En près de huit ans de règne libéral, l'opposition officielle n'est jamais allée aussi loin. Elle demande à Jean Charest de «réfléchir à son avenir politique», réclamant à mots à peine couverts sa démission. Le premier ministre a trop bafoué les institutions, tonne le Parti québécois.

La chef péquiste Pauline Marois a délégué son leader parlementaire, Stéphane Bédard, pour lancer ce pavé dans la mare jeudi. Pour Jean Charest, «il est temps d'aller prendre une grande marche, avant on disait dans la neige, là on arrive à l'automne, dans les feuilles, pour qu'il réfléchisse à son avenir politique. Je pense qu'on (en) est là», a lancé le député de Chicoutimi en conférence de presse jeudi.

Cette image fait référence à l'annonce de la démission de Pierre Elliott Trudeau en février 1984. La veille de cette annonce, M. Trudeau avait fait une promenade sous la tempête aux alentours de sa résidence officielle, à Ottawa.

Selon Stéphane Bédard, la démission du directeur général des élections, Marcel Blanchet, est la goutte qui a fait déborder le vase, une affaire qui «s'ajoute à tous les événements des dernières semaines, des derniers mois. Les pires scénarios, ils se sont tous produits».

Il reproche au premier ministre d'avoir «banalisé» cette démission, d'avoir «ri aux côtés de son leader parlementaire» Jean-Marc Fournier, lorsque le sujet a été abordé en Chambre. «J'étais catastrophé», a-t-il lancé, soulignant que M. Charest n'a «même pas remercié» le DGE pour ses services.

«Je pense que les faits qui se sont accumulés, et qui ne cessent de s'accumuler, et qu'il banalise» doivent l'amener à «réfléchir en fin de semaine à son avenir», a-t-il ajouté.

Le PQ blâme également M. Charest pour ne pas avoir rappelé à l'ordre sa vice-première ministre Nathalie Normandeau, qui a «attaqué personnellement» le DGE la semaine dernière au sujet de la refonte de la carte électorale. «Ce gouvernement-là ne protège plus les institutions», a dit M. Bédard.

Comission Bastarache

Autre grief formulé par le PQ: Jean Charest a provoqué une perte de «confiance dans l'institution qu'est une commission d'enquête», en nommant le commissaire Bastarache et en définissant son mandat alors qu'il est lui-même mis en cause. La commission n'a plus de crédibilité aujourd'hui, selon M. Bédard. Et c'est sans compter qu'une foule de questions se posent au sujet des nominations faites par le gouvernement, en particulier celles des juges, avec les témoignages entendus à la commission Bastarache.

Enfin, Stéphane Bédard accuse Jean Charest d'avoir «induit la Chambre en erreur» au sujet d'une intervention d'un membre de son cabinet auprès de l'ancien ministre de la Justice, Marc Bellemare, dans le superprocès des Hells Angels, en 2003.

«Qu'est-ce qu'il reste après ça comme institution? Le Vérificateur général? À partir de quand la responsabilité du premier ministre est-elle tellement engagée qu'il peut encore se maintenir en poste?» s'est demandé M. Bédard.

Jean Charest doit-il démissionner? lui a-t-on demandé. «Je ne répondrai pas à sa place pour l'instant. Mais je pense que c'est du jamais vu. C'est à lui de trouver la solution. (...) C'est à lui de voir s'il est encore capable d'assurer la crédibilité des institutions du Québec», a répondu M. Bédard.