La grogne monte à l'encontre de la Grèce au sein de la zone euro, qui menace de lui couper les vivres si les réformes économiques promises par Athènes ne sont pas appliquées, alors qu'ailleurs la crise de la dette semble s'apaiser.

Après avoir réclamé plus d'efforts de la part de la Grèce lundi soir pour espérer des prêts supplémentaires afin d'éviter la faillite, les ministres européens des Finances ont demandé mardi des engagements par écrit des principaux partis politiques du pays.

«Le Fonds monétaire international (FMI) va travailler à un nouveau programme (d'aide) avec les Grecs. Mais nous ne serons en mesure de donner notre feu vert que si les partis au pouvoir et les autres sont d'accord» pour mettre en oeuvre les réformes et «cela doit être fait par écrit», a fait savoir la ministre autrichienne, Maria Fekter, en marge d'une réunion avec ses homologues de l'UE.

Les principaux créanciers de la Grèce - Union européenne et Fonds monétaire international - avaient déjà eu recours à ce procédé à l'automne après l'annonce d'un référendum finalement abandonné.

Ils avaient alors exigé une lettre des trois chefs des principaux partis politiques grecs pour s'assurer qu'Athènes allait bien mettre en oeuvre les réformes demandées avant de lui allouer une aide de plusieurs milliards d'euros.

Les chefs de partis s'étaient au final exécutés, mais depuis «le programme (budgétaire) grec a dérapé» par rapport aux prévisions, a déploré lundi soir le chef de file des ministres des Finances de l'Union monétaire, Jean-Claude Juncker.

«Il est clair que la mise en oeuvre des réformes en Grèce a échoué», a renchéri mardi le ministre suédois des Finances, Anders Borg, dont le pays ne fait pas partie de la zone euro. «En matière de réformes structurelles, de réformes budgétaires, ils (les Grecs) n'ont pas été à la hauteur», a-t-il asséné.

Selon une source diplomatique européenne, l'engagement du nouveau Premier ministre Lucas Papademos «n'est pas remis en cause», mais le reste de la classe politique grecque ralentirait ses efforts. Une situation qui pourrait durer jusqu'aux prochaines élections, prévues en avril.

L'idée, en faisant monter la pression, est donc aussi d'épauler M. Papademos, un «technocrate» chargé provisoirement de diriger le pays, face aux partis qui soutiennent son fragile gouvernement de transition.

«Nous ne pouvons attendre la tenue des élections, les changements doivent avoir lieu maintenant», a estimé cette même source.

Le temps est en effet compté. La Grèce devra rembourser 14,4 milliards d'euros de prêts le 20 mars, ce qu'elle ne peut faire sans l'aide promise. Si cette échéance n'est pas tenue, le défaut de paiement sera inévitable.

Outre les réformes, Athènes doit aussi au préalable conclure un accord avec ses créanciers privés sur la réduction de sa dette. Les négociations visent à réduire de 100 milliards d'euros la dette détenue par les banques et fonds d'investissement de manière à ramener l'endettement public du pays à 120% du Produit intérieur brut à l'horizon 2020, contre 160% actuellement.

L'opération doit être réalisée via un échange d'anciennes obligations détenues par le secteur privé contre de nouveaux titres, avec au centre des tractations la rémunération accordée à ces derniers.

Les discussions butent sur les taux d'intérêt qui seront appliqués. La zone euro a renvoyé Athènes et ses banques à la table des négociations en exigeant que le taux soit inférieur à 4%, alors que ce seuil est jusqu'ici considéré comme un minimum par les créanciers privés.

Il devra se situer entre 3,5% et 4%, a demandé M. Juncker, au risque que les banques considèrent la restructuration de la dette grecque comme «contrainte» et non plus «volontaire», avec à la clé un défaut de paiement de la Grèce aux conséquences incalculables.

Cherchant à minimiser les difficultés, le ministre grec des Finances, Evangélos Vénizélos, s'est contenté mardi de dire que son pays avait «le feu vert de l'Eurogroupe pour mettre le point final à un accord avec le secteur privé dans les prochains jours».

Si la situation reste tendue en Grèce, les signaux rassurants abondent ailleurs: Madrid a levé mardi 2,5 milliards d'euros en bons à 3 et 6 mois, avec des taux d'intérêt en forte baisse.

Cette détente sur les marchés obligataires est notamment due à l'injection de liquidités en décembre par la BCE dans les banques de la zone euro, qui utilisent cet argent frais pour recommencer à acheter de la dette publique, estiment de nombreux analystes.