec d'autres personnes, un arbitrage favorable à M. Tapie, selon une source proche du dossier.

Depuis une semaine, les événements se précipitent dans cette affaire complexe, mais qualifiée de «l'un des plus gros scandales de la République» par l'ancien patron du Crédit Lyonnais Jean Peyrelevade.

La directrice générale du FMI, Christine Lagarde, qui était ministre de l'Économie à l'époque des faits, a été entendue pendant deux jours par la Cour de justice de la République (CJR) pour sa décision de recourir à cet arbitrage privé, et non à des tribunaux ordinaires.

Elle est visée par une enquête pour «complicité de faux et de détournement de fonds publics». La semaine dernière, elle est passée de témoin à «témoin assisté», un statut intermédiaire avant celui de mise en examen (inculpation).

En marge de cette affaire «Tapie/Lagarde» instruite par la Cour de justice de la République (CJR, juridiction compétente pour les ministres ou ex-ministres), l'État va se constituer partie civile devant un tribunal ordinaire pour «veiller à ce que les intérêts patrimoniaux de l'État ne soient pas lésés (...) et avoir accès au dossier», a-t-on expliqué au ministère de l'Économie.

Mardi soir, le président français François Hollande avait prévenu «que l'État défendrait toujours ses intérêts en temps utiles».