La réforme du Sénat proposée par le gouvernement Harper menace la représentation des francophones au Parlement, craint la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA).

La Fédération s'inquiète que le système d'élections des sénateurs inclus dans le projet de loi ne bloque la porte de la Chambre haute aux francophones.

Car bien que les communautés francophones hors Québec soient dynamiques, elles sont géographiquement éparpillées et ne pourront être en nombre suffisant pour élire un sénateur de langue française qui pourra comprendre et défendre les délicates questions linguistiques, souligne la présidente de la FCFA, Marie-France Kenny.

Elle craint donc qu'au final, il n'y ait aucun sénateur francophone dans certaines provinces. Selon Mme Kenny, le Sénat s'est donné comme mandat de représenter les groupes minoritaires et a accompli beaucoup à ce chapitre.

C'est pourquoi la Fédération veut qu'au moins un siège par province soit réservé à un francophone et qu'il y en ait aussi un pour l'ensemble des territoires.

«Ils ont un rôle d'influence», affirme Mme Kenny à propos des sénateurs.

«Et certains sénateurs sont bien conscients qu'ils ne seraient pas là aujourd'hui s'il y avait eu des élections plutôt que des nominations», dit-elle, soulignant que beaucoup d'entre eux ont été réceptifs à ses arguments.

Un mécanisme devrait ainsi être instauré pour que les communautés francophones et acadiennes puissent recommander des sénateurs.

«On n'est pas contre toute forme de réforme, mais on veut s'assurer de la présence de sénateurs francophones», précise Mme Kenny.

C'est donc une occasion d'améliorer le Sénat, indique-t-elle, puisque rien actuellement ne garantit la présence de sénateurs francophones.

Les nominations «sont laissées au gré des premiers ministres».

Dans sa dernière mouture de législation proposée pour réformer le Sénat, le projet C-7, le gouvernement Harper veut limiter à neuf ans le mandat des représentants de la Chambre haute - plutôt qu'une retraite à 75 ans - et suggère un processus d'élection des candidats, pour les provinces qui souhaitent le faire.

Ottawa a demandé à la Cour suprême du Canada de rendre un avis sur la constitutionnalité de son projet de loi.

La FCFA a demandé un statut d'intervenant devant la Cour pour y faire valoir ses craintes, mais aussi ses suggestions.

Dans le passé, la Fédération avait expliqué ses arguments lors des précédentes tentatives du gouvernement pour modifier le Sénat.

Elle fait aussi valoir des arguments historiques. En 1864, les Pères de la Confédération avaient accepté, comme mécanisme de protection de la langue et de la culture françaises, une représentation égalitaire du Canada-Est au Sénat, avance la FCFA. Bref, il y avait là une reconnaissance qu'une composante de la société canadienne devait, au Sénat, bénéficier d'une représentation dont la taille ne serait pas assujettie à son poids démographique, plaide la Fédération.

La FCFA s'oppose à l'abolition pure et simple du Sénat comme le prône le Nouveau Parti démocratique (NPD).

«Le NPD n'a pas été réceptif à notre suggestion. Leur réponse est: "on va vous représenter"», affirme Mme Kelly.

Mais la vaste majorité des députés néo-démocrates sont au Québec. Mme Kenny souligne que les Québécois ne comprennent pas suffisamment la réalité des francophones dans le reste du pays pour défendre correctement leurs droits.