L'ancien ministre de la Justice Marc Bellemare trouve inacceptable d'avoir à comparaître devant le Directeur général des élections alors que la question des serments de confidentialité des membres du gouvernement, auxquels il est soumis, n'est pas encore tranchée.

Quelques heures après avoir subi un revers devant la Cour supérieure, qui lui a ordonné de témoigner devant le DGE, M. Bellemare a affirmé qu'il interjettera prochainement appel de cette décision rendue jeudi par le juge Yves Alain.

«Toutes les questions que le DGE veut me poser sont bloquées par la question du serment et de la politique de confidentialité, a-t-il dit lors d'une entrevue à La Presse Canadienne. Alors c'est un problème à notre avis que la Cour supérieure doit régler dans un premier temps mais comme il y a un désaccord avec le juge, on va demander à la Cour d'appel de trancher.»

M. Bellemare, dont les allégations de trafic d'influence dans la nomination des juges défraient les manchettes depuis des mois, a déclaré que M. Alain a erré sur des éléments déterminants.

«On trouve ça inacceptable d'avoir à aller devant le DGE avant que la question du serment et de la politique de confidentialité ne soient tranchés, a-t-il dit. Ça ne nous apparaît pas être le bon moyen. On ne veut pas aller en Cour supérieure 10 fois. On veut y aller une fois.»

Alors que sa date de comparution a été fixée au 20 août, M. Bellemare s'est montré confiant de pouvoir obtenir une décision de la Cour d'appel en sa faveur avant cette date.

«On va demander que le jugement du juge Alain soit cassé, d'un bout à l'autre», a-t-il dit.

En avril dernier, M. Bellemare avait déposé une requête pour faire annuler une assignation à comparaître du DGE, qui souhaitait l'entendre à la suite de ses allégations publiques concernant la possibilité que des entreprises puissent financer le Parti libéral du Québec, ce qui contreviendrait à la loi électorale.

Dans le document, M. Bellemare soutenait qu'il était lié par des serments de confidentialité l'empêchant de divulguer des informations dont il a pris connaissance dans le cadre de ses fonctions de ministre.

Par la suite, le DGE a fait savoir qu'il entendait faire casser cette requête en démontrant qu'il n'existait aucun lien entre les questions de financement politique et les fonctions ministérielles.

Jeudi, après avoir entendu les arguments de l'avocate représentant le DGE, Lucie Fiset, le juge Alain a estimé que M. Bellemare avait abusé des procédures judiciaires en tentant de faire annuler l'assignation à comparaître.

Au palais de justice de Québec, le magistrat a conclu qu'il était trop tôt pour déterminer si les questions des enquêteurs du DGE porteront sur des faits liés aux fonctions ministérielles de M. Bellemare, qui sont couvertes par ses engagements de confidentialité.

«Le subpoena est clair et il vise à obtenir des explications de M. Bellemare à la suite de ses déclarations publiques aux médias concernant le financement corporatif, a-t-il dit. Son recours est prématuré et les questions qui lui seront posées relèvent du domaine de l'hypothèse.»

M. Alain a par ailleurs adressé un blâme au DGE en affirmant qu'il aurait dû agir avec plus de célérité dans ce dossier, qui commandait un traitement urgent.

«Il s'agissait d'un recours abusif, a-t-il dit. On s'est servi du tribunal pour avoir des délais.»

Jeudi avant-midi, le magistrat a croisé le fer à plusieurs reprises avec l'avocat de M. Bellemare, Jean-François Bertrand.

Après avoir écouté M. Bertrand lui expliquer qu'il allait en appeler de sa décision, M. Alain a conclu l'audience en lui adressant un laconique: «Bonne chance».