Le gouvernement Harper répond à une demande pressante des municipalités et reconduit le programme de financement des infrastructures pour 10 ans. Ottawa investira au total 53 milliards à cette fin, dont 47 milliards en argent neuf.

« Le Plan d'action économique engagera le Canada dans le plus important chantier de son histoire », a résumé le ministre de l'Industrie, Christian Paradis.

Les sommes engagées par Ottawa pour la prochaine décennie sont réparties dans trois programmes.

Doté d'une enveloppe de 32 milliards sur 10 ans, le Fonds d'amélioration des collectivités permettra aux villes d'obtenir du financement fédéral pour les projets d'infrastructure comme des routes, des aéroports locaux, des voies ferroviaires, des projets de culture et de tourisme.

Une part de l'enveloppe provient des taxes sur l'essence qu'Ottawa transfère aux villes. L'autre vient du remboursement de la TPS.

Le gouvernement conservateur a également renouvelé le Fonds Chantiers Canada, qui finance des projets qui stimulent l'économie.

Dans sa mouture précédente, lancée en 2007, le programme a financé 12 000  projets d'infrastructures. Il a notamment permis un financement de 705 millions pour la construction en PPP de la phase 2 de l'autoroute 30, entre Vaudreuil-Dorion et Châteauguay.

Le programme de 14 milliards sur 10 ans est divisé en deux. Une enveloppe de 4 milliards est réservée à des projets d'envergure nationale comme des routes et des projets de transport en commun. Le financement sera accordé par Ottawa selon le mérite de chaque projet, sans égard à la répartition géographique.

Une autre enveloppe de 10 milliards sera répartie entre les provinces. Quelle sera la part de la tarte du Québec? On l'ignore. Le gouvernement fédéral ne précise pas combien obtiendra chaque province en vertu de cette nouvelle formule.

Le Fonds PPP Canada, qui totalisera 1,25 milliard, encouragera le recours au financement public-privé pour les projets d'infrastructure. Tous les projets dépassant 100 millions seront évalués pour déterminer s'il serait plus rentable des les mener en mode PPP.

Ponts Champlain et Mercier

Le budget conservateur prévoit des investissements dans deux infrastructures fédérales du Grand Montréal : le pont Champlain et le pont Honoré-Mercier.

Ottawa prévoit investir 124,9 millions pour construire le pont-jetée entre Montréal et l'île des Soeurs, un prolongement du pont Champlain. Le gouvernement fédéral a dû rebâtir cette infrastructure d'urgence après un rapport d'évaluation l'an dernier.

Le gouvernement réserve aussi 53 millions sur deux ans pour réparer et renforcer les armatures d'acier du pont Honoré-Mercier, qui relie Montréal et la Rive-Sud. Cet investissement porte à 135 millions les sommes versées par le fédéral dans ce projet.

Le budget ne prévoit aucun fonds pour le nouveau pont Champlain en 2013-2014, et 14 millions en 2014-2015.

Les municipalités canadiennes comblées

L'annonce répond à une demande de longue date des municipalités canadiennes, qui réclamaient une formule prévisible pour financer le renouvellement de leurs infrastructures.

« Ce sont les deux fonds qui permettent aux municipalités de savoir exactement combien elles vont recevoir, s'est réjouie la présidente de la Fédération canadienne des municipalités, Karen Leibovici. Avec l'indexation de 2%, elles savent maintenant comment ce fonds va évoluer. Les municipalités peuvent donc planifier leurs investissements à long terme, savoir combien elles vont pouvoir dépenser. »

L'Union des municipalités du Québec (UMQ) a pour sa part réservé un accueil plus tiède aux nouvelles mesures. Son président, Éric Forest, estime que les sommes annoncées ne permettront pas aux villes de freiner la détérioration de leurs infrastructures.

« On peut comprendre que dans le contexte actuel avec la poursuite de l'objectif du déficit zéro, il n'y a pas eu de ponction ou de coupures, c'est un élément important, a convenu M. Forest. Il est clair qu'une fois l'atteinte du déficit zéro est réalisée en 2015, il faudra rattraper le retard qu'on prend dans la mise à niveau des infrastructures.»

Pas assez selon l'opposition

Le chef du Nouveau Parti démocratique, Thomas Mulcair, souligne que les villes sont responsables de 40% des infrastructures au Canada, alors qu'elles ne disposent que de 8% de l'assiette fiscale. Il souhaite que la part de la taxe sur l'essence transférée aux municipalités soit augmentée de manière permanente, une mesure qui ne se retrouve pas dans le budget Flaherty.

Voilà pourquoi, à ses yeux, les sommes annonces jeudi ne permettront pas aux villes de renouveler leurs routes, égouts et ponts.

« Les chiffres qui sont en train de sortir ne sont pas confirmés dans la réalité, a-t-il affirmé. Ils font défaut, par exemple, de calculer l'inflation et l'augmentation prévisible des cours. »

Le chef libéral, Bob Rae, se dit favorable à ce que l'enveloppe fédérale destinée aux infrastructures soit maintenue pour 10 ans. Mais il estime que les sommes qu'Ottawa consacre aux infrastructures resteront les mêmes chaque année, ce qui équivaut à un gel.

Pour lui, il faudrait que le fédéral se commette davantage.

« On a un déficit d'infrastructure qui est énorme, a dit M. Rae. M. Flaherty a parlé aujourd'hui du déficit, mais il faut aussi regarder les déficits en environnement, les déficits dans les communautés autochtones, les déficits dans les infrastructures municipales et provinciales. »

Avec la collaboration d'Annabelle Blais

Combien ça coûte?

47 milliards d'argent neuf sur 10 ans

> 32,2 milliards - Fonds d'amélioration des collectivités transférés aux villes

> 14 milliards - Fonds Chantiers Canada pour les grands projets économiques

> 1,25 milliard - Financement de projets d'infrastructure en mode PPP