Alors que les mauvaises nouvelles s'abattent sur l'économie canadienne, les conservateurs parcourent le pays pour annoncer des projets d'infrastructure et pour mettre en relief leur nouvelle prestation pour les enfants en bas âge. Mais ces nombreuses dépenses seront bénéfiques pour l'économie, martèle le ministre des Finances, Joe Oliver.

La période préélectorale pour le prochain scrutin du mois d'octobre survient alors que le portrait économique du pays apparaît plus sombre. Certains experts parlent d'une possible récession, les prévisions de croissance sont revues à la baisse et les prix du pétrole sont encore bas. De bien mauvaises nouvelles pour un gouvernement conservateur qui vantait sa bonne gestion de l'économie.

Par le passé, les conservateurs tentaient de se faire réélire en annonçant des investissements populaires auprès de l'électorat, mais tout en promettant un retour à l'équilibre budgétaire. Cette fois-ci, avec une économie plus faible, ils ont dû changer de stratégie et faire la promotion de l'intervention de l'État.

«Ce que les gens devraient comprendre, c'est que certaines des mesures que le premier ministre a annoncées et que j'ai annoncées dans le budget injecteront presque 10 milliards $ dans l'économie cette année», a affirmé le ministre Joe Oliver, mardi dernier, à Vancouver.

«Les deux sources principales de ces rentrées d'argent viennent des programmes pour les familles et des dépenses en infrastructures. Donc ça aura un impact, un impact positif sur l'activité économique canadienne», a-t-il poursuivi.

Le 20 juillet prochain, les parents d'enfants de moins de 18 ans pourront bénéficier de nouvelles prestations - qui sont rétroactives à partir du mois de janvier - une mesure qui coûtera plus de 2,5 milliards $ au gouvernement.

En même temps, les ministres et les députés conservateurs se promènent au Canada pour annoncer presque quotidiennement de nouveaux projets d'infrastructures dans leurs communautés. Selon le bureau du ministre Oliver, le gouvernement a ajouté plus de 1,6 milliards $ au fonds d'infrastructures en 2015 et 2016.

Les économistes sont partagés sur les réels effets de ces politiques sur l'économie canadienne cette année. Mais ils sont d'accord sur un point: avec un budget équilibré, les conservateurs n'annonceront probablement pas de nouvelles mesures pour éviter une récession d'ici aux élections du mois d'octobre.

«Ils sont un peu piégés, parce qu'ils font du retour à l'équilibre budgétaire l'un des points importants de leur plateforme électorale», a noté Don Drummond, ancien fonctionnaire au ministère des Finances et maintenant professeur à l'université Queen's.

Mike Moffat, enseignant à l'école de commerce de l'université de Western Ontario et économiste en chef au groupe de réflexion Mowat Centre, affirme que les prédictions de croissance à la baisse de la Banque TD suggèrent une perte pour le gouvernement de 3 milliards $. La Banque prévoit une croissance de 1,2 pour cent, alors que le ministre Oliver avait plutôt fait ses calculs avec une de 2 pour cent.

M. Moffat, qui a d'ailleurs aidé le Parti libéral dans l'élaboration de sa propre politique familiale, croit toutefois que les chèques remis aux parents auront des effets positifs.

«Je ne crois pas que le gouvernement savait qu'on serait en récession au mois de juillet (...) C'est un heureux hasard et je crois que ce sera bénéfique», a-t-il avancé.

Finn Poschman, vice-président du groupe de réflexion C. D. Howe, estime que cette politique n'aura pas d'effets négatifs, ni d'effets «fortement positifs».

«La possibilité que (la mesure) soit inoffensive est beaucoup plus forte que le contraire», a analysé celui qui se décrit comme un économiste «centré sur le marché».

Selon Don Drummond, toutefois, ce sont davantage les fonds en infrastructure qui auront des impacts positifs sur l'économie et moins les subventions remises directement aux familles.