Une fenêtre électorale s'approche à grands pas, et la colline parlementaire est le théâtre de nombreuses rumeurs concernant un déclenchement d'élections en août. Si les libéraux répètent jusqu'à plus soif qu'un scrutin aura nécessairement lieu au cours des «18 prochains mois», les partis de l'opposition fourbissent tout de même leurs armes et préparent l'affrontement. Mais quels sont les enjeux qui animeront la campagne électorale? La Presse a sondé des responsables politiques de tous les horizons pour le savoir.

Droits de scolarité

C'était l'enjeu de l'heure avant l'été, mais le conflit étudiant est entré en hibernation depuis. Est-il assez profondément endormi pour rester discret pendant une éventuelle campagne? Dans tous les cas, les partis de l'opposition clament en choeur qu'ils ne laisseront pas les libéraux en faire le seul sujet des élections. «Ce sera un des enjeux, mais ce ne sera pas le principal», assure par exemple Sylvain Gaudreault, député péquiste, qui croit que le gouvernement pourrait vouloir s'en tenir à un débat entre carrés rouges et verts. Même son de cloche du côté de Françoise David.

«Il y a beaucoup de dossiers qui préoccupent les Québécois, et c'en est un», fait pour sa part valoir Michel Rochette, directeur des communications du Parti libéral du Québec (PLQ). «Ce qui va guider l'impression que les gens ont dans ce dossier-là, c'est la question du sens des responsabilités. Gouverner, ce n'est jamais facile», ajoute-t-il, en citant presque mot pour mot la publicité télévisée de son chef.

Corruption et gouvernance

Tous les partis de l'opposition s'entendent sur ce point: Jean Charest et son équipe devraient être punis pour les nombreux scandales qui ont éclaté au cours des neuf dernières années dans le domaine de la construction et du financement politique.

François Legault, à la tête d'un parti qui n'a même pas un an, veut faire du «ménage dans la corruption» un «message fort» de sa campagne. La fin de semaine dernière, il s'en est d'ailleurs pris avec une rare virulence aux libéraux sur Twitter. «Il y a quelques libéraux propres. Ils sont rendus à la Coalition», a-t-il écrit. «Le chef du PLQ a toléré la corruption dans son parti. C'est impardonnable.» La porte-parole de Québec solidaire, Françoise David, prédit de son côté qu'«on va parler d'éthique et de corruption». Mme David compte notamment utiliser massivement les médias sociaux pour faire entendre la voix de sa formation politique.

Emplois et économie

Michel Rochette le reconnaît d'emblée: l'économie a toujours été un bon cheval de bataille pour le Parti libéral du Québec. «Ç'a a toujours été notre marque de commerce», analyse le grand patron des communications au PLQ. Le bilan économique de Jean Charest et la bonne santé de l'économie québécoise pendant la crise des dernières années pourraient bien gagner l'appui de nombreux électeurs le temps venu, selon lui.

Mais à la Coalition avenir Québec (CAQ), on dit être capables d'affronter les libéraux sur leur terrain préféré, et de les battre à leur propre jeu. «Moi je n'ai pas l'intention de laisser Jean Charest s'approprier le thème de l'économie, promet M. Legault. C'est l'une de nos forces.» Le chef caquiste croit notamment qu'il pourra convaincre les Québécois de réduire la taille de l'État en abolissant les commissions scolaires et les agences de santé.

Ressources naturelles

Le lancement du Plan Nord et la flambée du prix des minéraux ont remis la question des ressources naturelles au coeur du débat public dans les dernières années.

Françoise David croit que les controverses entourant l'exploitation des mines et des autres ressources naturelles peuvent être payantes pour sa formation politique bien ancrée à gauche. «On fera le bilan des années Charest, promet-elle. M. Charest est avec son Plan Nord, il est prêt à payer des voies ferrées, des routes et des ports aux entreprises minières qui vont partir avec les profits. Nous croyons que le sous-sol québécois doit appartenir aux Québécois.»

Cet enjeu politique, le Parti québécois compte lui aussi en faire une arme pour attaquer le gouvernement Charest, soutient le député péquiste Sylvain Gaudreault. Sa formation politique veut d'ailleurs en faire le principal enjeu du scrutin, avec la corruption. «Si [Jean Charest] veut qu'on parle du Plan Nord, on va en parler», lance-t-il, frondeur, en entrevue téléphonique.