Le gouvernement Trudeau manque profondément de respect envers l'Assemblée nationale en écartant du revers de la main la demande de Québec d'instaurer une déclaration de revenus unique pour les contribuables québécois, estime le député conservateur Alain Rayes, qui est aussi le lieutenant politique d'Andrew Scheer au Québec.

Dans une entrevue accordée à La Presse, M. Rayes affirme qu'il s'agit là d'un exemple supplémentaire montrant que le réflexe centralisateur fait bel et bien partie de l'ADN des libéraux de Justin Trudeau.

« C'est encore une fois le "Ottawa knows best" qui s'affirme. On le voit dans tous les projets à la Chambre des communes, à partir du moment où les provinces cherchent à avoir plus d'autonomie, on sent qu'ils sont réfractaires à cela. Il faut changer cette dynamique », a déclaré M. Rayes, qui a vu les militants québécois du Parti conservateur soutenir cette idée de créer une déclaration unique gérée par le Québec durant leur conseil national qui a eu lieu il y a environ deux semaines à Saint-Hyacinthe.

« Je pense que c'est un manque de considération flagrant envers le Québec. Tous les partis à l'Assemblée nationale, d'une façon unanime, ont endossé cette idée. Nous, de notre côté, nous allons travailler très fort pour que cette idée fasse partie du programme électoral du Parti conservateur aux prochaines élections. »

« C'est une façon de reconnaître au Québec des éléments qu'il revendique depuis longtemps. » - Le député conservateur Alain Rayes

Pour l'heure, les libéraux de Justin Trudeau sont les seuls sur la scène fédérale à rejeter l'idée d'instaurer une déclaration unique pour les contribuables québécois. Le Nouveau Parti démocratique a approuvé cette mesure lors de son dernier congrès national à Ottawa, en février. Tout indique que le Parti conservateur va en faire autant à son congrès national prévu en août à Halifax, le chef conservateur Andrew Scheer ayant déjà qualifié l'idée de « très, très intéressante » après avoir vu ses troupes du Québec voter en faveur lors de leur conseil national à Saint-Hyacinthe.

DEMANDE FORMELLE

Le gouvernement Couillard, par la voix du ministre des Finances Carlos Leitão, a fait savoir qu'il comptait demander formellement à Ottawa de lui confier le soin de percevoir les impôts fédéraux des contribuables québécois pour instaurer une déclaration de revenus unique dans la province.

Le gouvernement Trudeau a opposé une fin de non-recevoir à cette mesure en insistant d'abord sur la perte d'emplois bien rémunérés dans les centres fiscaux fédéraux qui sont situés dans des régions comme Shawinigan et Jonquière.

Il a aussi laissé entendre que si le gouvernement du Québec souhaitait une déclaration unique et faciliter la vie des contribuables québécois, il devrait plutôt envisager d'abandonner sa propre déclaration, étant donné qu'Ottawa a déjà une expertise dans l'administration des taxes et impôts provinciaux et territoriaux.

Au Québec, on compte quelque 4700 employés de l'Agence du revenu du Canada (ARC), soit l'équivalent de 11,7 % de l'effectif total de cette agence fédérale. On évalue aussi que le budget annuel de l'ARC, pour le Québec, est de 303 millions de dollars.

L'âge moyen des employés au Québec est de 48 ans, mais 27 % d'entre eux seront admissibles à la retraite au cours des trois prochaines années.

Le syndicat représentant les employés de l'Agence du revenu du Canada affirme qu'il s'oppose catégoriquement à une telle mesure. Fait à noter, la ministre du Revenu national au sein du gouvernement Trudeau, Diane Lebouthillier, a récemment expliqué son opposition à cette mesure en accordant une entrevue au quotidien anglophone The Globe and Mail.

« Je trouve que c'est manquer de respect envers les fonctionnaires du Québec de dire qu'ils n'ont pas l'expertise pour faire ce travail, rétorque M. Rayes. Le Québec a déjà démontré qu'il peut faire ce genre de travail en percevant la TPS au nom du gouvernement fédéral. Ce n'est pas vrai que cela ne peut pas se faire. C'est complexe, oui. Mais quand on s'assoit et qu'on a le même objectif, c'est-à-dire de mieux servir le citoyen pour qu'il soit au centre des décisions, on est tous assez intelligents autour d'une table pour trouver des solutions. »