Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, n'est pas passé inaperçu lors de sa visite au Lac-Saint-Jean mardi.

«Regarde le turban!», s'est exclamé un client de la brasserie Chez Mario Tremblay en le voyant déambuler sur le trottoir entouré d'une horde de caméras et de journalistes.

Élu à la tête du NPD il y a dix jours, le nouveau chef de confession sikhe est arrivé à Alma lundi soir pour épauler sa candidate Gisèle Dallaire en vue de l'élection partielle du 23 octobre.

Il s'agit d'une première visite dans une région du Québec située à l'extérieur de Montréal pour celui qui porte le turban et le kirpan. Un sondage de la firme Angus Reid révélait vendredi que seulement un Québécois sur deux voterait pour quelqu'un qui porte ce type de signes religieux.

«Je ne veux pas convaincre quelqu'un d'accepter mon turban et ma barbe. Ce n'est pas mon but, a-t-il répété en conférence de presse. Mon but est de montrer que je partage les mêmes valeurs progressistes, sociales-démocrates.»

Sa journée a débuté par une tournée des médias et une conférence de presse lors de laquelle il a essuyé de nombreuses questions sur ses signes religieux.

Il était entouré de son chef parlementaire, Guy Caron, de la députée de Jonquière, Karine Trudel, et de la candidate néo-démocrate Gisèle Dallaire.

Le porte-à-porte au centre-ville d'Alma qui était à l'horaire la veille a été remplacé par une tournée d'organismes et d'entreprises en après-midi. Jagmeet Singh est tout de même allé à la rencontre des Jeannois dans un petit centre commercial à la grande surprise des gens qui s'y trouvaient.

«Si ça peut ouvrir les yeux aux gens, a affirmé Sébastien Boies qui a dit avoir entendu des commentaires désobligeants le matin même dans son entourage sur l'apparence du chef néo-démocrate. Ce n'est pas parce qu'on est en région qu'on doit être reculé de la société.»

«Les gens vont voter pure laine dans la région. Le turban ne passera pas», a constaté sa conjointe Mélissa Bouchard.

Ce signe religieux, bien visible, suscite l'appréhension de Gilles Émond, un commerçant à la retraite qui ignorait l'existence du jeune politicien jusqu'à tout récemment.

«Il n'aura jamais mon vote de sa vie avec un turban sur la tête, a-t-il dit. (...) C'est trop apparent. Nous autres au Lac-Saint-Jean, on est du monde assez catholique, puis il arrive avec une autre religion. Pour moi, c'est assez difficile à accepter.»

La candidate Gisèle Dallaire ne semble pas craindre de perdre des votes à cause de son chef.

«C'est la première fois qu'un chef provient d'une minorité culturelle, a-t-elle remarqué. Pour nous, c'est un accomplissement et ça représente bien l'ouverture et la diversité de notre parti.»

Raynald Lemieux, 75 ans, qui était jusqu'à tout récemment propriétaire d'un concessionnaire automobile, avoue qu'auparavant il aurait eu des réticences à voter pour un parti représenté par un chef de confession sikhe.

«On a de la difficulté avec les sociétés ethniques, un petit peu quand même, a-t-il admis. (...) Lui, il va nous aider à régler ce problème-là.»

Le retraité est spontanément sorti de sa voiture pour aller saluer Jagmeet Singh lorsqu'il l'a aperçu au centre-ville.

«Je viens de jaser avec et c'est un gars qui a l'air super sympathique, dynamique et c'est ça que ça nous prend», a-t-il continué en soulignant le fait que le chef néo-démocrate se porte à la défense du français.

Son turban attire l'attention, a reconnu le chef néo-démocrate. Quelques personnes lui ont posé des questions sur ses signes religieux auxquelles il a répondu volontiers lors d'une rencontre lundi soir avec des dizaines de militants néo-démocrates.

«Il y a des gens qui ont demandé: qu'est-ce qu'il y a dans le turban? Et j'ai dit beaucoup de cheveux! J'ai des cheveux très longs», a-t-il raconté en riant.

«Les gens ont parlé des cheveux de quelqu'un d'autre, mais moi j'ai plus de cheveux et c'est plus long et c'est plus joli», a-t-il continué à la blague en faisant allusion au premier ministre Justin Trudeau.

Jagmeet Singh n'est pas le seul chef de parti qui courtisera les électeurs de la circonscription de Lac-Saint-Jean cette semaine.

La chef du Bloc québécois, Martine Ouellet, prêtera également main-forte à son candidat Marc Maltais jeudi et vendredi tandis que le chef du Parti conservateur, Andrew Scheer, passera les journées de jeudi, vendredi et samedi au Lac-Saint-Jean pour faire campagne avec son candidat Rémy Leclerc. Les conservateurs espèrent pouvoir garder l'ancienne circonscription de Denis Lebel.

Le premier ministre Justin Trudeau n'est pas attendu avant la semaine prochaine puisqu'il passera les prochains jours à Washington et à Mexico alors que s'amorcera la quatrième ronde de négociation de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA).

Renouveau du Bloc québécois?

Le Bloc québécois pourrait refaire une percée au Lac-Saint-Jean, croit le député péquiste Alexandre Cloutier, qui a donné mardi son appui au candidat bloquiste Marc Maltais pour l'élection partielle dans Lac-Saint-Jean.

«L'arrivée de Marc Maltais sur la scène politique fédérale non seulement nous donne espoir, mais nous permet de croire que cette fois-ci tout est possible», a souligné M. Cloutier en rappelant que le parti trouve ses origines au Lac-Saint-Jean.

Le Bloc québécois est dirigé par Martine Ouellet, l'ancienne rivale d'Alexandre Cloutier durant les deux dernières courses à la direction du Parti québécois.

Marc Maltais s'est bien gardé de jouer la carte des signes religieux portés par le chef du NPD pour marquer des points contre son adversaire lors de son point de presse.

«On ne devrait pas juger quelqu'un en fonction de son habillement ou de son turban», a-t-il affirmé.

«Les gens qui vont voter pour moi, j'espère qu'ils vont le faire pour mes convictions à moi et non contre quelque chose», a-t-il ajouté.

Marc Maltais, un syndicaliste, a obtenu l'appui mardi soir des 650 travailleurs de l'usine de Rio Tinto Alcan à Alma réunis en assemblée spéciale pour en discuter. Les Métallos ont appuyé le candidat bloquiste à l'unanimité.

M. Maltais s'était fait connaître du grand public en défendant les travailleurs de cette usine lors du lock-out en 2012.

Lors de l'élection fédérale de 2015, le Bloc québécois et le Parti libéral avaient chacun récolté 18,4% des voix dans cette circonscription, loin derrière le conservateur Denis Lebel avec 33,3% et la néo-démocrate Gisèle Dallaire, qui avait obtenu 28,5% des suffrages.