Souhaitant protéger les moins fortunés et les provinces de la lutte au déficit du gouvernement fédéral, le Bloc québécois a proposé lundi une série de mesures pour permettre à Ottawa de renouer avec les surplus budgétaires.

A l'instar de ses propositions des dernières années, quant à la gestion de l'économie du gouvernement, le parti a suggéré une réduction de la taille de la fonction publique fédérale, une baisse des dépenses militaires ainsi qu'une augmentation de l'imposition des pétrolières et des grandes banques.

Le Bloc estime que s'il suivait ses propositions, le gouvernement fédéral pourrait économiser 16 milliards $ par année, conduisant éventuellement à la fin du déficit, sans pour autant réduire les transferts aux gouvernements des provinces. Pour l'exercice en cours, le gouvernement fédéral prévoit enregistrer un déficit de 56 milliards $.

Mais le gouvernement conservateur s'est montré peu enclin à suivre les suggestions des bloquistes, le lieutenant politique du premier ministre Stephen Harper, Christian Paradis, rejetant rapidement toute hausse de taxes et d'impôts.

M. Paradis faisait notamment référence à une nouvelle proposition des bloquistes, qui suggère d'ajouter une surtaxe d'un pour cent aux Canadiens les plus riches, ce qui permettrait au gouvernement fédéral d'encaisser des revenus de 1,5 milliard $.

Le porte-parole du Bloc en matière de finances, Jean-Yves Laforest, et le conseiller économique du parti, Daniel Paillé, ont expliqué, en point de presse, que cette mesure s'adresserait aux quelque 450 000 contribuables du pays qui ont des revenus imposables de plus de 150 000 $. Et M. Paillé a indiqué qu'il ne doutait pas que cette proposition ait l'appui de la majorité des Canadiens.

«Qu'une personne qui a un revenu imposable de 150 000 $ (...) contribue 1500 $ de plus pendant deux, trois ou quatre ans, il n'y a personne qui va pleurer dans Hochelaga», a estimé celui qui espère porter les couleurs du Bloc québécois dans cette circonscription montréalaise, à l'occasion d'une élection partielle qui s'y tiendra le 9 novembre.

Outre les Canadiens les plus fortunés, le Bloc québécois veut aussi faire payer les pétrolières et les grandes banques. En leur retirant les privilèges fiscaux dont elles bénéficient et en obligeant les banques à contribuer aux impôts canadiens, Ottawa pourrait recueillir près de 6 milliards $, selon les bloquistes.

Ottawa devrait cependant commencer par «faire le ménage dans (sa) propre cour», a tranché M. Laforest.

«Le gouvernement fédéral a laissé exploser ses dépenses bureaucratiques de façon indécente», a-t-il dénoncé.

Citant un rapport du Bloc québécois rendu public en novembre 2007, M. Paillé a avancé que ces dépenses auraient augmenté de 74 pour cent, depuis 1998, pour atteindre 22 milliards $ de plus il y a deux ans.

En réduisant la taille de la fonction publique en ne remplaçant, par exemple, qu'un ou deux fonctionnaires sur trois départs à la retraite, le fédéral pourrait épargner 8 milliards $ par année, ont plaidé les bloquistes.

Or, le lieutenant québécois de M. Harper n'a pas perdu de temps pour s'opposer aux propositions du Bloc. «Ca me paraît néfaste, ça ne me paraît pas réfléchi, ça me paraît improvisé encore une fois», a reproché M. Paradis au plan bloquiste.

Il n'a toutefois pas voulu dévoiler de quelle façon le gouvernement conservateur s'y prendrait pour réduire ses dépenses, afin d'éponger son déficit. «Il est hors de question de pelleter le déficit dans la cour des provinces», a-t-il néanmoins assuré.

Par ailleurs, reprenant le slogan de leur dernière campagne publicitaire - «Deux partis, un regard» -, les bloquistes ont dénoncé les dépenses militaires que prévoient faire libéraux et conservateurs. Le Bloc propose plutôt que tout achat de plus de 100 millions $ soit étudié en comité et qu'un moratoire soit imposé aux acquisitions militaires, ce qui amènerait des économies de 1 milliard $, selon le parti.

Et même si le Bloc québécois a pris l'habitude de faire ce genre de propositions à saveur économique aux gouvernements en place, ce ne sont pas des coups d'épée dans l'eau, selon M. Laforest, car les gouvernements libéraux et conservateurs s'en sont déjà inspirés.

«Si d'autres partis, d'autres membres de la Chambre, veulent prendre ces idées, nous serons très heureux. On n'est pas propriétaires des bonnes idées, si on peut les partager, tant mieux», a pour sa part souligné M. Paillé.