Jean-François Lisée se défend de vouloir « fermer des robinets » dans l'épineux dossier du financement des cégeps anglophones. Alors que des militants péquistes voudraient ramener leur financement à la proportion de la communauté historique anglophone du Québec, le chef du Parti québécois affirme désormais qu'il veut augmenter l'offre des cours en anglais dans les cégeps francophones pour qu'un bon nombre d'étudiants rentre naturellement au bercail.

« On veut respecter le libre choix, mais dire aux étudiants ''votre libre choix de bien connaître l'anglais, on le respecte, mais pour la première fois, on vous dit ça va marcher dans un cégep francophone'' », a dit M. Lisée à son arrivée vendredi matin au palais des congrès de Montréal, quelques heures avant le début du congrès national du parti, où convergeront dès l'après-midi des milliers de militants.

« On va enfin offrir dans les cégeps francophones un vrai parcours pour apprendre l'anglais correctement. C'est ça la méthode, ce n'est pas d'essayer de fermer des robinets ou quoi que ce soit », a ajouté le chef péquiste, préconisant une mesure beaucoup moins coercitive que celle proposée par certains militants. 

Selon cette formule, si elle est adoptée par les militants du PQ lors du congrès, les cégeps anglophones ne verraient pas leur financement réduit à ce que représente la communauté anglophones du Québec. Au contraire, le chef péquiste espère tout simplement que ces établissements d'enseignement perdront des étudiants francophones et allophones qui choisiraient maintenant le cégep francophone offrant des cours d'anglais bonifiés.  

Quelques minutes plus tôt, le député péquiste Maka Kotto a pour sa part dit que si la proposition des militants de diminuer le financement des cégeps anglophones était adoptée, il faudrait que ça se fasse de façon graduelle. 

« Ça ne va pas arriver brutalement. Si la majorité des militants misent là-dessus, il va falloir que ça n'arrive pas du jour au lendemain », a-t-il précisé. 

Le député François Gendron, doyen de l'Assemblée nationale, a quant à lui affirmé qu'il était plutôt d'accord avec la position défendue par l'ancien premier ministre Jacques Parizeau, qui s'opposait à ce qu'on dicte à des adultes dans quelle langue étudier une fois aux études supérieures. 

« Ce sont des adultes. (...) Je ne pense pas qu'on peut constamment tracer la voie aux adultes. Il leur appartient de faire des choix qui s'imposent », a-t-il affirmé. 

Le porte-parole du parti en matière d'éducation, Alexandre Cloutier, est pour sa part arrivé tôt en matinée à la réunion du caucus de l'aile parlementaire, évitant de dire qu'il était « favorable » à réduire le financement des cégeps anglophones, mais qu'il allait « se rallier » à la décision que prendront les militants.  

Toute la journée, jeudi, il avait évité de répondre aux questions de La Presse, qui avait eu vent de son mécontentement face aux orientations envisagées par la direction du parti.

La proposition de l'Estrie

L'exécutif du parti s'est appuyé sur la proposition de l'Estrie, préparée par Guillaume Rousseau, membre de l'exécutif national, professeur de l'Université de Sherbrooke et candidat potentiel aux prochaines élections générales.

On y prévoit que les dispositions de la loi 101 s'appliqueraient à l'éducation aux adultes et aux écoles de formation professionnelle. On propose aussi d'instaurer une épreuve uniforme de français dans les cégeps anglophones.

La proposition prévoit aussi « l'obligation de fréquenter un établissement d'enseignement francophones lors des deux premiers diplômes préuniversitaires réalisés au Québec ». Un francophones qui a fait son primaire et son secondaire en français pourrait aller au cégep en anglais, mais l'allophone qui n'a pas fait tout son parcours en français ne pourrait par conséquent s'inscrire au collégial en anglais.

La résolution de l'Estrie avalisée par l'exécutif prévoit aussi que « le français est la langue de l'administration et des communications dans les cégeps ».