Avec de nouvelles compressions de dépenses à l'horizon, les réseaux de l'éducation et de la santé s'apprêtent à encaisser des coupes sombres dans les deux plus importants postes de dépenses du gouvernement.

Les aînés seront parmi les rares à bénéficier de nouvelles mesures dans le budget Bachand. Québec doit réserver une enveloppe à la future politique Vieillir chez soi, en préparation depuis plusieurs mois. C'est l'une des priorités que le premier ministre Jean Charest s'est données dans son discours d'ouverture de la session parlementaire en février 2011. Le crédit d'impôt pour les aidants naturels sera bonifié, tout comme celui pour les «travailleurs d'expérience» de 65 ans ou plus. Des sommes supplémentaires seront consacrées au maintien à domicile.

Le financement du plan de services intégrés pour les personnes âgées, qui vise entre autres à créer des places en hébergement, passera à au moins 200 millions. Notons toutefois que le gouvernement n'a investi qu'une fraction des 150 millions qu'il avait promis pour 2011-2012.

La Presse a déjà indiqué que le ministre Bachand mettra aujourd'hui de la chair autour du projet de Régime volontaire de pensions, qui doit assurer un régime complémentaire de retraite aux 60% des employés du secteur privé qui n'en ont pas.

Dans ce budget, qui risque d'être préélectoral, plusieurs mesures ciblées sont à prévoir. Par exemple, Québec mettra en place une mesure pour favoriser l'embauche d'immigrants par des entreprises situées en dehors de la région de Montréal.

Réseaux inquiets

Mais forcé de freiner les dépenses de programme à 1,4% de croissance, pour atteindre l'objectif de déficit zéro en 2012-2013, le ministre Bachand se devra de serrer la vis aux réseaux. Lise Denis, directrice de l'Association québécoise des établissements de santé, s'inquiète. «Le ministre Bolduc avait garanti 5%, ce qui donnerait 1,5 milliard d'augmentation en santé. Or, on n'est pas sûrs que ce soit au rendez-vous.»

De plus, même si ce chiffre était inscrit au budget des dépenses, le gouvernement ajoute constamment des engagements qu'il croit couvrir avec sa croissance «qui n'est pas élastique». De la fécondation in vitro à la dégénérescence maculaire, en passant par les centres de soins palliatifs en région, les nouveaux médicaments en oncologie, «de mois en mois, le gouvernement s'ajoute des obligations dans cette même augmentation», explique-t-elle. Déjà, sur les 871 millions nécessaires pour les établissements, il y a 185 millionsde dépenses excédentaires. Cette fois, des sources dans le réseau de la santé évoquent un manque à gagner de 500 millions pour faire face aux dépenses réelles.

«C'est dur de dire que 5% de croissance sur 29 milliardsest une mauvaise nouvelle. On est inquiets, ce n'est déjà pas évident. Si, en plus, on pense que cette enveloppe est élastique...», lance Mme Denis. Avec la création du Fonds de financement de la santé, lancé avec la cotisation santé de 200$ payée par tous les contribuables, Québec assumera une croissance de dépenses d'un peu plus de 3% pour le budget de 29 milliards. Le reste viendra du fonds mis en place l'an dernier. Il restera l'an prochain 500 millionsà trouver pour combler les recettes prévues par un ticket modérateur qu'avait dû retirer le ministre Bachand l'an dernier.

Commissions scolaires

Dans le réseau des commissions scolaires, on est également inquiets. Josée Bouchard, présidente de la Fédération des commissions scolaires, a souligné que les acteurs du secteur ont constaté avec appréhension que le Parti libéral (PLQ), vendredi dernier en fin de journée, était revenu à la charge avec son plan de «lutte contre la bureaucratie scolaire», que les militants avaient mis sur une voie de garage au dernier congrès du parti. La commission politique du PLQ, à la veille du dépôt du budget, demande au gouvernement d'imposer aux commissions scolaires et au Ministère un plan de compression de 100 millionspour chacune des trois prochaines années. Grâce à ces compressions, des économies annuelles et récurrentes de 300 millionssont attendues. Les coûts d'administration dans les commissions scolaires sont de 550 millionsavec les coupes attendues. «On se dirige allègrement vers une implosion des services administratifs dans les commissions scolaires», lance Mme Bouchard.

Le militant libéral Michel L'Heureux, commissaire à la commission scolaire anglophone Riverside, avait mené la charge contre la proposition appuyée par Line Beauchamp lors du congrès d'octobre. Il se dit aujourd'hui rassuré que son parti ait apporté de «grosses nuances». Le PLQ précise en effet que les économies récurrentes de 300 millions par année «devront être réalisées tant par le ministère de l'Éducation que par les commissions scolaires». «Ça veut dire que ce n'est pas seulement les commissions scolaires qui vont assumer la facture. Le Ministère aura lui aussi un travail à faire», s'est réjoui M. L'Heureux, qui travaille au bureau de circonscription du député de Verdun, Henri-François Gautrin.

Le parti ajoute également que «recentrer l'action des commissions scolaires» se fera «en tenant compte des réalités territoriales, régionales, linguistiques et socioéconomiques». Une autre nuance qui satisfait M. L'Heureux.