Le gouvernement Harper n'a pas respecté la Loi sur les langues officielles en nommant l'anglophone unilingue Michael Ferguson au poste névralgique de vérificateur général, révèle un rapport du commissaire aux langues officielles obtenu en exclusivité par La Presse.

«Le Bureau du Conseil privé du Canada [qui a recommandé le candidat] n'a pas respecté ses obligations en vertu de la Loi», écrit le commissaire dans un rapport préliminaire d'enquête sévère, daté du 30 avril.

La nomination par le gouvernement conservateur de Michael Ferguson, qui ne parle qu'anglais, a causé un véritable tollé. L'annonce d'octobre 2011 a suscité beaucoup d'attention de la part des médias et causé tant de grogne au sein des partis de l'opposition qu'ils ont à l'époque tous refusé d'approuver sa candidature. Le Parti libéral a même envisagé un recours devant les tribunaux pour bloquer la nomination. Le mécontentement était tel que le commissaire aux langues officielles a reçu 43 plaintes - fondées, selon lui - de francophones comme d'anglophones dans la foulée de l'entrée en poste du vérificateur.

«Le gouvernement s'est complètement fiché [du fait qu'il ne parle pas français]», rage le député néo-démocrate d'Acadie-Bathurst et porte-parole du NPD en matière de langues officielles, Yvon Godin, qui a lui-même déposé une plainte. «Le vérificateur général est une figure publique. Il s'adresse aux médias et aux citoyens. Malheureusement, les francophones doivent se baser sur des traductions pour savoir ce qu'il dit. Il n'y a pas de contact direct.»

Même si M. Ferguson a promis, il y a un an, de suivre des cours de français et qu'il a assuré dernièrement que les leçons allaient bon train, le commissaire aux langues officielles a jugé qu'il aurait dû maîtriser la langue de Molière en plus de celle de Shakespeare pour succéder à Sheila Fraser. «Les compétences linguistiques [...] font partie des compétences essentielles qui permettent aux candidats nommés de remplir leur mandat», dit le rapport.

Le commissaire recommande que le Bureau du Conseil privé tienne dorénavant compte «des exigences linguistiques qui découlent de la Loi dans la détermination des compétences linguistiques des postes et s'assure qu'une fois établi le caractère officiel des compétences linguistiques pour un processus donné, ce critère soit respecté par les comités de sélection de façon à ce que les candidats y satisfassent».