Le ministre de la Famille ne choisira plus lui-même les garderies qui obtiennent de nouvelles places subventionnées. Sur la sellette depuis des mois en raison des allégations de favoritisme du PQ, Tony Tomassi promet maintenant de suivre les recommandations de comités régionaux pour l'attribution des places à 7$.

En conférence de presse lundi, le ministre a annoncé une série de mesures visant notamment à resserrer le processus d'attribution des places.Son prédécesseur, Michelle Courchesne, avait modifié ce processus en 2008, lors de l'appel de projets pour l'attribution de 18 000 nouvelles places. Elle s'était arrogé le pouvoir de sélectionner les garderies qui obtiennent des places, à partir des évaluations faites par ses fonctionnaires. L'Association québécoise des centres de la petite enfance et celles des garderies privées avait dénoncé le manque de transparence du processus.

Tony Tomassi a finalement décidé de réintroduire une consultation régionale. Des comités composés de «partenaires régionaux» - des représentants des conférences régionales des élus, des commissions scolaires, des CLSC, des garderies privées et publiques, de différents ministères, par exemple - feront un choix parmi les projets déposés et jugés recevables par le Ministère. «Je n'irai pas à l'encontre des recommandations des gens du milieu», a dit le ministre Tomassi. Il a souligné que «les recommandations devront se faire sur la base des priorités de développement qui auront été clairement établies et largement diffusées par le ministère».

Tony Tomassi a envoyé les premiers signaux de cette volte-face à La Presse en février. Il avait alors exprimé son intention d'apporter des changements au processus d'attribution des places qu'il avait jusqu'alors toujours défendu. Lundi, le ministre n'a pas voulu identifier les lacunes du processus mis en place par Mme Courchesne, se contentant de dire que «tout système est perfectible».

Nouvelles exigences

La nouvelle façon de faire sera mise en application très bientôt. Car des 18 000 places attribuées en 2008, 700 ne peuvent se concrétiser selon les modalités et les échéanciers fixés par le Ministère. Un nouvel appel de projets sera lancé pour les redistribuer.

Le gouvernement Charest a également promis l'attribution de 15 000 nouvelles places subventionnées d'ici la fin de son mandat - 70% seront données à des CPE et des garderies en milieu familial, 30% à des garderies privées. De nouvelles exigences s'appliqueront, comme la présentation d'un programme éducatif et la divulgation des actionnaires dans le cas d'une entreprise privée. Québec veut obtenir la garantie que l'entreprise «existe réellement et a pignon sur rue». «On veut s'assurer que ce soit avec ces mêmes actionnaires que l'entreprise réalise le projet, obtienne ensuite le permis et signe l'entente de subvention», a ajouté M. Tomassi, répondant ainsi aux allégations relatives à l'existence d'un marché secondaire de revente de permis de garderie. Les promoteurs devront enfin soumettre des preuves et des garanties quant à la faisabilité de leur projet.

Une garderie privée devra désormais aviser le Ministère de tout changement d'actionnaire ou d'administrateur 3 mois à l'avance, plutôt que 30 jours. Pour tout transfert de plus de 10% des actions, de nouvelles demandes de permis et de subventions devront obligatoirement être faites. Si le nouvel actionnaire d'une garderie a «un passé de surfacturation ou de plaintes», par exemple, Québec pourrait refuser de signer une nouvelle entente de subvention avec l'établissement, a indiqué M. Tomassi.

Sanctions plus sévères

D'ailleurs, le ministre renforce les sanctions en matière de surfacturation. Une garderie délinquante devra désormais rembourser aux parents les sommes perçues illégalement. Le Ministère a toujours le pouvoir de diminuer ou de suspendre la subvention. Le nombre d'inspecteurs du Ministère passera de 18 à 58.

Québec envisage de ne pas attribuer de nouvelles places subventionnées pendant une période maximale de cinq ans à un service de garde qui commet des infractions liées à la tarification, à l'hygiène ou aux normes de sécurité.

Tony Tomassi a également annoncé qu'une directive sera présentée d'ici la fin juin afin d'interdire «toute activité ayant pour objectif l'apprentissage d'une croyance, d'un dogme ou de la pratique d'une religion spécifique». Les garderies qui ne s'y conforment pas seront privées de subventions.

«Aveu de culpabilité»

Pour le Parti québécois, Tony Tomassi fait «une volte-face spectaculaire». «Par les mesures qu'il a annoncées, il fait un aveu de culpabilité. Il a fait la démonstration que le processus d'attribution des places en 2008 était vicié», a affirmé le député Nicolas Girard.

Selon lui, le Vérificateur général doit mener une enquête sur le «scandale des garderies libérales». Depuis décembre, M. Girard accuse le gouvernement Charest de favoritisme à l'égard de donateurs libéraux - dont des organisateurs et des proches de M. Tomassi - dans l'attribution des nouvelles places subventionnées. Il réclame la démission du ministre, car celui-ci «n'a plus aucune crédibilité», lui qui disait jusqu'à tout récemment que le processus d'attribution des places en 2008 avait été «rigoureux».