(Colorado Springs) Le premier ministre Justin Trudeau et la ministre de la Défense Anita Anand ont eu un aperçu mardi de la première ligne de défense continentale de l’Amérique du Nord, un système dont les experts et les dirigeants politiques conviennent qu’il a grandement besoin d’être modernisé.

M. Trudeau et Mme Anand, flanqués des commandants américain et canadien du Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord (NORAD), ont échangé des civilités avec le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, alors que leur visite commençait dans une salle de conférence ornée d’images d’avions de chasse et d’insignes militaires.

Le général de l’U. S. Air Force, Glen VanHerck, actuel commandant conjoint du NORAD et du U. S. Northern Command, a ouvert la réunion en expliquant l’importance de sa mission.

« Je me lève tous les jours, comme tous nos autres membres, sachant que nous avons la mission la plus noble de la planète, et c’est la défense de notre patrie », a déclaré M. VanHerck.

« Nous devons parler un peu des défis auxquels nous sommes confrontés dans le pays. Nous parlerons de notre stratégie pour relever ces défis. Et puis nous parlerons de certains des potentiels que nous poursuivons. »

M. Trudeau a présenté les responsabilités partagées du NORAD comme un excellent exemple de la nature étroite des relations entre les deux pays.

« Le monde change à bien des égards – les menaces évoluent, les technologies changent, a-t-il dit. Mais une chose ne change pas : le partenariat et l’amitié inébranlables que nous entretenons entre nos deux pays. Et cela n’est nulle part plus évident que la nature intégrée du travail que nous faisons ici au NORAD. »

M. Trudeau, Mme Anand et M. Austin ont été accueillis par une garde d’honneur aux couleurs du Canada et des États-Unis ainsi que des interprétations des deux hymnes nationaux.

« Le NORAD est le seul commandement binational au monde, a indiqué M. Austin à la délégation canadienne. Cela met en évidence la profondeur et l’étendue de notre relation et notre engagement envers la défense mutuelle. »

En route vers le Sommet des Amériques

M. Trudeau, le ministre de l’Environnement Steven Guilbeault et la ministre des Affaires étrangères Mélanie Joly passeront le reste de la semaine à Los Angeles, où le président Joe Biden accueille des dirigeants de tout l’hémisphère occidental pour le Sommet des Amériques.

Lundi, M. Trudeau n’a pas dit explicitement s’il soutenait la décision de M. Biden d’exclure le Venezuela, le Nicaragua et Cuba du sommet, en raison de leur mépris pour les valeurs démocratiques et de leurs antécédents douteux en matière de droits de l’homme.

La décision a suscité des protestations dans d’autres régions d’Amérique latine ainsi qu’une défection proéminente de la part de l’un des partenaires les plus importants : le président mexicain Andrés Manuel López Obrador.

Certains des pays de l’hémisphère sont « moins sur la même longueur d’onde » que d’autres, a reconnu M. Trudeau, mais ils partagent tous un certain nombre de défis sérieux, notamment les pressions migratoires, le changement climatique et le rétablissement complet de la pandémie de COVID-19.

Tous les trois seront à l’ordre du jour du sommet d’une semaine, dont la partie pour les dirigeants devrait débuter mercredi.

Avant de quitter Ottawa, Mme Anand a déclaré qu’elle était « très proche » du secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin.

Interrogée sur le temps qu’il faut pour effectuer les mises à niveau, Mme Anand a expliqué que le gouvernement maintenait entre-temps les systèmes de défense continentaux.

« Alors nous allons continuer à travailler dessus, a-t-elle annoncé. La modernisation du NORAD est le chapitre non écrit de “Protection, Sécurité, Engagement”, notre politique de défense de 2017. »

M. Guilbeault devrait participer aux discussions sur les changements climatiques, tandis que Mme Joly rencontrera le secrétaire d’État américain Antony Blinken et son homologue mexicain Marcelo Ebrard.

Situation du Venezuela, du Nicaragua et de Cuba

M. Trudeau était sur ses gardes lorsqu’il a été interrogé lundi sur l’exclusion du Venezuela, du Nicaragua et de Cuba du sommet.

Lors d’une conférence de presse conjointe avec le nouveau président chilien, Gabriel Boric, lundi à Ottawa, M. Trudeau a expliqué que « par rapport au Venezuela, ça fait longtemps que le Canada condamne le régime illégitime de Nicolás Maduro, pour son abus des droits humains et des principes démocratiques, mais aussi pour cette crise de migration extrêmement difficile qui frappe très très fort en Amérique du Sud ».

Pour ce qui est de Cuba, M. Trudeau a plaidé qu’« on a toujours été là pour se tenir droit et fort pour défendre les droits humains, pour pousser pour plus de démocratie, mais on reconnaît que le Canada a toujours eu une approche différente sur Cuba que les États-Unis ».

M. Boric a été beaucoup plus direct pour condamner « l’erreur » de la Maison-Blanche. « Nous devons exprimer aux États-Unis et ailleurs que l’exclusion n’est pas la bonne voie », estimait M. Boric lundi. « Lorsque les États-Unis décident d’exclure certains pays du sommet, ils renforcent en fait la position que ces autres pays prennent chez eux. »

La décision de M. Biden d’exclure les trois pays a incité le président mexicain Andrés Manuel López Obrador à confirmer lundi qu’il ne participerait pas à ce Sommet des Amériques.

L’attachée de presse de la Maison-Blanche, Karine Jean-Pierre, a rejeté lundi l’idée que la décision de M. López Obrador d’éviter le sommet constitue un signe du déclin de l’influence américaine dans l’hémisphère.

« Les États-Unis demeurent la force la plus puissante dans la conduite d’actions hémisphériques pour relever les principaux défis auxquels sont confrontés les peuples des Amériques – inégalités, santé, climat et sécurité alimentaire », a déclaré Mme Jean-Pierre.

« Le président pense qu’il doit s’en tenir à ses principes et ne pas inviter de dictateurs, mais nous pourrons toujours avoir une conversation approfondie. [Le président] a un ordre du jour chargé, il va être très occupé. »

Le chef néo-démocrate, Jagmeet Singh, a déclaré mardi que les trois pays ne devraient pas être empêchés de faire entendre leur voix lors du sommet simplement parce que M. Biden a « des opinions politiques différentes ».

« Les préoccupations soulevées concernant les droits de la personne sont toujours importantes à prendre en compte, mais ce n’est pas une raison pour refuser à ces pays la participation à un Sommet des Amériques. Je pense que c’était la mauvaise décision », a déclaré M. Singh aux journalistes à Ottawa.

« Je comprends pourquoi le président du Mexique proteste. Le Canada devrait également indiquer clairement qu’il appuie la participation de ces trois pays. »

Les autres priorités du sommet consisteront à aider les pays à contrôler la pandémie de COVID-19, à forger de nouveaux liens sur les initiatives climatiques et énergétiques, à lutter contre l’insécurité alimentaire et à tirer parti des accords commerciaux existants pour mieux garantir que davantage de personnes puissent en profiter.