Les Québécois devraient «bombarder» leurs députés d'appels dans les prochains jours pour dénoncer les hausses salariales «faramineuses» des dirigeants de Bombardier, ont clamé tour à tour le Parti québécois et Québec solidaire, jeudi, après que quatre motions eurent été rejetées à l'Assemblée nationale.

C'est au tour des citoyens de prendre le relai et de faire pression sur le gouvernement, a dit le leader parlementaire de l'opposition officielle, Pascal Bérubé.

«Ce n'est pas terminé, l'indignation se poursuit, il n'y a pas de signe de ralentissement et les gens sont déçus de la réponse apportée par le gouvernement», a-t-il dit.

Les Québécois peuvent appeler leurs députés, signer une pétition et prendre part à une manifestation prévue dimanche à Montréal, a ajouté Amir Khadir, député de Québec solidaire.

«Il faut bombarder le bureau du premier ministre de téléphones (...) pour lui faire signifier ce qui se passe», a dit M. Khadir, ajoutant qu'une pétition électronique avait déjà amassé 33 000 signatures, ce qu'il a qualifié de «remarquable».

«Rappelons-nous dans les premières semaines il y a quelques années, quand on pressait le gouvernement Charest d'instituer une commission d'enquête (sur l'industrie de la construction), il se refusait, c'était une fin de non-recevoir, on avait l'impression qu'il y avait un blocage total. Mais quand la population s'est soulevée en quelque sorte, a fait pression, le rapport de force a changé», a-t-il dit.

Mercredi, le gouvernement Couillard a bloqué une nouvelle tentative de l'opposition visant à inciter la direction de Bombardier à renoncer à ses augmentations pour 2016.

La motion de l'opposition officielle en ce sens a été battue à 61 contre 43 lors d'un vote en fin de journée. Les députés libéraux ont dû se lever tour à tour pour voter contre la motion, approuvant donc du même coup les hausses évaluées à 44 pour cent pour le président-directeur général de Bombardier, Alain Bellemare.

Rappelons qu'à la suite du tollé, Bombardier a reporté de 2019 à 2020 le versement de la deuxième moitié des 32 millions de dollars US de hausses prévues au total pour ses hauts dirigeants, tandis que la première moitié, 16 millions US, allait cependant être versée comme prévu.

«C'est inacceptable ce qui se produit à l'heure actuelle», a renchéri le député péquiste Alain Therrien, «parce qu'on voit encore une fois les gens qui sont riches s'en mettre plein les poches et c'est de l'argent des Québécois. Chaque Québécois a donné dans ce deal-là 300 $ en moyenne.»

La ministre de l'Économie, Dominique Anglade, s'est levée en chambre jeudi pour lire une lettre du Conseil du patronat adressée au chef du PQ, Jean-François Lisée. «Par la présente, nous voulons vous transmettre notre préoccupation réelle à l'égard des dommages collatéraux qui pourraient être causés par le débordement de la joute politique. Poursuivre dans cette veine risque de causer au final plus de tort à l'entreprise, à ses employés, à son image de marque internationale. Nous irions même plus loin. Cela pourrait avoir des impacts plus larges quant à l'appréciation de l'environnement d'affaires au Québec et à notre capacité d'attirer des investissements», a-t-elle dit, en lisant la lettre.

«Vous avez fait le choix de la joute partisane. Nous avons fait le choix des travailleurs (de l'industrie aérospatiale)», a conclu Mme Anglade.

Manifestation dimanche

Le citoyen qui invite à manifester dimanche, Étienne Diotte, explique que cette manifestation réclamera l'annulation complète des hausses de rémunération prévues pour les principaux dirigeants de la multinationale, dont Alain Bellemare, ainsi qu'une réduction très substantielle de la rémunération actuelle de Pierre Beaudoin, président du conseil d'administration de la compagnie.

M. Diotte veut aussi que le gouvernement du Québec établisse des mécanismes pour qu'une situation telle que celle de Bombardier ne puisse pas se reproduire. Il réclame donc que les dirigeants d'entreprises bénéficiant d'une aide gouvernementale substantielle grâce à l'argent des contribuables ne puissent s'octroyer de fortes augmentations de rémunération.

La manifestation de dimanche doit débuter à 13h00 au siège social de Bombardier. Les manifestants seront ensuite invités à marcher jusqu'au bureau du premier ministre du Québec.

Une manifestation du genre a eu lieu la fin de semaine dernière.